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Luttes hégémoniques dans le Caucase : Menace pour la paix mondiale

Publié le mardi 19 août 2008 à 11h57min

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On assiste depuis quelques jours à une immense mise en branle de la diplomatie internationale dans le but d’obtenir le retrait des troupes russes d’Ossétie du sud ; retrait qui, en principe, devrait débuter hier. Mais à l’allure où vont les choses, et considérant les derniers développements de cette guerre, on peut sans doute affirmer que les événements prochains peuvent ne pas se dérouler dans l’exacte prévision planifiée par les différents accords et autres langages diplomatiques des uns et des autres.

Et on peut légitimement craindre que l’escalade affichée par les Occidentaux et par les Russes ne prenne vraiment fin dans l’immédiat. Il y a bien sûr le secrétaire à la Défense américain qui a exclu le recours à une intervention militaire américaine dans le conflit russo-géorgien ; et cela est sans doute encourageant ; mais le même Robert Gates ajoutait que les relations américano-russes risquaient d’être sévèrement affectées si toutefois Moscou ne changeait pas d’attitude. Et là est toute la question : que signifie ce message diplomatique à peine codé ?

Une autre inconnue de taille se trouve dans l’attitude de l’Iran qui, par le lancement réussi d’un "satellite d’essai", s’invite à dessein et par la force des choses, au débat. Cette prouesse technologique développée par un pays "voyou" aux yeux des Américains, ne peut que susciter des inquiétudes, dans le contexte actuel, du côté de la Maison Blanche, qui ne manquera pas de se poser de nouvelles questions à propos des intentions de l’Iran. Tébéran a-t-elle oui ou non une volonté manifeste de souffler sur le feu ?

Toute crise, si elle est mal gérée, peut dégénérer ; et celle-ci encore plus si l’on tient compte du contexte dans lequel elle se passe, ainsi que des acteurs en présence.

Ce n’est un secret pour personne, Occidentaux et Russes jouent à se faire peur. Et cela depuis un certain temps déjà. De part et d’autre, on cherche à marquer des points, à ébranler psychologiquement l’adversaire et nul n’ignore les conséquences apocalyptiques qu’un affrontement entre les deux camps pourrait provoquer. Il est vrai qu’ils l’évitent au maximum et choisissent de le faire par alliés et protégés interposés. Le fait n’est pas nouveau ; ce qui se passe à l’heure actuelle dans le Caucase est bien le résultat de vieilles rivalités qui ont toujours opposé les deux blocs : l’Est et l’Ouest.

L’Occident avait applaudi des deux mains l’implosion de l’Union soviétique. Et comme pour précipiter encore plus la déchéance du bloc soviétique, sont nées un certain nombre d’initiatives visant à la récupération par petites touches de l’ensemble des pays jadis satellites de l’Union soviétique, par le bloc occidental. Toutes choses qui n’étaient pas pour plaire à la Russie désormais presque solitaire. On se rappelle ce qui se passa dans les Balkans ; et les interventions américaines avec l’appui de leurs alliés en Irak, en Afghanistan, sans oublier l’Ukraine qui, à force de pressions, finit par tomber dans l’escarcelle occidentale.

On peut le dire, la Russie tient désormais sa guerre, et son intention s’affichait avec on ne peut plus de clarté : trop c’est trop, il n’est plus question de se laisser faire. Avec une bonne dose de raison, il faut l’avouer : la première opération militaire de ce conflit a été lancée dans la province indépendantiste d’Ossétie du Sud par les troupes géorgiennes. C’est elle qui a mis le feu aux poudres et provoqué la massive riposte russe qui a fait basculer la région dans la tourmente.

C’est visible, des accords ont été signés, et la Russie a donné son accord de principe quant au retrait de ses troupes. Mais les nuages ne semblent pas dissipés si l’on considère les propos de la chancelière allemande Angela Merkel, qui visent à aider la Géorgie à adhérer à l’Otan. Du reste, les Géorgiens y tiendront-ils vraiment ?

Dernier fait et pas le moindre, le projet américain de bouclier antimissile visant à protéger les Etats-Unis d’éventuelles attaques de pays tels que l’Iran et la Corée du Nord. La Russie n’a d’ailleurs pas caché son irritation, qui trouve qu’en abritant les éléments du bouclier américain, la Pologne "s’expose à être frappée".

Dans ce contexte, à quand la fin de l’escalade ? La diplomatie ainsi que les relations internationales sont loin d’être des sciences exactes ; c’est bien la raison pour laquelle interrogations et inquiétudes subsistent quant à l’issue de ce conflit et partant la sécurité de notre planète entière. La Russie quittera-t-elle la Géorgie ? Si oui, quand ? Si non, qu’aurons-nous à la place ? Les différents accords signés sont-ils suffisants pour faire cesser la guerre et instaurer une paix durable dans la région ?

Toujours est-il que le réalisme commande de voir que tous les protagonistes de cette guerre, de quelque bord qu’ils soient, ont intérêt à calmer le jeu. Et pour des raisons évidentes : nul ne saurait crier victoire à l’issue d’une confrontation militaire entre pays de cette importance militaire, car il risque de n’y avoir personne pour crier, tout simplement.

Elles sont bien loin les guerres de 14-18 et de 39-45 ; et l’armement d’antan paraît aujourd’hui largement dépassé, au regard de ce dont disposent les puissances militaires à l’heure actuelle.

Que les Etats-Unis soient une super-puissance militaire, personne ne le conteste ; mais ce n’est pas pour cette raison qu’une Russie, même diminuée, a perdu tout cet arsenal militaire qui faisait d’elle une autre super-puissance, il y a seulement quelques années. On serait même tenté de se dire le contraire si l’on se rend compte avec quelle parcimonie le pays des Soviets fait généralement étalage de sa capacité militaire. On aurait peut-être tort d’affirmer de manière péremptoire qu’elle a peur d’en découdre avec qui que ce soi. La présence de Poutine, un faucon parmi les faucons, Premier ministre bien installé, au sein du système du gouvernement russe, devrait faire réfléchir plus d’un parmi ceux qui seraient tentés de penser qu’il suffit de hausser le ton pour que Moscou se taise et se range.

A quelques mois de l’élection présidentielle américaine de novembre, force est de constater que les deux mandats de George Walker Bush n’ont pas été ceux où la paix aura le plus régné sur notre planète. Avons-nous mandat pour distribuer bons ou mauvais points ? Peut-être pas. Mais nous avons par contre le droit de nous demander, à l’heure où il est sur le point de passer le témoin, quel héritage il lègue à celui qui le remplace et qui devra présider aux destinées de cette grande puissance militaire. Il nous faut se poser cette question, car, elle concerne la destinée des six milliards d’êtres humains qui, aujourd’hui, peuplent la terre.

"Le Pays"

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