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Abdoul Karim Traoré de Perfectum Afrique : "Le pouvoir des Dozos est le pouvoir du savoir"

Publié le jeudi 20 novembre 2008 à 01h39min

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La rentrée RTB 2009 a connu une forte participation de la confrérie des chasseurs traditionnels. Venus de la Côte d’Ivoire, du Mali et du Burkina, ils étaient au nombre de 600 à mettre en exergue leur savoir-faire culturel et mystique. Et c’est devant un public nombreux acquis à leur cause qu’a débuté ce vendredi 10 octobre 2008 à 20 heures cette soirée culturelle pour ne s’achever qu’au petit matin.

Cette nuit dozo, qui a connu un franc succès, était parrainée par le directeur général de Perfectum Afrique. Alors, comment un intellectuel de la trempe d’Abdoul Karim Traoré a pu flirter avec ces Dozos que l’on craint généralement pour leur pouvoir « mystique et surnaturel » ? Abdoul Karim Traoré, que nous avons rencontré, nous donne des explications.

En tant qu’intellectuel comment expliquez-vous vos relations avec les chasseurs dozos ?

• Je suis d’une famille dozo. Notre village, qui est situé à 32 km d’Orodara, a été fondé par deux frères dozos. C’est au cours d’une expédition de chasse qu’ils ont découvert cet endroit verdoyant avec des cours d’eau intarissables encastrés au milieu de collines imprenables ; ce qui représentait pour eux une garantie de sécurité.

L’un d’eux s’écria alors en ces termes : « Et si on restait là ? » ; ce qui signifie en langue Siamou « Tin », qui est resté le nom du village. Notre culture est fortement marquée par la culture dozo, qui a pu résister à la pénétration de l’islam, bien après. Nos funérailles et nos manifestations les plus importantes qui se rapportent à notre relation avec l’environnement sont toujours d’inspiration dozo.

Cela suffit-il à faire de vous un Dozo quand on sait que, généralement, l’influence familiale a toujours été déterminante dans la pratique de la culture dozo ?

• Dans l’univers du Dozo, la nature et l’environnement tiennent une place importante. La carrière professionnelle de mon père a été inspirée par cette culture. Il intégra très rapidement le corps des eaux et forêts, où il consacra toute sa carrière à la protection de l’environnement comme contrôleur.

Il fut également directeur de l’école forestière de Dindéresso. Ma proximité avec lui m’a fortement inspiré. Je suis un passionné de la nature, que j’ai découverte au cours de nos nombreuses parties de chasse en brousse. Ma maison que j’ai construite à Ouaga est une reproduction du concept de mon village. On y trouve de l’eau et de nombreuses plantes que je suis allé chercher spécialement au village. C’est pour toutes ces raisons que j’ai accepté de parrainer la nuit des Dozos.

Que représente pour vous les Dozos ? On met souvent en avant le côté mystique. Qu’en pensez- vous ?

• Les Dozos sont considérés de façon réductrice comme des sorciers dont il faut se méfier. C’est vrai que les Dozos ont des pouvoirs spéciaux. Mais ces pouvoirs ont pour base les savoirs accumulés à travers des relations intenses avec la nature.

Des gens qui pratiquent la nature en tout temps pendant des milliers d’heures finissent par la comprendre, ne serait ce que par effet d’observation des phénomènes inaccessibles à ceux qui n’ont pas cette relation intense avec la nature. Le savoir est la source la plus forte du pouvoir. Le pouvoir des Dozos est le pouvoir du savoir.

Mais c’est vrai que le folklore qui entoure les démonstrations des Dozos a créé une dimension mystificatrice qui est disproportionnellement grossie. La science a pour but de comprendre les lois qui gouvernent la nature et de mettre cette compréhension au service de l’humanité.

A l’échelle locale, les Dozos sont au cœur de cette logique. Les vertus médicinales de certaines plantes ont été découvertes par les Dozos et leur apport dans la santé des populations est incontestable.

Vous parrainez une nuit dozo. N’est pas une lourde charge pour vous ?

• C’est un réel bonheur de mettre mon leadership au service des Dozos. Ce parrainage ne sera pas un simple coup de fusil médiatique. J’ai une importante proposition à faire au ministre de la Culture, du Tourisme et de la Communication. Je propose l’institutionnalisation du festival des Dozos et des cultures d’Afrique (FIDOZO) à Bobo, aux côtés du Fespaco, du SIAO, et de la SNC. Cela permettra d’accroître le leadership culturel de notre pays.

Des cultures africaines voisines aux Dozos pourraient se donner en partage à l’Afrique ici à Bobo. Le but de ce festival sera de révéler au-delà des Dozos d’autres phénomènes culturels qui restent largement inconnus.

Propos receullis par JAK

L’Observateur Paalga

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