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Niger : Cet autre signe de vitalité démocratique

Publié le vendredi 20 juin 2008 à 13h13min

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Décidément, rien n’est immuable ! Dans cette ambiance assez délétère de vie chère, où une bonne partie de la population tire le diable par la queue (si on a la chance de l’attraper) et où la démocratie peine à s’installer durablement, bien d’hommes avaient été littéralement gagnés par l’afropessimisme. Mais, si à ce jour, on se demande bien à quand la fin de cette spirale inflationniste de la vie chère, nous savons par contre que la démocratie prend forme de jour en jour dans certains pays africains, dont le Niger.

Et véritablement, les signes extérieurs de vitalité démocratique ne manquent pas dans ce pays désertique à la lisière du Sahara. A dire vrai, sous nos tropiques, ce serait un crime de lèse-majesté que de poursuivre un ex-PM pour détournement de 100 millions. Rien que 100 millions de F CFA !

D’ailleurs, ce serait "gâter son nom" pour le plus minable des comptables publics que de soustraire une "si petite somme" dans un contexte où le détournement de la chose publique est passé dans les mœurs et est considéré presque comme un fait banal.

Ainsi donc Hama Amadou, qui a passé huit longues années à la tête du gouvernement nigérien et qui reste à ce jour le n° 1 du MNSD/Nassara, le parti présidentiel, pourrait répondre devant la Haute Cour de justice de l’utilisation de 100 millions de nos francs. Si on sait que dans certains pays, les délinquants à col blanc ont pignon sur rue, et l’impunité est la règle, on ne peut aucunement douter de la vitalité démocratique du pays de Diori Hamani.

Faut-il rappeler qu’en mai 2007 déjà, une motion de censure débarquait ce même Hama Amadou de son poste de Premier ministre ? C’était, sauf erreur ou omission de notre part, une première dans nos brinquebalantes démocraties sub-sahariennes.

Et, comme si un tel renvoi de la tête du gouvernement par voie constitutionnelle ne suffisait pas, le 16 juin dernier, alors que le continent célébrait la journée de l’enfant africain, le Parlement nigérien se réunissait pour se prononcer sur la mise en examen du même Hama Amadou, qu’on voudrait traduire devant la Haute Cour de justice.

Là encore, sauf erreur ou omission, c’est la première fois qu’on menace de traîner un ex-chef de gouvernement devant un tel tribunal au niveau de notre sous-région. Certes à Niamey, des voix se sont élevées pour crier au règlement de comptes politiques.

Au-delà de tout ce qu’on pourrait en dire, c’est d’abord un signe que ce pays est sur la voie démocratique. Mais ce n’est pas tout : ces derniers temps, la Cour constitutionnelle, au pays du défunt président Seyni Kountché, a jugé non conforme à la Constitution et rejeté un texte voté par les députés, qui s’étaient accordé des augmentations jugées scandaleuses par des ONG.

Véritablement très gloutons, ces prétendus représentants du peuple, hormis les allocations familiales et l’assurance médicale pour eux, leur (s) femme (s) et enfants de moins de 25 ans, s’étaient accordés une retraite de 600 000 F CFA (environ 1 000 euros) et 90 jours d’indemnités parlementaires à raison de 34 000 par jour dès la prise de fonction, et le double à la fin du mandat.

Et ce n’est pas tout, car lors des missions à l’extérieur, le député devait toucher un perdiem de 200 000 par jour. Si ce n’est pas du vol, ça y ressemble fort vraiment, vu qu’à ce jour, un député nigérien qui n’est ni membre du bureau, ni membre d’une commission spécialisée a un traitement mensuel de 4 782 dollars, soit un peu plus de 2 millions de nos francs.

C’est pour cela que la société civile est montée au créneau pour dire non à ce pillage en règle. Et la Cour constitutionnelle a dit le droit. Aucun doute, avec cette réelle séparation des pouvoirs, que la démocratie est en marche au Niger. Une belle leçon pour bien de pays !

Boureima Diallo

L’Observateur

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