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Situation au CDP : La première véritable épreuve de Roch

Publié le mardi 24 juin 2008 à 12h18min

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Roch Marc Christian Kaboré

Au Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), le week-end passé aura été fort mouvementé : tenue d’une session du bureau politique de ce parti le samedi et convocation, par sa direction, d’une conférence de presse le dimanche.

Le centre d’intérêt de toutes ces activités était une opération de communication interne et externe relative à la suspension de Moussa Boly, de René Emile Kaboré, de R. Mathieu Ouédraogo, d’Amadé Taho, de Pierre Tapsoba et d’O. Marc Yao "de tous les organes, instances et structures du parti".

Beaucoup de choses ont été dites sur cette décision tant par les responsables du CDP et les suspendus que par l’opinion publique et les médias. Il peut donc paraître monotone et inintéressant de revenir sur le sujet. Seulement, la vie d’un parti au pouvoir qui se veut de pouvoir dans un pays comme le nôtre ne peut que susciter beaucoup d’intérêt. Par ailleurs, le fait que c’est réellement les premiers remous internes que cette formation politique interne rencontre depuis sa création en 1996 ne peut que justifier l’attraction qu’elle exerce sur les observateurs et les analystes de la scène politique nationale.

Cependant, l’élément majeur dans la passe que traverse le CDP est, de notre point de vue, la situation de Roch Marc Christian Kaboré, son président. A l’évidence, c’est la première fois qu’il est publiquement mis à l’index par des militants (et pas des moindres) de son parti. De par le passé, ce sont des personnalités telles Salif Diallo et surtout Simon Compaoré qui essuyaient les coups de boutoir et de l’opinion et (aussi) de certains militants du CDP. Il importe alors de se demander pourquoi celui qui était jusque-là perçu par une partie importante (pour ne pas dire la totalité) des membres comme une personnalité sociable, compréhensible et consensuelle fait l’objet des accusations que l’on sait de la part de "grands" militants de sa formation politique.

Il est opportun et pertinent, à notre sens, de faire observer d’emblée que ce n’est pas la justesse des récriminations des suspendus qui importe. Ce n’est pas non plus leur représentativité en termes de base sociale qui compte quand bien même il ne serait pas faux de penser qu’au moins quelques autres militants ont une telle lecture de la situation. Malheureusement, ils n’ont pas le culot d’un Pierre Tapsoba ou le courage d’un Marc Yao.

Le plus important, nous semble-t-il, ce sont l’image et la perception qu’ils ont du fonctionnement de leur parti. Certes, il n’est pas exclu que cet intérêt subi pour les principes et le management du parti soit guidé par le désert que traversent les suspendus. Certes, il n’est pas totalement faux de dire que certaines de leurs méthodes de lutte flirtent avec l’indiscipline.

Toutefois, le parti aurait grand intérêt à œuvrer à la mutation positive de cette perception. En outre, faut-il le souligner, c’est moins la personne de Roch Marc Christian Kaboré que celle du président qu’il est qui est concernée. En d’autres termes, ce dernier, en tant qu’individu, n’a pas été, à notre connaissance, égratigné. S’il l’a été, c’est en tant que président. Ce qui revient à dire que c’est l’ensemble de la direction de son parti qui est indexé, puisqu’il ne fait rien que les autres responsables ne l’ont autorisé à faire.

Si l’honneur de l’individu est sauf et qu’il ne reste que le management du parti par lui et les autres dignitaires, il est possible de trouver une solution à l’imbroglio actuel. Surtout qu’en fait de manque de démocratie, il s’agit plutôt d’une appréciation erronée de la réalité, si on s’en tient aux explications du bureau exécutif national.

Dans la mesure où les présents remous du CDP sont les premières vraies manifestations du désaccord entre la direction du parti et certains militants, la forme et le fond de la résolution des problèmes vont compter dans l’avenir du CDP et l’image de son président. Dans cette perspective, un modus vivendi pour une paix des braves est préférable à un irrédentisme, qui est en fait une série contre-productive d’empoignades des ego, des uns et des autres.

Au terme de la session du bureau politique, qui s’est tenue samedi, la direction aurait été prise de lever les sanctions, mais à la seule condition que les intéressés fassent leur autocritique publiquement et par voie de presse ; tout comme ils ont utilisé ce canal pour poser leurs problèmes.

Pour le moment, nul ne sait ce qu’en diront les premiers concernés. Il faut souhaiter seulement qu’un terrain d’entente soit trouvé pour les raisons suivantes :

la plupart des suspendus sont des retraités. Humainement, une telle situation est difficilement tenable, car, disons-le franchement, cela leur ôte la possibilité de figurer sur des listes électorales et de contribuer à la gestion du pouvoir tout en faisant face aux charges qui sont les leurs. Tenir compte de cet aspect des choses, c’est aussi préparer le terrain pour ceux qui sont aux affaires aujourd’hui, car ils sont déjà sur le chemin de la retraite.

L’image de démocrate, que R. M. C. Kaboré a su cultiver à propos de sa personne, mérite d’être entretenue étant donné que c’est un bien qui n’a pas de prix.
S’il est vrai que les suspendus représentent peu de choses au sein du CDP, il est également vrai que leur capacité de nuisance est inversement proportionnelle à leur représentativité réelle. Dans un contexte de vie chère avec des institutions démocratiques en phase de solidification, la juste résolution de ces problèmes au sein du CDP peut aider à faire front aux défis de l’heure.

Enfin, il faut dire, à l’endroit des sanctionnés, qu’ils doivent faire preuve de plus d’humilité et de violence sur soi en examinant soigneusement les conditions posées par R.M.C. Kaboré et son équipe, car si le CDP perd en les mettant momentanément à l’écart, eux non plus ne gagnent rien en persévérant dans ce bras de fer. Pire, ils sont les premiers à perdre.

I.S.

L’Observateur

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