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Intégration raciale : L’Amérique sera jugée à l’aune de la présidentielle

Publié le vendredi 22 août 2008 à 11h58min

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La course à la présidentielle américaine n’est jamais gagnée à l’avance. Jusqu’au bout, elle tient en haleine les électeurs, avec son suspense qui ne prendra fin qu’avec le résultat des urnes. L’élection présidentielle de 2008 est dans la lignée des luttes épiques que se livrent les candidats, depuis les primaires au sein de leur parti, jusqu’à la campagne électorale.

C’est le propre de la démocratie américaine, que d’effectuer un écrémage, pour proposer au choix des électeurs les meilleurs candidats. Cette année, le Parti démocrate a réalisé une révolution sociale et politique en élisant un Noir comme son porte-drapeau à l’élection, en la personne de Barack Obama. Tout a été dit sur les qualités de l’homme, qui lui donnent une carrure d’homme d’Etat capable de diriger la première puissance du monde.

Le courage des démocrates, qui ont su dépasser les clivages raciaux pour choisir celui qu’ils estiment être leur meilleur représentant, fut salué à travers le monde comme la preuve de la vitalité démocratique de l’Amérique. Barack Obama est donc le premier Noir à atteindre cette étape d’un processus électoral aux Etats-Unis.

Les démocraties ont fait leur révolution, mais les Américains sont-ils prêts à accepter qu’il franchisse le palier ultime, à savoir accéder à la Maison blanche ? L’investiture pour la présidentielle n’est-elle pas la dernière concession que l’on peut faire à un candidat noir ? Apparemment, pour certains Américains, le prisme par lequel il faut juger Obama, ce n’est pas celui de ses qualités intrinsèques mais plutôt de la couleur de sa peau. Dans cette Amérique aussi vaste qu’un continent et charriant toujours des valeurs très conservatrices, l’idée même d’un candidat noir à la magistrature suprême rébute certains. Et encore que dans son cas, Obama n’est pas un Noir bon teint. C’est un métis, c’est-à-dire le fruit d’un mariage entre deux races.

Les récents sondages défavorables au candidat démocrate sonnent comme la fin d’une période euphorique où tous les rêves étaient permis.

Le temps est désormais à une organisation encore plus efficiente des stratégies de campagne, qui ne laisse pas la place à la moindre erreur. Car il faut le dire, si le camp Obama tente de respecter les bonnes manières, tel ne semble pas être le camp de son adversaire, toujours en position d’attaque. La moindre faille est exploitée, pour nuire à Obama. Dans cette course effrénée aux coups bas, où la morale politique est vidée de son sens, la manipulation devient un instrument de prédilection. John Mc Cain, parce qu’il part avec bien des insuffisances, ne peut qu’attaquer à outrance son rival.

De plus, il n’a rien à perdre dans une telle entreprise, car il joue sa dernière carte. Obama a le handicap, sinon le complexe de la couleur, et ne peut donc pas tout se permettre. Il ruinerait tout le travail de préparation des esprits qu’il fait depuis son engagement en politique, pour montrer que tout Américain a droit au mérite. Cela passe par un comportement exemplaire. Mais face à un adversaire qui ne vous épargne aucun coup, qui déploie tous les moyens (peut-être même déloyaux), pour vous battre, que faire ? Continuer dans la posture de l’encaisseur et du pédagogue, ou répliquer avec la même agressivité en utilisant les mêmes armes ?

Le dilemme doit être grand dans le camp démocrate, à l’heure où les sondages s’en mêlent et risquent d’influencer les électeurs. Même s’il s’agit d’un instantané de l’opinion, les sondages sont à prendre au sérieux dans les démocraties occidentales. Très rarement, ils se trompent, car tout en étant le reflet d’une opinion à un moment donné, ils sont aussi des éléments de décision pour les électeurs hésitants. Ils sont de ce fait des outils de campagne efficaces, s’ils sont bien utilisés. Dans le même temps, la portée des sondages est à relativiser dans un pays aussi puritain que les Etats-Unis. Le moindre faux pas , en matière de moeurs surtout, peut vous plonger dans les abîmes des intentions de vote.

Toujours est-il que la campagne électorale américaine est à son tournant. Obama, qui détenait jusque-là la palme de la sympathie auprès des Américains, doit recadrer sa stratégie pour reconquérir l’opinion.

Mais au-delà du candidat démocrate, qui a tout fait pour montrer que l’Amérique a changé, il appartient aux Américains eux-mêmes de le prouver. Et c’est à l’aune de leur vote qu’ils seront jugés. Vont-ils rompre avec la saga des Bush dont Mc Cain perpétue la politique, ou éliront-ils tout de même le candidat républicain par défaut, juste pour ne pas voir un Noir à la Maison blanche ? Cette élection présidentielle dépasse le simple cadre de l’exercice normal de la démocratie. Elle a un enjeu d’ordre civilisationnel, celui de la capacité d’une nation à tourner la page de plusieurs siècles de préjugés raciaux.

"Le Pays"

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