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Démocratie et développement : Effet de mode ?

Publié le mardi 16 septembre 2008 à 19h28min

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La thématique du forum qui vient de se tenir à Ouagadougou et qui était "Média et développement", nous semble sinon réductrice, à tout le moins peu à même de cerner les vrais enjeux de l’heure que l’on doit poser en terme de démocratie et développement.
Démocratie et développement si tant est qu’à l’analyse, force est de reconnaître qu’en dépit des avancées constatées ces dernières années, l’Afrique et ses médias avec, traîne toujours son spleen sur le chemin du développement.

Du coup on en arrive à la conclusion que la démocratie telle que nous l’expérimentons et telle que les médias la relatent, n’est pas celle qui nous permettrait de sortir du trou. Des démocraties qui font fi de notre substrat culturel pour emprunter des schémas importés et perpétuer ainsi le cycle de la malédiction. Pour prendre un exemple qui a fait couler beaucoup de sang récemment sur le continent, l’alternance dont on parle tant dans nos médias et dans les sphères politiques, est-elle un héritage culturel africain. A l’analyse rétrospective de notre histoire, force est de dire "non" et de convenir que cette absence d’alternance ne signifiait pas pour autant existence de systèmes politiques dictatoriaux dans l’Afrique précoloniale.

Comme le dit l’adage, dans le royaume moaga par exemple, "le souverain règne, mais ne gouverne pas". Il n’est donc pas un monarque absolu comme l’Europe médiévale nous a donné de voir, (au point que les révolutionnaires français ont coupé la tête de leur roi) mais, un "primus inter pares", conseillé et contrôlé par une cour agilante et intransigeante sur la coutume. C’est sur ces véritables démocraties constitutionnelles que les colons sont venus greffer leur mode de pensée et de gouverner avec de nombreux problèmes à la clé. Que les descendants de ces royautés éclairées en soient aujourd’hui à être traités de monarques des temps modernes prouve à quel point la greffe à du mal à prendre et ouvre la voie à la prospective pour tous ceux qui veulent vaincre ce misérabilisme. Il faut revenir à nos valeurs y compris dans la gestion du pouvoir exécutif pour éviter les heurts qui ne cessent d’ensanglanter le continent en le retardant dans le cadre du développement.

Il y a lieu de se poser des questions existentielles (qui sommes-nous ?, où voulons-nous aller et comment ?) plutôt que de perdre son énergie en s’arc-boutant à des concepts qui nous sont étrangers et en voulant entretenir un partenariat factice avec ceux qui sont la cause de notre "déboussolement". Cette solidarité que nous appelons de tous nos vœux avec l’Europe, risque hélas de perpétuer ce biais culturel et les dérives qui vont avec. La solidarité ne peut, en effet être effective que si les deux partenaires traitent d’égal à égal au plan économique. Ce n’est pas le cas, et, n’en déplaise à toutes les sommités qui ont fait le déplacement de Ouagadougou, les stéréotypes et les clichés continueront à être véhiculés de plus belle. On a feint d’oublier que les médias sont, en effet, au service d’une idéologie qui a réservé au Noir la place qui est la sienne actuellement.

Pour en revenir au thème du forum, disons qu’avant de parler du rôle des médias dans la promotion du développement, il importe de parler d’abord de la situation de précarité dans laquelle travaillent et vivent les journalistes. Pour que les idées vivent, il faut que l’esprit soit débarrassé des contraintes bassement matérielles ce qui est loin d’être le cas. On a donc des mercenaires de la plume et du micro plus préoccupés par leurs problèmes que ceux de leurs pays ou du continent. Pour tout dire, la rencontre de Ouagadougou a déblayé le terrain, mais, ses initiateurs doivent tout faire pour qu’elle ne s’apparente pas à un effet de mode. Ou à un exutoire.

Boubakar SY (magnansy@yahoo.fr)

Sidwaya

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