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Littérature burkinabè : Aimé Désiré Héma, un gendarme écrivain

Publié le lundi 25 août 2008 à 13h33min

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Aimé Désiré Héma

Rien ne le prédestinait à être gendarme, pourtant il l’est avec le grade d’adjudant chef mais sans une réelle vocation. Aimé Désiré Héma qu’il s’appelle, la quarantaine bien sonnée, est un intellectuel bardé de diplômes et un littéraire dans l’âme. Zoom sur un écrivain burkinabè qui n’est pas moins atypique : un pandore habité par les dieux de l’écriture.

Pour quiconque rencontre Aimé Désiré Héma, il serait tenté de lui poser cette question : “Mais diable qu’est-ce que tu fous dans la gendarmerie ? ”. L’intéressé, surnommé “La marine ” par ses intimes, ne dit-il pas lui-même que “le corps de la gendarmerie qu’il a intégré en 1983 n’est pas une vocation, mais un simple fait du hasard ”. M. Héma n’est pas à vrai dire un gendarme dans l’âme mais plutôt un intellectuel, un homme épris de littérature. “Ma passion pour la littérature remonte au lycée Philippe Zinda Kaboré où étant élève, j’ai commencé à écrire des poèmes et des nouvelles. Je suis dans la littérature avant d’être gendarme. J’y suis pour partager des messages sur des problèmes sociaux contemporains avec les gens et non pour faire fortune. Je ne vis pas de ça ”, raconte-t-il, paré de sa tenue bleue de gendarme. L’air toujours serein et imperturbable, M.Héma qui vous parle sans sourciller n’est pas un “simple" gendarme, c’est un homme bardé de diplômes et avec à son actif, plusieurs œuvres littéraires. Quand ce pandore, en service à l’Etat-major de la 2e région de la gendarmerie basée à Bobo-Dioulasso, vous parle de ses diplômes, vous avez envie de le persuader tout de suite de quitter la gendarmerie.

Né en octobre 1962 à Ouagadougou, Aimé Désiré Héma est nanti de diplômes : un Bac littéraire, une Licence et une Maîtrise en sociologie, un diplôme en droit international humanitaire et un DEA en anthropologie de la communication obtenu en 1999 à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar au Sénégal. Last but not least (1), Aimé Désiré Héma qui est marié et père de quatre enfants, prépare actuellement une thèse de Doctorat en sociologie de la communication à l’Université de Genève en Suisse. A ces parchemins, s’ajoutent les nombreux brevets et certificats d’aptitudes de divers domaines (secours, police judiciaire, protection extérieure…) engrangés par ce gendarme dans son corps de métier.

“Le monarque démocrate”, seul roman du pandore

Outre son background, ce gendarme doublé d’écrivain est auteur de plusieurs essais et recueils et d’un seul roman intitulé “Le monarque démocrate”, édité en 2003 à la Société des écrivains de Paris en France. Cet ouvrage majeur retrace les mutations du continent africain précolonial à nos jours avec à la clé, plusieurs thèmes abordés (conflits de génération, pouvoir traditionnel, etc.). Aussi bien ce roman que l’activité littéraire de Aimé Désiré Héma a inspiré les travaux de recherche de certains étudiants du département de Lettres modernes de l’Université de Ouagadougou. De tous les essais de M. Héma, celui qui l’a le plus marqué porte le titre “Quelle Francophonie pour le XXIe siècle” publié dans une anthologie de la Francophonie aux Editions Karthala en 1994. Avec cet essai, il a eu le 4e prix du concours international Charles Helou de la Francophonie. “C’est la plus grande distinction que j’ai reçue jusque-là ”, dit-il.
Comment M. Héma concilie-t-il le métier de gendarme à celui d’écrivain ?

Il répond sans ambages : “Lorsqu’un homme de tenue écrit, on voit tout de suite l’uniforme. Il y a un complexe qu’il faut désormais apprendre à surpasser, sinon il y a deux poids deux mesures. L’écriture me permet de dire ce qui ne peut pas être dit ou fait au sein de la gendarmerie à cause de l’inviolable clause relative à l’obligation de réserve consignée dans notre statut professionnel. Elle apparaît comme une tribune d’expression où je montre une autre dimension de l’homme qui n’est pas forcément en tenue de gendarme. L’universalité de l’écriture n’est pas du tout liée à la profession, mais plutôt à l’homme lui-même et cela sans exclusive”. Outre les ouvrages à son actif, M. Héma qui a le soutien de la haute hiérarchie de la gendarmerie dont celui “indéfectible” du commandant de la 2e région de gendarmerie, le lieutenant-colonel Serge Alain Ouédraogo, est un homme de lettres qui peut pousser l’imagination où on s’y attend le moins.

Il a par exemple, créé des mots qui ont été acceptés par l’Académie française. A ce sujet, il est peu bavard que d’habitude : “je ne peux rien vous dire sur ces mots car ils n’ont pas encore été publiés dans les encyclopédies. Et tant qu’ils ne sont pas publiés officiellement, je suis tenu au silence comme le recommande l’Académie française”. Gendarme pas comme les autres, Aimé Désiré Héma touche décidemment à tout. La radio, ça le connaît aussi. C’est lui qui est l’initiateur de l’émission “L’école des savoirs” animée par Emmanuelle Bastide sur Radio France internationale (RFI). “Avec le soutien de mon ami et journaliste français Vincent Garrigues, j’ai proposé cette émission à la radio mondiale qui l’a acceptée. A cet effet, RFI m’a versé à titre de droits d’auteur, une somme forfaitaire de 1 500 euros (NDLR : Environ 1 million de francs F CFA)”, confesse-t-il avec modestie.

Très attaché aux arts, M. Héma qui dit écrire à n’importe quel moment de la journée selon son inspiration, a aussi fait de la musique au lycée Philippe Zinda Kaboré aux côtés de son camarade et ami, Tall Mountaga, artiste- musicien burkinabè bien connu sous nos cieux. Il sait grincer une guitare. C’est également dans ce célèbre et grand lycée ouagalais que le gendarme écrivain s’est essayé un tant soit peu au théâtre en compagnie de son frère, Aimé Richard Héma, comédien burkinabè de renom. Inconditionnel de la chose artistique, Aimé Désiré Héma ne compte pas mettre fin à son aventure littéraire qui lui a permis de prendre part à des manifestations littéraires aux plans national (le GPNAL et la FILO) et international (la Foire du livre de Paris en France et le Salon international du livre de Genève en Suisse).

“Mon père était un grand ami du président Omar Bongo”

Si Aimé Désiré Héma, issu d’une famille de 9 enfants est passionné de littérature, il le doit surtout à son défunt père, Femba Joseph Héma, administrateur civil et enseignant, qui a lui très tôt donné le goût de la lecture. “Mon père nous obligeait à lire et c’est qui a cultivé en nous la passion de l’écriture. C’était un grand ami du président gabonais Omar Bongo avec qui nous n’avons pas gardé de contacts. Il a même dirigé pendant une quinzaine d’années, une société de commercialisation de produits halieutiques et agricoles au Gabon. Cela après son passage en tant que secrétaire général de l’Ecole inter-Etats des sciences et médecines vétérinaires (EISMV) de Dakar au Sénégal dans les années 70.

En son temps, il a fait office d’ambassadeur du Burkina au Sénégal compte tenu du fait que notre pays n’avait pas assez de moyens pour ouvrir des représentations diplomatiques en grand nombre”, confie-t-il. “Opiniâtre, audacieux et croyant ”, Aimé Désiré Héma est en odeur de sainteté auprès des autres écrivains burkinabè comme Ansomwin Hien, Suzy Nikiéma et bien d’autres. Aussi ne se réjouit-il pas que “la littérature burkinabè est sur la bonne voie car de plus en plus, les gens ont l’audace d’écrire. Seulement, il faut que les éditeurs minimisent les risques financiers et soutiennent les jeunes pour le rayonnement de notre littérature”. Joueur d’échecs à ses temps libres et fan de sports (Formule 1, football et tennis), Aimé Désiré Héma n’aime pas “l’oisiveté et l’autosatisfaction”. N’est-ce pas pour cela qu’il s’est toujours montré “pugnace” malgré les difficultés d’édition que connaissent les écrivains burkinabè ? Toujours est-il qu’il conseille aux jeunes “de ne pas se sous-estimer et d’oser créer ”.

Il ne compte pas lui-même ranger sa plume dans un tiroir. Aimé Désiré Héma, la littérature dans les veines, entend toujours écrire et écrire. Sa dernière œuvre écrite en hommage à Fadouga Héma, un patriarche de Banfora est un recueil de contes baptisé “Contes de Héma Fadouga ” qui date de cette année 2008. Mieux, il espère décrocher d’autres distinctions comme “Le prix Ahmadou Kourouma” du Salon international du livre de Genève en Suisse. Ce gendarme écrivain envisage de prendre part à ce concours littéraire international qui récompense les écrivains africains, promoteurs des idéaux de Ahmadou Kourouma, dans les années à venir.

Kader Patrick KARANTAO (stkaderonline@yahooo.fr)

* (1) : Expression anglaise qui signifie “dernier point, mais non le moindre

Sidwaya

P.-S.

Contacts de Aimé Désiré HEMA :
Portable : 00 226 70 22 30 70
Tél/Fax Bur : 00 226 20 97 70 98
Tél.Dom : 00 226 20 96 68 20
E-mail : adh2510@yahoo.fr
MSN : adh2510@live.fr

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Vos commentaires

  • Le 17 février 2019 à 12:44, par Nikiema fadel En réponse à : Littérature burkinabè : Aimé Désiré Héma, un gendarme écrivain

    Bonjour ou bonsoir c’est un honneur de vous poser quelques questions !! Je voudrais savoir quel roman parmis vos productions vous avez le plus aimer ?.
    Moi je suis en classe de 1erD je voudrais que vous me proposez des Romans qui pourrons participer à ma formation éducateur , intellectuel conte tenus du temps (nous avons des programmes surchargé donc les temps sont très occupés)
    Merci !!! {}

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