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APE : "Un accord de libre échange et non un plan de sauvetage de l’Afrique"

Publié le mardi 29 janvier 2008 à 11h26min

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Les Accords de partenariat économique (APE) que l’Union européenne veut signer avec l’Afrique continuent de susciter des débats. Dans les lignes qui suivent, Mme Clémentine Ouédraogo, membre de la Cellule nationale de suivi des négociations APE qualifie les accords de libre échange et appelle à la mobilisation continue jusqu’à la signature d’un accord gagnant gagnant ou tout simplement l’arrêt des négociations.

Le commerce est un moyen d’échange de biens et services. L’avantage majeur de sa codification est l’harmonisation qui permet de sécuriser à la fois le producteur et le consommateur.

Il convient donc de se réjouir de l’existence de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), en dépit de ses imperfections.

Les accords commerciaux en négociation actuellement entre l’Union européenne et les six régions parties au processus est d’une logique nouvelle et surprenante : il s’agit de développer ces régions… par le commerce de leurs produits quasi inexistants ! En effet, l’on cherche en vain ce que les pays de l’espace CEDEAO pourraient proposer aux pays de l’Union européenne. Eventuellement le cacao, le café et la banane pourraient se vendre pendant deux ou trois ans, à des prix fixés par l’acheteur, comme pour le cas du coton, si les consommateurs de là-bas, bien organisés, le permettent.

L’Union européenne, à l’évidence, a décidé d’engager une guerre économique contre le géant asiatique et, comme toujours, ce sont les Africains qui devront en payer le prix. Ce que le commissaire européen au développement tenait à faire signer avant le 31 décembre 2007 n’est pas un plan de sauvetage de l’Afrique, mais un accord de libre échange. L’argument de la faillite de la clause préférentielle de l’Accord de Cotonou ne résiste évidemment pas à l’analyse : "Puisque tu ne t’es pas épanoui en vendant librement sur mon territoire, mon ami, tu paieras désormais pour y vendre". Il en est de même pour ce qui est de la nécessité de se conformer aux règles de l’OMC : d’une part les questions en suspens depuis l’arrêt du cycle de Doha n’ont pas encore été tranchées et, d’autre part, l’AGOA nous édifie quant aux dérogations admises à l’OMC.

Le fait de morceler l’Afrique en régions de négociation et de prendre actuellement isolément les pays dits non PMA au collet pour les faire signer est assez révélateur de la perception des négociateurs de l’Union européenne du partenariat. Cela met à mal le processus d’intégration africaine et un accord suicidaire mettra à mal la stabilité politique en Afrique.

La société civile africaine a rejeté les accords proposés par l’Union européenne. Par ses actions multiformes, elle a alerté l’opinion publique sur ce qui se trame. Comme elle vient de le démontrer encore une fois récemment en Afrique et à Bruxelles, elle entend rester vigilante. Le plaidoyer qu’elle a engagé auprès des décideurs africains a produit des résultats relativement satisfaisants, au regard de l’engagement de certains chefs d’Etat et hautes personnalités. La mobilisation doit continuer, jusqu’à la signature d’un accord gagnant gagnant ou de l’arrêt des négociations.

La société civile du Burkina n’a pas été en reste dans cette mobilisation, tant au niveau national que régional. Au plan national, des marches, des pétitions, des conférences de presse, des ateliers, des émissions télévisuelles et radiodiffusées, à l’initiative d’acteurs majeurs tels la CPF, RECIF/ONG, le SPONG, le ROPPA, le SEDELAN, INADES-Formation, ORCADE, la LCB, l’AJAD ont permis d’engager la réflexion sur la question et de proposer des alternatives. Il est souhaitable que les différents acteurs de cette société civile réalisent l’unité d’action, pour une meilleure visibilité de leur engagement.

Mme Clémentine OUEDRAOGO

Présidente du Conseil d’administration du SPONG

Membre de la Cellule nationale de suivi des négociations APE

Officier de l’Ordre du mérite burkinabè

Le Pays

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