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Bornage de la frontière Burkina/Mali : Le casse-tête champêtre

Publié le mardi 27 mai 2008 à 10h23min

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Le haut-commissaire de la province de la Kossi, Hallahidi Diallo, accompagné des directeurs des services techniques, a effectué du 6 au 21 mai 2008 une tournée dans les 10 départements de la province. Objectif : recueillir les préoccupations des populations et, singulièrement, celles liées aux conflits fonciers latents et / ou ouverts afin de pouvoir mieux les gérer et / ou les résoudre. La question épineuse de la gestion des champs de culture après le bornage de la frontière entre le Burkina et le Mali aura ravi la vedette aux autres difficultés vécues par les populations de Kombori-Koura et de Barani.

La fin des travaux de bornage de la frontière entre le Burkina et le Mali, plus précisément entre les régions de la Boucle du Mouhoun et de Ségou, intervenue en fin 2007, hante les esprits des autorités et de certains producteurs de la province de la Kossi à l’orée de la saison des pluies. Et pour cause, environ 250 ménages de la Kossi, côté burkinabè, et leurs champs font désormais partie du Mali après le bornage. Par exemple, à Gani, un village du département de Kombori- Koura, le désespoir et le découragement sont extrêmes. Tous les champs de ce village sont en territoire malien. Selon l’un des conseillers municipaux de ce village, le plus urgent serait de voler à leur secours car ils ne savent plus à quel sain se vouer. Pourront- ils exploiter lesdits champs pendant la présente campagne ou vont- ils, en compensation, exploiter les champs maliens se retrouvant en territoire burkinabè ? s’interrogent de nombreux paysans de la province de la Kossi qui ne cessent de se lamenter.

Ces préoccupations sont certainement partagées par les populations des 8 villages maliens qui sont également rentrés dans la province de la Kossi en territoire burkinabè. S’il est vrai que la frontière divise les Etats et non les peuples, il n’en demeure pas moins que les problèmes de terres cultivables qui assaillent ces populations doivent trouver immédiatement des solutions, car, comme nous l’enseigne l’adage, "ventre creux n’a point d’oreille".

Interdiction formelle de nouvelles défriches

Une rencontre conjointe entre les gouverneurs des régions de Ségou et de la Boucle du Mouhoun, qui devrait se tenir le 15 mai 2008 pour définir la conduite à tenir aux populations des deux régions après le bornage, aurait été reportée. Pour rappel, la dernière rencontre officielle entre les deux délégation dans le cadre de la gestion de la frontière remonte au 10 juillet 2007 à Nouna. Une rencontre au cours de laquelle la décision d’interdire le port des armes légères par les populations dans les champs avait été prise afin de préserver le climat de paix et de stabilité. Il avait aussi été dit qu’en cas de besoin de terre de culture exprimé par les populations de part et d’autre, les autorités seraient saisies.

Mais, face à l’imminence de la saison des pluies qui, comme on le sait, est la période au cours de laquelle s’exacerbent en milieu rural les conflits surtout fonciers, il devient presque urgent que les dirigeants des deux pays accordent vite leurs violons afin d’éviter à ces peuples frères qui ont des liens séculaires, des affrontements sanglants, comme ce fut le cas le 30 juin et le 1er juillet 2006. Face à ces problèmes de terres cultivables qui assaillent les populations et qui sont la cause de l’effritement de la solidarité dans certains villages, le haut-commissaire de la Kossi, Hallahidi Diallo, leur a simplement demandé de faire confiance aux dirigeants des deux Etats qui sont en concertation permanente. Aussi a-t-il rassuré les populations qu’elles peuvent exploiter leurs anciens champs en attendant d’avoir les instructions et des orientations claires pour la gestion des conséquences des travaux de bornage. En outre, il a informé les populations que les nouvelles défriches sont formellement interdites, et tout producteur qui doit se rendre dans son champ hors de son territoire doit en aviser et les autorités de son pays et celles de l’autre pays, de sorte à préserver la quiétude.

Préoccupations à la pelle

En dehors de cette épineuse question des terres cultivables née des travaux de bornage, les populations des départements de Kombori-Koura et de Barani partagent à un degré moindre les mêmes préoccupations. Elles se résument au manque d’infrastructures sanitaires, scolaires, hydrauliques, routières, de voies de communication, de zones de pâture et de points d’eau pastoraux. A titre d’exemple, le département de Kombori-Koura, situé à 127 km au Nord de Nouna, ne dispose pas d’un seul dispensaire, encore moins d’une maternité. Le dispensaire le plus proche se trouve à plus de 22 km. D’où le cri du cœur des femmes qui souhaitent avoir au moins une maternité pour alléger leurs souffrances. Avec 17 villages, ce même département ne compte que 5 écoles. Le conflit de compétence entre conseillers municipaux et membres du conseil villageois de développement lié à la méconnaissance des rôles et des attributions des uns et des autres a aussi été au centre des préoccupations.

Au regard de la pertinence des préoccupations, les échanges sont allés à certains endroits au-delà de 18 h. A toutes ces préoccupations, le haut- commissaire et les directeurs des services techniques ont apporté des réponses plus ou moins satisfaisantes. Pour ce qui est des actes de naissance, le haut-commissaire a demandé aux maires d’organiser des opérations d’établissements afin de faciliter la scolarisation des enfants. Hallahidi Diallo s’est d’ailleurs dit satisfait de cette tournée qui lui a permis non seulement d’échanger et de faire passer des messages et des thèmes de sensibilisation portant sur les programmes de développement engagés par les services techniques mais aussi et surtout sur une cohabitation et une coopération transfrontalière harmonieuse et apaisée entre les populations sœurs tout au long de la frontière.

Par Serge COULIBALY

Le Pays

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