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Le CDP n’a que l’"opposition fantôme" qu’il mérite

Publié le lundi 10 mars 2008 à 12h20min

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Avec un président ré-réélu, en novembre 2005, avec un score soviétique de 80,30%, une majorité éléphantesque de 73 députés sur 111 et le contrôle de 315 communes sur 351, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) paraît détenir tous les leviers du pouvoir par son écrasante majorité. Mais hélas ! Pour avoir écrabouillé toute opposition politique sur son chemin, le giga-parti n’a-t-il par fini par créer, en son propre sein, le démon qui le hante aujourd’hui ?

La gestion de la crise relative à la vie chère soumet le méga-parti à une rude épreuve, et pour cause. N’ayant visiblement plus d’arguments pour affronter l’exaspération de la rue, c’est le gouvernement ultramajoritaire de Te$ticu$ Zorro qui a eu l’obligeance d’ouvrir des consultations tous azimuts pour impliquer toutes les « forces vives de la nation » dans la recherche de solutions aux violentes manifestations du 22 février à Bobo-Dioulasso, Banfora et Ouahigouya. Mais loin d’être un signe d’humilité, cette démarche ne contraste-t-elle pas avec l’arrogance habituelle des partisans du tuk-guili ?

La concertation et le partage du pouvoir ne sont pas les vertus les mieux partagées au CDP. Et les partis de l’opposition regroupés au sein du Groupe du 14 février (G-14) n’ont pas manqué l’occasion de le rappeler aux membres du gouvernement au cours de la rencontre du 28 février avec les partis politiques. On a même entendu des ministres supplier le G-14 de les aider à préserver la paix sociale. Comme si ces partis dits de l’”opposition radicale” que le CDP lui-même a contribué à rapetisser pouvaient calmer la colère des vandales qui ont semé la terreur le jeudi 28 février à Ouagadougou. Fallait-il aller chercher la main de cette opposition devenue l’ombre d’elle-même derrière ces manifestations ?

Le sulfureux agitateur Nana Thibaut devenu héraut ou héros - c’est selon - de la lutte contre la vie chère n’est-il pas en réalité un allié de Blaise ? A la vérité, Nana Thibaut a soutenu la candidature de Blaise Compaoré en novembre 2005 et il a même fait alliance avec l’ADF/RDA - un autre allié du Blaiso - pour les municipales de mai 2006 ainsi que pour les législatives de juin 2007. Ne serait-il pas la partie visible de tous ces déçus et/ou aigris qui rêvent de porter l’estocade à un système coincé dans un cul-de-sac ?

Le moins que l’on puisse constater, c’est que l’opposition au régime Compaoré se retrouve aujourd’hui dans la rue, non plus dans la peau de militants de partis politiques et des syndicalistes mais de jeunes gens cagoulés qui brûlent, cassent les biens publics et font des pillages ciblés de biens privés de certains barrons du régime. Clément Sawadogo, le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, et d’autres bonzes du CDP ont vite fait d’emboucher la trompette de la manipulation. Mais jusque-là, personne n’a osé citer de noms de manipulateurs. Pendant ce temps, la justice accélère les procédures et condamne à tour de bras les fameux vandales. Jeté en prison pour « des propos séditieux » - selon les termes du ministre de la Sécurité -, Nana Thibaut peut se targuer d’être le « martyr » de la lutte contre la vie chère. Des jeunes ne se sont d’ailleurs pas fait prier pour exiger la libération de ce type devenu un « opposant de la rue » par la force des choses. Et pourtant, les réformes politiques qui étaient supposées être engagées suite à la crise sociopolitique consécutive au drame de Sapouy visaient à formater une opposition républicaine, qui ne fait plus de la rue son lieu d’expression de prédilection. A qui la faute, si la violence et les actes de vandalisme demeurent toujours le seul langage qui fait mouvoir l’appareil d’État ?

S’il est vrai que le Burkina n’a que le régime qu’il mérite, il ne l’est pas moins que le giga-parti a secrété une opposition de rue qui est devenue un véritable fantôme qui perturbe le sommeil de ses plus hauts dirigeants. Tout porte à croire que le réveil est difficile. Touchons du bois que le Dr Honoré, chef suprême de toutes les armées militaires, civiles et politiques saura se réveiller de son sommeil chronique pour mettre de l’ordre dans tout ça.

A. Houédraogo

Journal du jeudi

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