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Fiscalité : "Le député n’est pas au- dessus de l’impôt"

Publié le mercredi 28 mai 2008 à 11h36min

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Ce n’est pas normal que les émoluments des députés ne soient pas soumis à l’impôt. C’est la substance de l’écrit ci-dessous.

Je voudrais, avant d’aborder la question objet de mon écrit, adresser mes sincères encouragements au président de l’Assemblée nationale pour l’efficacité avec laquelle il préside les sessions parlementaires depuis son élection à la tête de cette prestigieuse institution.

Symbole de souveraineté nationale, expression constitutionnelle populaire, le Parlement a, entre autres missions fondamentales, le vote de l’impôt, la fixation des règles relatives à l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature. En effet, dans tous les pays du monde, l’impôt existe, il est de tous les temps et de tous les lieux, et nul citoyen ne doit être dispensé de l’honorable obligation de contribuer aux charges publiques. C’est cela qui fonde l’essence même de l’impôt, prélèvement obligatoire devant servir à assurer le fonctionnement des institutions dont notre auguste Assemblée nationale.

Au terme des articles 55 et 56 du code des impôts, l’Impôt unique sur les traitements et salaires (IUTS) est applicable aux revenus des travailleurs des secteurs public et privés. Il constitue la deuxième source de recettes fiscales après l’impôt sur les bénéfices industriels, commerciaux et agricoles (IBICA). A la lumière des articles ci-dessus cités et au regard de la place de l’IUTS, je suis au regret de constater que dans notre pays les revenus de certaines catégories de personnes ne sont pas soumis audit impôt. C’est le cas par exemple des émoluments de nos honorables députés qui échappent aux mailles de nos services fiscaux. L’honorabilité de nos élus se mesure aussi par rapport à leur propension à créer un climat de confiance, d’équité et de justice sociale.

Une injustice avérée

Il est inconcevable que dans un même Etat, certains citoyens s’arrogent le droit de s’octroyer des avantages colossaux en laissant la charge de l’impôt aux autres, fussent-ils leurs électeurs. Face à cette injustice avérée, les députés épris de justice doivent soumettre à l’Assemblée nationale un projet de loi visant l’imposition de leurs émoluments.

Sous nos tropiques, un million de francs CFA par mois est une belle somme à faire baver plus d’un Burkinabè et pas des moindres. L’IUTS correspondant n’est pas non plus négligeable dans un contexte caractérisé par la rareté des ressources et la cherté de la vie.

Dans notre pays, nous avons appris depuis un certain temps qu’un ministre ne coûte pas plus cher qu’un directeur général. Que dire du député ? Elu pour une période de cinq ans, il s’en tire au bout du compte avec la somme de soixante millions pour avoir consenti l’impôt pour les autres, voté les lois et avoir contrôlé l’action gouvernementale.

Au niveau local, les perdiems de nos conseillers municipaux représentent moins du dixième de ceux de nos députés, ils n’ont pas droit aux véhicules "grippes aviaires", pendant qu’ils sont les véritables bâtisseurs de notre pays du fait de leur proximité avec les populations et connaissent mieux leurs préoccupations. Certains diront qu’un député "national" est financièrement plus sollicité par la population qu’un conseiller municipal qui, en réalité, est assimilable à un député dont les actions se limitent au niveau local, car il contrôle l’action de l’administration municipale, prend des délibérations et des arrêtés. Les multiples sollicitations des populations à l’endroit du "député national" se justifient par le fait qu’il est 100 fois plus nanti que son "homologue local". L’agitation et les querelles nées du positionnement des candidats à la députation à la veille de chaque consultation électorale traduisent à bien des égards leur volonté de vouloir se faire une place au soleil, et ce n’est pas les anciens Cnppistes qui me contrediront.

La fierté de servir la nation doit précéder toute équation personnelle, tout calcul matérialiste infécond pour la patrie. Il est temps que le peuple contrôle et sanctionne l’action des députés élus selon les règles de la démocratie représentative. Pour cela, il faut encourager les candidatures individuelles pour barrer la route qui mène à l’Assemblée nationale aux candidats touristes en quête d’éloges et de visibilité.

Ni haine, ni jalousie

Dans le jeu démocratique, l’exercice du contre-pouvoir est un élément fondamental.

Dans le cas de l’Assemblée nationale, il ne peut s’exercer que si la société civile est forte et capable de faire pression sur nos honorables députés unis par les liens sacrés de leurs émoluments défiscalisés.

Sous d’autres cieux, les actions de la société civile ont fait plier des gouvernants.

Je rassure nos honorables députés que je n’éprouve aucun sentiment de haine ou de jalousie à leur égard. Au contraire, en tant qu’élus du brave peuple du Burkina, je leur dois du respect. Cependant, je les exhorte à prendre résolument une décision courageuse en faisant imposer leurs émoluments comme tous les autres travailleurs. Ainsi, ils rendront justice à leurs électeurs en détresse et à leur gouvernement qui se bat quotidiennement pour améliorer ses recettes afin de pouvoir faire face aux nombreuses demandes sociales du pays.

Du reste, je voudrais tirer mon chapeau aux honorables députés, conscients de l’état de pauvreté de notre pays et de l’importance des priorités de notre peuple, qui ont refusé d’empocher 3 millions à eux servis pour la bamboula de fin d’année.

La commission parlementaire mise en place pour faire des propositions en relation avec la vie chère ne doit pas occulter l’aspect fiscal des émoluments des députés qui constituent une source de revenus non négligeable pour le budget de l’Etat. Ces ressources combinées à d’autres telles que les économies réalisables sur la réduction du train de vie de l’Etat peuvent refermer le panier de la ménagère à défaut d’y ajouter quelques grammes supplémentaires de riz. Notre auguste assemblée joue son honorabilité sur cette question somme toute légitime. La justice cimente la démocratie pour construire la paix. Alors, messieurs les élus, le peuple veut plus de justice fiscale.

Ismaël Ouédraogo

Sidwaya

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