Prétextant la non-reconnaissance de sa légitimité par l’opposition réunie au sein du "Front Siggil Sénégal", Wade a juré de ne plus avoir contact avec elle. Un argument qui résiste difficilement à l’analyse, si l’on considère que l’opposition, de façon indirecte, reconnaît le pouvoir en cherchant à prendre langue avec ses représentants. Visiblement, le président sénégalais fait preuve d’une susceptibilité indigne d’un homme d’Etat dont la force doit résider dans sa capacité à encaisser les critiques de l’opposition. Car, qu’est-ce qu’une démocratie sans une opposition forte ?

C’est l’essence même du pluralisme démocratique que le président Wade tente de remettre en cause. Mais on peut croire que ses nouvelles frasques n’auront pas raison d’une opposition qui a su traverser les époques, et dont lui-même fut un des fers de lance, jusqu’à son accession au pouvoir en 2000. Du reste, on a du mal à comprendre que Wade, qui a bénéficié d’un espace pour s’exprimer et lutter, pendant ses années d’opposant, ait une telle aversion pour ses contradicteurs. On est loin d’un Mandela qui, bien qu’ayant vécu l’enfer de l’apartheid et de la prison, a su transcender son ego, pour l’intérêt national. C’est pourquoi il est aujourd’hui une légende vivante. Le président Abdoulaye Wade, par contre, risque de laisser un héritage calamiteux, s’il continue dans sa logique de néantiser l’opposition.

Par Mahorou KANAZOE

Le Pays