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Manifestations estudiantines : Non à cette police des médias !

Publié le lundi 15 septembre 2008 à 13h27min

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S’il fallait décerner le premier prix de la déclaration la plus consternante de la semaine qui vient de s’écouler, c’est certainement à ce fameux comité d’accueil d’étudiants qu’il irait. Jugez-en vous-même : "De quel organe êtes-vous ? O.K., vous, ça va, vous pouvez passer. On ne veut pas de journalistes fantoches ici".

La question ci-dessus, a été posée lundi 8 septembre 2008 à notre équipe de reportage par un groupe d’étudiants, à l’entrée du centre national d’information, de l’orientation scolaire et professionnelle et des bourses (CIOSPB).

Quelle intolérance ! A l’intérieur, pendant ce temps, le personnel de l’institution, assiégé, était retenu en otage par des boursiers en signe de protestation contre un arrêté ministériel qui n’autorise à leur verser qu’un mois et demi « d’arriéré de pécule » contre trois réclamés par les manifestants (lire l’Observateur paalga du mardi 9 septembre 2008). "O.K. Vous ça va, vous pouvez passer". Faut-il s’enorgueillir de cette prétendue marque d’honorabilité journalistique manifestée à notre égard ? Non, non et non !

De cette détestable opération de filtrage des médias les pensionnaires de Zogona sont coutumiers. En effet, il n’y a pas longtemps, lors des échauffourées qui ont opposé des étudiants aux forces de sécurité le 17 juin dernier 2008, notre reporter du jour a eu maille à partir avec un groupe de zélateurs frénétiques de l’ANEB, qui lui avaient, dans un premier temps, interdit tout reportage sur la manif.

Le 1er septembre 2008, jour de la réouverture de l’université, c’était un autre confrère qui s’était résigné à guetter le retour des autres journalistes pour recueillir l’information, l’organe auquel il appartient étant fiché sur la liste noire de ces nostalgiques de la pensée unique. Etiquetés fantoches, le pauvre scribouillard et ses congénères de rédaction sont donc, depuis, frappés de disgrâce.

Il faut le souligner, s’il est un péril, parmi tant d’autres, qui menace la liberté de la presse dans notre pays, c’est bien cette perception manichéenne du paysage médiatique.

Ici, au Faso, où chacun voit midi à sa porte, selon qu’on est du pouvoir ou de l’opposition, selon qu’on est une organisation proche de l’un ou de l’autre, ou supposée comme telle, on a ses héros et ses zéros de la presse, ses beaux et ses vilains petits canards. En un mot comme en mille, ses bons et ses méchants. Et encore que, pour une simple phrase qui n’a pas l’heur de plaire à nos vigiles, les bons d’aujourd’hui puissent se retrouver condamnés à la roche Tarpéienne, et les méchants d’hier, élevés sur un piédestal.

Le journalisme n’a pas été inventé pour plaire à qui que ce soit. Il a ses règles, qui codifient sa pratique. On peut ne pas être d’accord avec un article de presse. Dans ce cas, c’est connu, en tout cas de nos sermonnaires de tout acabit, qu’il est prévu des voies et moyens pour dire ses vérités. Le droit de réponse et le droit de réplique sont autant de recours légaux pour faire pièce aux journalistes fantoches. Il en est de même pour la saisine des tribunaux.

Procéder autrement, comme, par exemple, s’ériger en police des médias, constitue une entorse grave à la libre circulation de l’information. Là où prospère l’intolérance, s’éclipse toute forme de liberté. Souvenons-nous de l’affreuse date du 10 juin 1984. Ça ne vous dit rien ? Mais, bien sûr, la date de l’incendie, criminel, de notre journal.

Alain Saint Robespierre

L’Observateur

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