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Gustave Diasso, Directeur général du tourisme : Bientôt une convention sectorielle pour plus de professionnalisme

Publié le jeudi 25 septembre 2008 à 07h56min

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Gustave Diasso

Au moment où s’ouvre la cinquième édition du SITHO, Gustave Diasso, directeur général du tourisme, dresse un état des lieux fort optimiste du secteur dans notre pays. Si la professionnalisation du secteur demeure l’un des principaux handicaps à corriger, les potentialités et les actions d’accompagnement engagées ces dernières années autorisent des perspectives heureuses pour ce secteur.

Comment se porte le secteur touristique du Burkina aujourd’hui ?

Je dirai que le secteur est entrain de prendre son envol. Nous sommes une jeune destination de tourisme. C’est vraiment depuis quelques années seulement que nous recevons une fréquentation touristique régulièrement croissante. De seulement 142 000 arrivées de touristes non-résidents en 2002, nous avons enregistré 288 000 arrivées en 2007, soit un doublement des arrivées en espace de cinq ans. L’infrastructure hôtelière s’est accrue de façon sensible et notre pays offre aujourd’hui une capacité d’accueil globale de 10 113 places-lits pour un effectif de 293 unités d’hébergement.

Nous sommes véritablement dans une dynamique de croissance de l’industrie touristique dans son ensemble, et cela est, j’allais dire, les résultats des dispositions favorables accordées au secteur par les plus hautes autorités.

Toutefois, nous pensons que les résultats actuels observés sont tout de même en deçà du potentiel offert par la destination.

Le manque de professionnalisation du secteur en Afrique est souvent présenté comme l’une des principales difficultés ; qu’en est-il au Burkina ?

Il est vrai que le secteur est confronté à une pénurie de main d’œuvre qualifiée. Jusqu’à une date récente, il n’avait pas de possibilité de formation, sur place, dans les métiers du tourisme. Ce n’est que depuis quelques années que deux structures de formation diplômante ont été créées.

L’hôtellerie classée emploie aujourd’hui, de façon directe, 2923 personnes dont seulement 5% ont reçu une formation spécialisée dans le domaine.

Mais au-delà des possibilités de formation offertes, l’enjeu de la professionnalisation réside aussi dans les conditions de travail offertes dans le secteur. Les salaires servis sont plus bas que dans d’autres secteurs ce qui fait que le marché du travail n’est pas attractif. Pourtant dans les métiers du tourisme, on travaille souvent à contretemps des rythmes ordinaires. A cela, si on ajoute, la fatigue physique, les contraintes psychologiques dues au déploiement d’efforts de patience, la maîtrise de soi face aux exigences du client et à ses fantaisies et ses reproches, les vexations, on peut trouver que les métiers du tourisme sont peu attrayants et peu valorisants.

Au niveau des employeurs, on peut relever la faiblesse de l’investissement en formation du personnel et plus généralement une grande carence dans la gestion des carrières et du développement du potentiel humain. La mobilité du personnel dans le secteur est très élevée.

Qu’est-ce qui est fait pour résoudre cette difficulté ?

D’abord, on se réjouit que le secteur privé ait pris la mesure l’absence de ressources humaines qualifiées dans le secteur et a commencé à investir dans ce domaine. Par ailleurs, l’Université de Bobo Dioulasso et l’Université de Koudougou s’investissent dans la formation à certains métiers du tourisme.

Toutefois, le ministère compte évaluer toutes ces offres de formation dans le cadre d’une nouvelle structure créée au sein de notre département et qui est le Conservatoire National des Arts et Métiers de la Culture, du Tourisme et de la Communication. Cette évaluation permettra de faire des propositions en cohérence avec la vision imprimée par la politique du tourisme dans notre pays.

Dans le cadre du reclassement des hôtels et établissements assimilés, des indications nous ont été données en vue d’impulser la mise en place d’une convention sectorielle qui permettra d’envisager de meilleures perspectives en termes de conditions de travail et de rémunération dans le secteur.

Les conditions d’accueil qui sont une autre difficulté se sont-elles améliorées avec le nouvel intérêt porté au secteur par les différents acteurs ?

Des progrès ont été enregistrés dans ce domaine, mais comme vous le savez, le concept de l’accueil est vaste dans le domaine du tourisme et intègre tous les acteurs intervenant dans le produit touristique.

Le service offert à l’aéroport à l’arrivée du touriste, la prestation du taximan qui le conduit à son hôtel et celle du bagagiste qui lui apporte ses bagages dans sa chambre etc. sont des séquences du produit qui nécessitent une prestation de qualité en termes d’accueil.

L’enjeu pour nous, c’est d’aller au-delà de l’hospitalité qui a toujours caractérisé le Burkinabè de façon général, pour équiper les différents acteurs en techniques d’accueil et d’animation des touristes.

Le domaine névralgique sur lequel nous travaillons actuellement, c’est la profession de guide de tourisme. Des actions de formation et d’organisation de ce métier interviendront dès le mois prochain.

Quels sont les atouts touristiques du Burkina par rapport à ses voisins ?

Vous savez, notre pays offre un potentiel extraordinaire de développement de ses activités touristiques. Il bénéficie d’une stabilité politique qui est un paramètre décisif dans le choix de voyages par les touristes étrangers, d’une riche diversité culturelle, de sites naturels pittoresques et insolites, d’une faune et d’une flore encore nombreuses et bien protégées.

Au regard des changements qui s’opèrent au niveau de la demande touristique, nous pensons que le Burkina Faso possède tous les atouts pour réussir dans le tourisme : le touriste d’aujourd’hui est un touriste « zappeur », c’est à dire quelqu’un qui cherche à diversifier son expérience, à quitter les pays dont la touristicité est connue de tous, il recherche de nouvelles destinations. Et en tant que nouvelle destination, le Burkina lui offre cette possibilité, lui offre une expérience touristique nouvelle, au contact du naturel, de l’authentique. Cela est un avantage comparatif pour notre pays. Il nous faut surtout travailler à la mise en tourisme de notre patrimoine rural.

Que faut-il faire pour développer le tourisme intérieur ?

D’abord, la sensibilisation. Beaucoup de gens médisent de la touristicité de notre pays, parce qu’ils ont pour repère les formes de tourisme qui ont fait, jadis, la notoriété de l’activité à savoir, le tourisme balnéaire, le tourisme axé sur la visite des monuments etc.

Dans les années 1950 en effet, 90% des touristes internationaux achetait du balnéaire. En 2007, moins de 50% des touristes dans le monde vont à la plage et ceux qui y vont combinent au séjour balnéaire des loisirs culturels.

Lorsque les burkinabè iront à l’assaut de nos différentes localités, ils se rendront compte eux mêmes de la richesse de notre pays. Nous allons chercher très souvent ailleurs ce que nous avons tout juste à côté.

Cela étant dit, nous observons que le produit touristique est cher et qu’il faut des mesures spécifiques en faveur des nationaux. Les périodes de basse saison peuvent être mises à profit pour développer des formules accessibles à la bourse du Burkinabè moyen.

Qui peut investir dans le secteur ?

Tout le monde est invité à investir dans ce secteur. Je l’ai dit tantôt, le tourisme est un secteur d’avenir. Il est en expansion partout dans le monde et notre pays était jusque là en jachère touristique. Le domaine de l’aménagement des sites touristiques, de construction d’infrastructures d’hébergement en milieu rural, de développement d’activités touristiques nouvelles, sont des domaines porteurs.

Et pour tout cela, l’Etat a mis en place un cadre réglementaire des plus favorables et des mesures d’incitation dans le cadre du code des investissements.

Peut-on vivre du tourisme au Burkina aujourd’hui ?

Le secteur emploie déjà un peu plus de 15 000 personnes qui vivent de leur activité. Nous pouvons accroître la rentabilité de nos investissements en s’entourant des garde-fous nécessaires. Mais ce qu’il faut déplorer, c’est que des investissements souvent énormes soient réalisés sans des études sérieuses.
Plusieurs acteurs ont déjà saisi l’opportunité que représente la formidable évolution du tourisme international dans notre pays. On observe dans leurs entreprises, le tourisme est une activité à forte intensité de main d’œuvre, qui a la capacité de créer des emplois pour les pauvres, pour les communautés autochtones, pour les personnes sans grande qualification (les guides, les interprètes, les pisteurs, les tenanciers de petits commerces, le personnel divers des réceptifs au niveau local etc.) dans les zones rurales souvent isolées.

Cyriaque Paré
Lefaso.net

P.-S.

Lire aussi notre dossier :
SITHO 2008

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