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TRAFIC DE DROGUE EN AFRIQUE DE L’OUEST : Dure, dure sera la lutte

Publié le jeudi 30 octobre 2008 à 02h45min

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C’est mardi dernier qu’a pris fin à Praia, le sommet organisé par la CEDEAO sur le trafic de la drogue. C’est une première. Ce genre de trafic n’a jamais été une préoccupation de premier plan dans les Etats de la région où les priorités sont légion.

Et puis, il en est de la drogue comme de bien des maux : les Africains ont eu tendance d’abord à penser qu’il s’agissait d’un mal purement occidental, jusqu’à ce que le développement du phénomène, sous la pression d’événements divers, oblige les citoyens et les gouvernements à se rendre à l’évidence. Chacun sait aujourd’hui que la drogue est un fléau pour l’Afrique, notamment l’Afrique de l’Ouest. Et que ce fléau gagne du terrain, à la fois du point de vue du trafic, que du point de vue de la consommation. Il y a quelques années, les pays occidentaux, et principalement les Etats-Unis, ont déclaré la guerre au trafic de drogue. Les Américains, plus ou moins en accord avec des gouvernements d’Amérique du Sud, ont même engagé la lutte contre les narcotrafiquants dans leurs pays. Les Etats européens se sont armés pour cette lutte qui est menée contre des hommes et des clans riches et puissants.

Il était clair, à partir de ce moment, que les narcotrafiquants, avec leurs moyens colossaux, allaient trouver le moyen de contourner les dispositifs occidentaux, et défendre leurs intérêts qui sont immenses. Et comme cela, hélas, est souvent le cas, c’est vers l’Afrique qu’ils se sont tournés. L’Afrique occidentale, par sa position géographique, était le point de passage indiqué pour atteindre le marché juteux de l’Europe de l’Ouest. Et c’est ainsi qu’en moins de deux ans, cette région est devenue la plaque tournante de cet inquiétant trafic. On peut avoir tendance à penser que les Africains ne doivent pas s’agiter autour de cette question, puisque leur continent est seulement une terre de transit.

Ce serait une erreur que de céder à une telle vision. En effet, la drogue ne fait pas que passer. Les narcotrafiquants profitent toujours de l’occasion pour s’ouvrir de nouveaux marchés, même si ceux-ci ne peuvent pas rivaliser avec les marchés européens. Il arrive même que les intermédiaires locaux, soient payés, en partie, en nature. Et cette drogue alimente les marchés nationaux. Or, le développement de la consommation de drogues en tous genres est un phénomène préoccupant. En effet, ce sont des jeunes qui sont frappés dans leur santé et dans leurs capacités à participer au développement de leurs pays. Ce n’est pas pour rien que les Etats occidentaux sonnent la charge.

D’autre part, le trafic de drogue concerne de grosses sommes, de puissants intérêts et des moyens qui ne sont évidemment pas légaux. Il a un pouvoir de développement de la corruption. Dans nos pays où les fonctionnaires ont du mal à joindre les deux bouts, les moyens de corruption que les puissances de la drogue peuvent mobiliser font des dégâts considérables. C’est un coup de fouet à la corruption qui, bien entendu, touchera d’autres secteurs de la vie économique, de l’administration et de la politique. Et puis, il s’agit d’un phénomène qui peut concerner la sécurité et la stabilité des Etats.

Qui ne sait que les puissants narcotrafiquants ont les moyens, pour protéger leurs intérêts, de déstabiliser tel ou tel Etat africain ? Mais on voit que la lutte sera particulièrement difficile si le trafic de la drogue implique des personnes qui sont bien placées dans l’administration des pays concernés. On peut même dire que ce sont des complicités au plus haut niveau qui fluidifient au maximum ce trafic qui est de plus en plus l’objet de toutes les préoccupations. Comment les modestes agents de l’Etat peuvent-ils combattre efficacement un fléau quand ceux qui le commanditent sont placés si haut ? De la même manière, l’indigence financière et matérielle dans laquelle les agents travaillent, ne permet pas de faire face au trafic de drogue avec des chances sérieuses de lui porter des coups sévères.

On n’en est que plus admiratif devant le courage et la détermination de tel ou tel acteur de la lutte contre la drogue qui, malgré les difficultés, parvient à enregistrer des résultats. C’est pourquoi, il faut souhaiter un mouvement plus vaste qui dépasse l’organisation sous-régionale pour impliquer l’ensemble des pays africains. De la même façon, il faut souhaiter que l’Europe, qui est la destination de la drogue, aide les Etats africains à mettre en place des structures adéquates. On a vu que, quand ils ont élaboré des stratégies pour lutter contre l’immigration, les Européens se sont adressés à des Etats africains pour mener des actions coordonnées. C’est seulement à ce prix que les efforts des uns et des autres ne seront pas vains.

"Le Pays"

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Vos commentaires

  • Le 30 octobre 2008 à 18:16, par diabalompo En réponse à : TRAFIC DE DROGUE EN AFRIQUE DE L’OUEST : Dure, dure sera la lutte

    Que la lutte soit encouragée, soit ! Mais que le Pays en appelle à une aide européenne, là le bât blesse. Une coordination avec nos gendarmes et policiers, raisonnablement respectueuse des droits de l’homme peut aboutir ; car avec les chiffres probants à l’appui, on sait très bien que les consommateurs des crack, amphét, et j’en passe, sont non Africains.
    Une lutte à l’échelle africaine avec l’aide de l’Europe qui protège d’abord les siens peut enrayer les plans de ces narcos.
    La drogue est un problème structurel, la lutte contre le trafic et la consommation doivent être du même accabit.

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