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Cimetières : A entretenir comme nos belles maisons

Publié le jeudi 11 septembre 2008 à 09h23min

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Dans cette tribune notre confrère Modeste Yaméogo, chef traditionnel d’Issouka revient sur la gestion de cimetières. S’inspirant des expériences d’autres pays du monde, il nous invite à entretenir ces dernières demeures comme nous le faisons avec nos belles maisons.

Je lis dans les colonnes de l’Observateur Paalga du N° 7211 du Jeudi 04 septembre 2008 en sa page 9 l’article d’un résident des abords du cimetière de Zogona. En parcourant son écrit je revois le vieux problème de l’entretien de nos cimetières dans la ville et dans tout le pays évoqué, posé plusieurs fois par certains écrits dans les colonnes de nos quotidiens ou hebdomadaires. Beaucoup de confrères et de citoyens ont à moult fois interpellé nos autorités sur cette question d’honneur et de dignité à réserver à toutes celles et à tous ceux qui nous ont quittés et que nous pleurons toujours et conservons dans nos mémoires.

Nous devons bien reposer ce problème sur le tapis. C’est dommage que du reste depuis les différentes campagnes politiques que le pays a connu, aucun candidat ni aucun parti n’a posé le problème de nos dernières demeures de manière claire. Encore moins faisant parti d’un programme d’action. Pourtant, nous parlons tous de lotissement de manière régulière, nous accusons nos maires de ci et de ça en la matière. Les plus nantis n’ont de penser que d’occuper des espaces de tant et tant de m2 pour y ériger des bâtisses bien futuristes dans des quartiers des fois décriés par leur luxe. Nous comptons avec fierté nos nombre de parcelles et de maisons comme pour dire que nous avons garantis notre avenir et même des fois celui de nos enfants. Quoi du reste de plus légitime ? Mais il nous arrive très rarement de parler avec fierté de notre future et éternelle parcelle ou encore de l’état des tombes de nos parents qui sont en piteux état dans des cimetières devenus aujourd’hui peut être des poubelles.

Depuis nos aïeux, les morts ont été souvent respectés à travers leur demeure. Les morts étaient enterrés soit dans leur familles directes pour les garder près de soit afin qu’ils veillent sur les vivants soit dans des cimetières de famille du village ou du quartier. On ne déposait jamais des ordures sur ou à coté d’une tombe. Comme beaucoup intégraient les morts dans leur vie, des tombes étaient creusées dans des cases pour les plus vieux et chef de tribu tel les évêques et les papes dans leur cathédrale, ou encore pour les autres dans la concession et l’on se couchait dessus pendant les temps de forte chaleur.

Aujourd’hui nous semblons avoir oublié par moment que nous ne sommes pas éternels sur cette grande et belle terre. Quel que soit notre statut, quelque soit notre puissance, politique, économique etc., la seule chose la mieux partagée par tous les vivants est bien la mort. Que de personnes avec ces titres et ces auréoles que le monde c’est bien nous en donner, repose aujourd’hui malheureusement au milieu des fougères et des ronces de nos cimetières bien abandonnés. Nous avons peur de retourner au cimetière pour dire bonjour à un être cher disparu car là nous attendent serpents, personnes mal intentionnées et bien sûr, des odeurs nauséabondes car les poubelles sont bien voisines des tombes de nos morts…

Beaucoup d’entre nous ont voyagé et on dit que le voyage enrichit. Pourquoi restons nous toujours pauvre dans ce domaine après des séjours de longues études hors du pays pour ne revenir qu’avec seulement des diplômes qui enrichissent nos cursus et nos différents curriculums en laissant pourtant nos esprits pauvres. Au-delà des diplômes il y a aussi la manière de vivre et surtout de respecter la demeure des morts de ces pays d’accueil. Pourquoi nous n’arrivons pas à nous inspirer de ces bonnes manières d’ailleurs ? Tout près de nous, dans les pays de la côte, nous avons pu voir de beaux cimetières, bien entretenus. Un peu plus loin, ceux qui ont pu atteindre l’Europe ont pu visiter des cimetières comme celui du Père-Lachaise à Paris pour ne parler que de la France. Ce cimetière est tellement bien entretenu que des artistes y vont même pour tourner des films. Ici plus près de nous, faisons un petit tour juste dans la cour qui jouxte le centre culturel français pour visiter le cimetière des citoyens de ce pays morts ici et qui reposent pour toujours sur notre terre. Même sur les murs arrière de clôture on peut lire cet écrit « interdit d’uriner »

Et les tombes sont toujours reblanchies à chaque fête des morts en novembre. Essayons un peu de faire comme eux, nous qui parlons bien leur langue, nous habillons comme eux mangeons et buvons comme eux si souvent.

Ceux qui ont visité les Etats-Unis et qui sont passés par le cimetière national d’Arlington, situé à Arlington en Virginie, exactement en face de Washington D.C, de l’autre coté du fleuve Potomac à coté des bâtiments du Pentagone, ont pu être émerveillés par l’ordre, la discipline et le grand respect pour les citoyens qui y vivent ou que dis-je qui y reposent. Le drapeau américain est planté au coté de chaque tombe. A l’occasion, pour ceux qui envisagent d’effectuer un voyage, passez visiter la tombe du Président KENNEDY avec sa flamme éternelle. Devant une telle organisation, l’on n’a plus peur de la mort ; on se dit seulement que c’est une étape comme la vie. Allons ! vaillants burkinabé, nous pouvons nous aussi nous organiser en :

1. Poursuivant ce que j’ai pu voir dans un cimetière de la ville. Bien parcelle. L’espace doit être vendu à chacun selon sa catégorie bien sur. Cet argent permettra aux différents maires de recruter des gardiens et des guides qui devront être formés pour le besoin. Il doit y avoir aussi un espace pour les plus démunis dont l’entretien des tombes doit être pris en charge par l’Etat.

2. Encourageant la construction de caveaux familiaux qui devraient être non pas de caves de voleurs et de drogués mais qui seront proprement entretenus. Nous constatons avec peines des caveaux au sein du cimetière municipales dans des états piteux.

3. Mettant de l’éclairage dans les cimetières pour aider les gardiens et les visiteurs et exiger que chaque famille puisse entretenir la tombe de son parent.

4. Etablissant en somme un cahier de charge pour chaque cimetière avec des impôts et des taxes bien étudiés certainement. Et j’en passe. D’autres auront des idées plus lumineuses à proposer. Evitons toutefois de créer des sociétés privées qui juste verront que de l’argent à engrangé.

5. Créant enfin ou plus précisément en redynamisant des structures comme les pompes funèbres car elles sont et doivent être avant tout les premières à qui nous pouvons aussi nous adresser lorsque nous perdons un parent.

Tout cela aura pour avantage que nos dernières demeures seront bien entretenues à l’image de nos quartiers chics. C’est un quartier qui doit être plus chic car nous y reposerons pour l’éternité. Aussi cela évitera que les uns et les autres cessent d’enterrer dans les concessions de la ville avec tous les désagréments et les risques que cela présente. Pensons à ceux qui étaient enterrés au sein du projet ZAKA. Que sont devenus les corps dérangés après tant d’années de repos ? Les morts doivent reposer au milieu des morts comme les vivants partagent le même quartier, le même secteur. Alors ainsi après les pleurs et les rites funéraires, nous pourront continuer à nous consoler en allant des fois dire bonjour à celles et ceux qui avaient partagé nos vies.

Rêvons de voir nos cimetières propres, rangés, éclairés. Reconnaissons qu’un cimetière propre et une tombe propre respectent d’abord les vivants que nous sommes. Combien d’entre nous avons pensé de notre vivant déjà à comment nous voulons être enterré, la position de la tombe, l’endroit même de manière précise. C’est pourtant notre unique parcelle pour l’éternité.

Nous avons comme une peur bleue d’y penser et surtout de prendre des dispositions cela permettra à tout le monde de nous respecter quand nous allons mourir parce que nous avons bien préparé l’après nous. Non pas seulement en établissant un testament qui définit à qui de nos héritiers reviendront nos biens que nous avons tant accumulés des fois du reste de manière honnête et en travaillant dur, mais surtout en préparant une tombe ?

Avons-nous oublié les Egyptiens avec leurs tombes si légendaires depuis la nuit des temps, à telle enseigne, qu’aujourd’hui, l’Egypte est une des destinations la plus prisée et la plus visitée de la planète avec plusieurs monuments dont les fameux tombeaux des pharaons appelés ‘’ la vallée des rois’’ où reposent les corps des rois morts depuis des siècles. Sans en arriver là, acceptons de bouger dans ce sens et nous pouvons chacun à son niveau.

Comme l’auteur de l’article qui a suscité cette réflexion, ne désespérons pas de nous, croyons en nous mêmes et croyons en notre capacité de montrer aussi au monde comme nous savons si bien le faire dans beaucoup de domaines, que nous pouvons respecter nos morts et les endroits où ils se reposent en nous attendant.

A ce titre, commençons par bien nettoyer les abords du cimetière de Dagnoen, ainsi que des autres cimetières de la ville et du pays. Que les tombes de nos parents soient entretenues comme nos belles maisons. Appel à tous.

Naaba Saaga 1er d’Issouka
Saaga1er@gmail.com

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