LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “La prudence et l’amour ne sont pas faits l’un pour l’autre : à mesure que l’amour croit, la prudence diminue. ” François de La Rochefoucauld

ABSENTÉISME, DÉMOTIVATION, BAS SALAIRES... : La Fonction publique a-t-elle un avenir ?

Publié le vendredi 14 novembre 2008 à 04h37min

PARTAGER :                          

L’exactitude est la vertu des rois. Cet adage, chacun de nous l’a dit ou entendu après un retard constaté dans le démarrage d’une manifestation parce qu’une personnalité se fait attendre. Au Burkina, l’exactitude est une exception, le retard est devenu la règle. Combien de fois nous sommes allés dans un bureau à la recherche d’un responsable pour nous entendre invariablement dire que le responsable en question n’est pas encore arrivé. Il est absent de son bureau. Ce n’est pas la première fois que nous abordons dans nos colonnes la question de la Fonction publique burkinabè.

Ce ne sera sans doute pas la dernière fois non plus, tant l’absentéisme généralisé qui y a cours, la démotivation qui gagne davantage le plus grand nombre des agents à cause des conditions matérielles objectives qui leur sont faites, les bas salaires qui sont le lot de la plupart de ces agents, sont criards. Comment corriger ces graves dysfonctionnements qui vont à plus longue ou brève échéance handicaper sérieusement l’avenir de notre Fonction publique ? Comment rendre plus productifs les agents de la Fonction publique du Burkina Faso ? Faut-il systématiquement user du bâton ou au contraire chercher à les motiver par des salaires plus décents et des plans de carrière alléchants ? L’absentéisme dans les bureaux et sur les lieux de travail est partout et constamment décrié. Si les justifications données parfois sont acceptables, il y en a qui le sont moins. On s’absente de son bureau parce qu’on a un rendez-vous avec le docteur, pour aller payer une facture à la SONABEL, à l’ONEA, etc.

On est absent de son bureau pour des raisons sociales, par exemple obligation d’assister moralement un parent, un ami, un camarade en détresse. On est absent à cause de la corvée du dépôt des enfants à leur école. A côté de ces raisons qu’on peut qualifier de compréhensibles, il y en a qui ne tiennent pas la route. Des fonctionnaires délaissent leurs bureaux pour aller à la recherche d’un plus pour arrondir les angles, leurs fins de mois qui, malheureusement, mois après mois, année après année, se transforment en triangles, voire en pyramides. Ce type d’absentéisme se voit surtout au niveau de l’enseignement, particulièrement celui du secondaire et au niveau des formations sanitaires. Mais de plus en plus, des techniciens de la Fonction publique optent d’aller monnayer leurs compétences dans le privé où en une journée de travail, ils empochent l’équivalent de ce que leur donne la Fonction publique pour le mois.

La question des bas salaires est générale à tous les agents de la Fonction publique. Ce n’est pas le cas de la démotivation où l’on peut constater qu’un directeur de service gère les missions, les promotions et d’autres avantages qui pourraient intéresser ceux qu’il a sous ses ordres à son seul profit, ou au profit d’un petit groupe très restreint de "yes sir". L’absentéisme dans la Fonction publique atteint des seuils inquiétants lors des journées dites "journées continues". Dès 10 heures, les bureaux sont déserts. S’il se trouve qu’on a un document à faire établir ou à faire signer par un agent pendant cette période, c’est sage d’attendre que cette période des "journées continues" passe.

Au Burkina, à l’exception des membres du gouvernement qui travaillent tant et si bien que certains d’entre eux blanchissent rapidement et à vue d’oeil, peu de personnes ont la culture du travail et le culte du travail. Or, c’est cette culture et ce culte qui ont permis aux grandes nations de se construire. Les hommes et les femmes dans ces pays aiment le travail. Ils ont l’amour du travail au point de l’ériger en loi, pour ne pas dire en religion. Nous avons posé plus haut la question de savoir comment corriger cet état de fait, car c’est un fait avéré qu’une nation dans laquelle personne ne veut se tuer au travail est une nation en perdition ; il n’y a pas de place pour elle en cette ère de la globalisation. Peut-être qu’il faut fixer à chaque travailleur des objectifs qu’il doit atteindre, ce que les spécialistes de la chose appellent "obligation de résultat" ou encore contrat d’objectifs ? Il semble que c’est ce que le Premier ministre a exigé des membres du gouvernement en remettant à chacun d’eux une feuille de route.

La méthode devrait s’étendre à toute la chaîne de la Fonction publique. Il semble que c’est ce qui est fait maintenant avec la nouvelle notation des agents. Mais l’on doit prendre garde que cette nouvelle façon d’apprécier le travail des fonctionnaires ne soit une porte ouverte pour seulement sanctionner. S’il doit y avoir sanction, il faut qu’à côté on trouve aussi récompense pour ceux et celles qui auront excellé dans l’accomplissement de leurs tâches. Pour un temps légal de huit heures de présence dans les bureaux, il est à se demander si les fonctionnaires burkinabè en totalisent pleinement quatre. On dira que c’est l’environnement global de pourriture morale qui justifie cette situation. Il revient aux pouvoirs publics de réfléchir pour trouver une solution pour maintenir les travailleurs sur leurs lieux de travail, mais une solution qui ne passe pas uniquement par la trique. Il faut motiver, persuader, intéresser, et non contraindre à tout prix. Ainsi, on aura la chance de pouvoir instaurer la culture et le culte du travail dans notre Fonction publique.

Le Fou

Le Pays

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina Faso : Combien y a-t-il de langues ?
Burkina : Et le travail populaire ?