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Commission ad’hoc de l’Assemblée nationale : Les contre-propositions du Groupe du 14 février

Publié le lundi 21 juillet 2008 à 13h06min

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Les partis de l’opposition réunis au sein du Groupe du 14 février émettent de sérieuses réserves sur les propositions de réforme faites pas les commissions ad hoc de l’Assemblée nationale. Dans le document ci-dessous, le G 14 donne sa position et demande la tenue d’un forum sur la question.

Les partis membres soussignés du Groupe du 14 février (G 14), après analyse des résultats des travaux des commissions ad hoc de l’Assemblée nationale, relèvent globalement que sur les questions traitées, très peu de propositions retenues sont véritablement satisfaisantes, Sur des questions essentielles pour la consolidation de notre processus démocratique, beaucoup de ces propositions, si elles étaient adoptées, constitueraient un véritable recul. C’est pourquoi les partis membres du G14 ont décidé de faire connaître à l’opinion, non seulement leur appréciation des différentes propositions avancées par les commissions parlementaires, mais aussi, le cas échéant, de faire des contre-propositions.

I- Commission sur les quotas :

La répartition quasi équitable des sexes dans la population, le souhait général des politiques d’assurer la parité des responsabilités politiques et sociales, comme objectif juste et démocratique, correspondent à la volonté politique qui anime les partis politiques de l’opposition. Mais, force est de constater que c’est un objectif difficile à atteindre aujourd’hui au Burkina. En effet, la grande majorité des partis politiques, qu’ils soient de la majorité ou de l’opposition, ont un déficit important de militantes. Rares sont les partis qui peuvent se targuer d’un ratio de plus de 10% de cadres et même de militantes actives dans leurs structures.

Aussi, l’imposition d’un quota minimal de 30%, qui pourrait être une méthode efficace pour arriver plus tard à la parité, nous paraît, dans l’immédiat, très difficile, voire impossible à mettre en œuvre par les partis. C’est pourquoi nous proposons :

1. Que les quotas soient progressivement installés dans les listes électorales, sans d’autres sanctions que positives, à l’égard des partis qui les respecteront.

2. Qu’un projet de loi impose progressivement un quota suffisant sur tous les postes de nomination, tout en respectant scrupuleusement les principes de compétence et de neutralité d’une administration républicaine.

3. Nous nous démarquons fortement de la recommandation visant à la création d’association féminine sous la tutelle du ministère de la Promotion de la femme (ou de tout autre ministère) et qui ne serait rien d’autre qu’un nouvel instrument de manipulation aux mains du pouvoir.

II- Commission sur la vie chère

Il ne faut pas se voiler la face : la mondialisation/globalisation est simplement un stade plus cruel du capitalisme rendu possible par la chute du bloc socialiste.

Tout gouvernement même s’il ne peut affronter ou rejeter tout seul la mondialisation doit cependant prendre des mesures pour assurer un minimum de bien-être à sa population. Ce minimum de bien-être passe d’abord par le droit à la nourriture. Il est donc important que nos gouvernements s’inspirent de ce que font les grands pays (U.S.A, U.E.) qui prennent des mesures pour protéger leurs agriculteurs de la spéculation. Nos gouvernements doivent comprendre qu’ils sont là pour servir d’abord leurs populations et non les institutions de Bretton Woods. Cette responsabilité devrait se traduire par :

. une priorité accordée aux cultures vivrières par un soutien, un encadrement, une modernisation des systèmes de production, une protection de nos agriculteurs et paysans...

. La réintroduction des structures de contrôle des prix

. Une lutte féroce contre les spéculateurs

III -Commission sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales et le statut de l’opposition.

Sur le statut de l’opposition

En ce qui concerne le statut de l’opposition, le texte que propose la commission est globalement satisfaisant. Il reste cependant à compléter l’article 14 de l’avant-projet de la proposition de loi qui stipule : le Président du Faso et le chef du gouvernement consultent l’opposition sur des questions d’intérêt national ou de politique étrangère.

Nous proposons que ces rencontres soient périodiques, qu’elles aient lieu tous les six (6) mois et aussi en cas de besoin. Cela permettra des rencontres régulières dans l’intérêt des acteurs politiques et de la nation.

Sur le financement des partis,

Nous rejetons fermement la proposition de la commission qui consiste à ne financer, pour les activités hors campagne, que les partis ayant obtenu 3% de voix aux élections générales, et cela pour plusieurs raisons. L’article 13 de la Constitution stipule en effet :

"Les partis et formations politiques se créent librement. Ils concourent à l’animation de la vie politique, à l’information et à l’éducation du peuple ainsi qu’a l’expression du suffrage. Ils mènent librement leurs activités dans le respect des lois.

Tous les partis ou formations politiques sont égaux en droits et en devoirs, etc."

Le financement des partis hors campagne a pour objectif de permettre aux partis politiques de remplir leurs missions constitutionnelles. C’est ce qui a été, jusqu’à ce jour, pour tous les partis qui concourent entre autres, à l’expression du suffrage. Les priver de financement pour leurs activités n’est pas conforme à l’esprit de la Constitution. L’institution d’une barrière (3%) pour soi-disant raison de pléthore des partis, ne tient pas : car si les constituants avaient voulu limiter le nombre de partis, ils l’auraient fait.

Si on tient compte de la situation actuelle, au moins une cinquantaine de partis animent la vie politique en participant aux scrutins. Avec sa barrière de 3% de voix, la proposition de la commission ne retiendrait pour le financement hors campagne, que cinq (5) partis totalisant 82% des voix des électeurs aux dernières élections législatives. Ces partis ont obtenu environ 59%, 11%, 4%, 4% et 3% de voix. Dans ces conditions, hors campagne électorale, ils obtiendraient respectivement 72% (59/82), 14%. 5%, 5%, et 4% de tout le financement de l’Etat. On se trouverait donc dans des conditions où un seul parti va s’octroyer à lui seul 72% du financement de l’Etat, laissant 28% aux quatre suivants et 0% à tous les autres partis qui représentent quand même à eux tous 18% des électeurs ! Il y a de quoi douter de l’équité d’un tel système !

Nous réaffirmons notre proposition qui consiste à répartir le montant annuel du financement hors campagne en deux tranches :

- 50% à répartir de façon égalitaire entre tous les partis ayant pris part au moins une fois aux deux dernières élections législatives

- 50% à répartir entre les partis ayant pris part aux dernières élections législatives, proportionnellement, aux voix obtenues par chacun d’eux.

Cette clé de répartition est nettement plus juste, plus équitable, plus conforme à l’esprit et à la lettre de notre Loi fondamentale. Elle a en outre l’adhésion de la presque totalité des partis politiques !

IV - Commission sur le code électoral

Sur les travaux de cette commission, nous faisons les propositions suivantes :

1. Sur la CENI

Notre expérience lors des dernières élections, présidentielle, municipales et législatives, nous conduit à remettre en cause la conception retenue quant à la composition et au fonctionnement de la CENI. En particulier nous souhaitons que la CENI, au plan national et dans ses démembrements, soit composée à parité, d’une part des représentants de la majorité présidentielle, et d’autre part des représentants de l’opposition. En effet la présence d’organisations dites de la société civile fausse le jeu en introduisant des représentants d’organisations supposées politiquement neutres, mais qui en réalité sont partisanes, et s’alignent presque tous sur les positions de la majorité présidentielle. En outre nous demandons de limiter le pouvoir laissé aux présidents des démembrements, et notamment des CECI (désignation des membres des bureaux de vote communaux, inscriptions sur les listes complémentaires, etc.) en le soumettant au contrôle des autres membres du bureau correspondant.

2. Sur les cartes électorales et les documents d’identification des électeurs.

Nous proposons que notre pays aussi, comme cela se pratique dans d’autres pays voisins, les cartes électorales portent la photo du titulaire et soient établies de façon à être infalsifiables. Nous demandons aussi de n’autoriser comme

seuls documents d’identification des électeurs dans les bureaux de vote que la carte nationale d’identité, le passeport ou la carte consulaire, tous documents portant une photo du titulaire.

3. Sur les circonscriptions électorales et les modes de scrutins.

Nous proposons :

- que la région et non la province devienne la circonscription électorale pour les élections législatives pour assurer une représentation plus équilibrée des forces politiques ;

- que le nombre de députés soit accru pour tenir compte notamment de l’accroissement de la population représentée ;

- que la commune et non le village soit la circonscription électorale pour les élections municipales ;

- que le nombre de conseillers municipaux (sans suppléants) soit limité et fixé pour chaque catégorie de commune (urbaine, rurale d’arrondissement) afin d’assurer un meilleur choix des conseillers pour un travail efficace et valorisant pour eux et pour les communes ;

- que dans tous les cas d’élections communales ou législatives, le scrutin soit du mode proportionnel au plus fort reste ;

4. Sur la responsabilité des membres des bureaux de vote.

5. Accepter d’être membre d’un bureau de vote doit s’accompagner du respect du principe de l’imputabilité. Le non-respect des dispositions du code électoral (document d’identification de l’électeur et de la carte d’électeur, de vote de non inscrits, non neutralité, refus d’accepter les représentants des partis, non délivrance de la feuille des résultats aux délégués des partis, non transmission des feuilles de résultats aux institutions prévus, tolérance vis-à-vis du port des gadgets électoraux, etc.) devra s’accompagner de sanctions fermes à leur encontre.

6. Interdire tout gadget électoral avant, pendant et après les élections

7 Plafonner les dépenses de campagne et exercer un contrôle rigoureux avec sanction pour les contrevenants

Nous lançons un appel à tous les partis politiques, aux organisations de la société civile et tous ceux qui sont soucieux de l’avenir de la démocratie dans notre pays pour qu’ensemble nous exigions du pouvoir de la 4e République un forum pour une discussion autour des grandes questions de la démocratie de notre pays et en particulier celles évoquées ici, pour trouver des solutions consensuelles afin de sortir notre pays de la dérive où il est en train de s’engager.

Ouagadougou, le 10 juillet 2008. Ont signé :

Pour le GDP,
le secrétaire général,
Issa Tiendrébeogo

Pour le PDS ,
Le Président,
Youssouf Sambo Ba

Pour le PAl,
Le Secrétaire général,
Philippe Ouédraogo

Pour le PDP / PS ,
Le Président,
Pr Ali Lankoandé

Pour l’UNR/MS,
Le président,
Me Benewendé S. Sankara

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