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Medias : Plus de liberté pour une culture permanente de la paix

Publié le lundi 5 mai 2008 à 10h55min

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Au moment où le monde entier vient de commémorer, le 3 mai, la Journée internationale de la liberté de la presse et où le Burkina Faso se prépare à distinguer ses meilleurs journalistes, candidats aux prix Galian, il apparaît important et intéressant de porter un regard sur les rapports étroits entre la liberté de la presse et la culture de la paix.

La liberté de la presse peut être comprise comme la libre expression de la diversité des opinions de l’individu, d’une communauté ou d’une nation. La pluralité des supports médiatiques, la diversité des lignes éditoriales, l’autonomie vis-à-vis du politique, du financier et du social, des organes de presse et de leurs animateurs, la formation et la confraternité constituent à la fois les déterminants et les indicateurs majeurs de la liberté de la presse. Celle-ci se présente comme un instrument de mesure de la gouvernance politique et économique, un critère d’évaluation du niveau d’ancrage de la démocratie et de la paix dans un pays. Ne suffit-il pas de parcourir les « Unes » des journaux d’un pays pour avoir une idée de la santé de celui-ci ?

La culture de la paix renvoie à l’ensemble des gestes, des habitudes et habitus, des mœurs, des comportements et des actes qui contribuent à instaurer la concorde et la quiétude au sein des populations. Dans nos différentes langues et cultures au Burkina Faso, le mot « laafi », « lafia » est riche de trois dimensions. Lafia, c’est la santé, mais aussi la paix et la quiétude spirituelle. Les trois termes (santé, paix et quiétude) se rassemblent, selon la sagesse de nos cultures, dans une vision globale de l’Homme en tant qu’être simultanément de chair, de relations et d’aspirations. La paix, dans ce sens global, n’est pas une absence de guerre, elle est une sous-culture, elle ne devient une réalité que pour les communautés humaines qui luttent contre la faim et la soif, qui protègent les valeurs humaines cardinales comme la prunelle de leurs yeux et qui savent donner à leur alliance d’humanité, le poids et le sérieux qu’elle mérite. Une telle culture ne s’acquiert pas comme par un coup de baguette magique. Elle est le fruit d’une longue formation, l’aboutissement d’un processus. La paix et la liberté se rejoignent à ce moment et en ce lieu pour être tous deux une école du citoyen et de la citoyenneté. Et qui dit école dit cheminement, application, mais aussi renoncement et abnégation. Et plus la ligne pédagogique de l’école est claire et nette, plus elle est éclosion de nouvelles personnalités.

En Afrique, la connexion liberté/paix a été parfois perturbée par des régimes et des individus qui, soit sacrifiaient la liberté à la paix, soit laissaient toute liberté à la liberté, même celle d’instaurer le règne de la terreur. Le devoir de la presse semble bien se situer dans cette zone de turbulence qui ressemble au couscous calamiteux des contes. En effet, si vous consommez ce couscous, votre père meurt ; si vous ne le mangez pas, c’est votre mère qui trépasse… La question n’est pas de savoir comment faire, mais de trouver qui a préparé un tel couscous et pourquoi/comment il a pu lui donner une nature aussi punitive.

Et plus d’une fois, en Afrique, les hommes et les femmes des médias ont mesuré de leur vie, mais aussi de leur mort, pourquoi/comment la connexion liberté/paix était de nature punitive. C’est sans doute le lieu de rendre hommage au courage et au professionnalisme de certains journalistes et professionnels des médias tués , blessés, emprisonnés ou poursuivis dans l’exercice de leur métier. Dans la même veine, il sied de saluer, sans gêne ni hypocrisie sociale, « l’ouverture d’esprit renouvelé des autorités burkinabè », à favoriser crescendo une culture de la liberté de la presse bien comprise par ses acteurs, voire ses actants.

Contrairement à des Etats (Somalie, Gambie, Erythrée, Ethiopie, R.D. Congo…), qui ont la triste réputation de pays liberticides en matière de presse, au Burkina Faso, la « situation » que nous souhaitons activement meilleure demain à aujourd’hui, est encourageante. Il reste aux acteurs des médias de saisir eux-mêmes la balle au bond, pour ne plus se complaire dans le manque de courage journalistique, l’autocensure béate : la liberté de la presse se conquiert « malicieusement » au prix de combats sur soi-même également ! Il reste qu’il faut travailler à améliorer les conditions de vie et de travail des journalistes (…).

En cela, la signature de la convention collective, ainsi que la dépénalisation adulte des délits de presse, cheval de bataille du président Beyon Luc Adolphe Tiao du CSC (Conseil supérieur de la communication), sont fortement attendues et pourraient constituer une bouffée d’oxygène et pour la nécessaire liberté de la presse et pour l’approfondissement du processus démocratique en cours au Burkina Faso. Et ce, contrairement à des volontés de quelques salons feutrés, (non loin de rappeler le réflexe de Pavlov) d’appauvrir les journalistes, pour mieux s’en servir, à travers quelques os, par moments, jetés à leur face (…).

La presse, en participant activement à la sauvegarde de la paix du ventre, des cœurs et des esprits, constitue donc, à la fois un espace et un levier pour une culture de paix qui, au lieu de n’être qu’un armistice, constitue le socle de notre société en développement. A travers ses missions d’information, d’éducation et de divertissement, la presse ne se préoccupe pas seulement de préserver la paix sociale, elle s’active à faire en sorte que toutes les paix soient paisibles pour tous.

Reflet de la réalité sociale et des aspirations profondes des citoyens, la presse se présente comme l’outil essentiel d’instauration d’un climat de tolérance, d’entente mutuelle et de paix. En l’absence de citoyens bien informés, il n’est point de paix et de démocratie.

La presse burkinabè, par sa position grosso modo, médiane, s’illustre comme un des principaux vecteurs de la paix. En se donnant pour mission d’interpeller les acteurs de tous les bords et de tous les secteurs de la vie nationale, elle s’illustre comme l’outil privilégié de promotion de la culture de la paix. En ouvrant ses colonnes et en tendant ses micros à toutes les composantes de l’opinion nationale, la presse contribue à l’expression plurielle des intérêts et des ambitions. En ces moments de Journée internationale de la liberté de la presse, il est, en tous les cas, judicieux d’inviter les médias à promouvoir, davantage, la culture de la paix, au Burkina Faso et dans la sous-région.

La presse, en tant qu’outil du rayonnement international de notre pays, est aussi un outil de soutien de notre diplomatie axée sur la promotion de la paix et du développement. Plus de liberté peut permettre l’émergence de plus « de bouches et de plus de plumes de la paix ». C’est pourquoi, le signal donné par le président du Conseil supérieur de la communication, en Homme de son temps (selon l’esprit des philosophes) à travers un SMS, à moult ouvriers et ouvrières de la plume et du micro, le 03 mai dernier, n’est nullement passé inaperçu dans les salons des observateurs de la vie de la cité(…) : « Bonne journée de la liberté de la presse et tous mes encouragements pour votre engagement constant pour la liberté et le droit d’informer… ». Dont acte.

Par Ibrahiman SAKANDE
ibra.sak@caramail.com

Sidwaya

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