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Accords de partenariat économique (APE) : Et si l’Afrique disait non pour une fois ?

Publié le lundi 31 décembre 2007 à 11h52min

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L’Organisation mondiale du commerce (OMC) attend à la date butoir du 31 décembre qu’Africains et Européens s’entendent sur les nouveaux Accords de partenariat économique (APE) qui vont régir leurs rapports commerciaux pour les années à venir.

A l’exception de la Côte d’Ivoire et du Ghana qui les ont paraphés, les pays africains dans leur ensemble ne semblent pas enthousiasmés et même qu’ils ne se gênent pas d’afficher leur opposition à ces accords tels que voulus par l’ex-puissance colonisatrice. C’est justement ce qui dérange les Africains parce que ces accords tels qu’ils ont été élaborés sont loin d’être des accords de partenariat économique. Ils se présentent plutôt comme un rapport de force où l’Europe, puissance dominatrice décide de ce qui est bien pour l’Afrique et lui dicte la voie à suivre pour aller à son développement.

En termes clairs, l’Europe entend imposer aux pays africains qui vivent pour la plupart des ressources douanières le libre-échange. Il s’agit pour nos pays d’ouvrir leurs frontières aux produits européens. La conséquence directe de cette exigence sera la désagrégation pure et simple du tissu économique africain avec son corollaire de mise au chômage de millions de travailleurs. Mais l’Union européenne sait bien que ce qu’elle demande est loin d’être juste. Et les compensations qu’elle suggère le disent si bien que les Africains plus que jamais, n’entendent pas engager les négociations avec fausse pudeur ou narcissisme.

Que se passera-t-il alors le 31 décembre prochain ?

Certains commissaires européens prétendent que les gouvernements africains étaient prévenus des changements qui devraient intervenir dans le renouvellement des Accords. Mais ces propos manquent de conviction et ne sauraient accabler les chefs d’Etat africains qui n’étaient informés outre mesure du contenu de ces changements. Malgré tout, l’on s’étonne qu’aujourd’hui l’Afrique ne soit pas prête. Et l’on va même jusqu’à brandir la menace de sanctions au cas où. C’est tout dire.

Etant entendu que les gouvernements africains sont fortement dépendants des financements de l’Union européenne, leur pouvoir de négociation est réduit à nul. Mais il s’agit ici de faire preuve de courage et de faire face à la situation avec pragmatisme et détermination. Les organisations des producteurs plus libres, se permettent en tous les cas de donner de la voix en Afrique comme en Europe pour dire non aux APE.
L’événement majeur qui aura marqué cette fin d’année au plan continental reste sans contexte les négociations des APE de par les mobilisations tous azimuts qu’elles ont entraînées.

Cela a eu l’avantage d’amener certains africains à reconsidérer leur position sur les grands projets fédérateurs et panafricanistes et de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer notre manque d’imagination et d’organisation. Beaucoup de personnalités politiques africaines aujourd’hui non seulement mesurent l’ampleur et l’urgence de la situation mais aussi osent certains sacrifices alors que jusque-là, il était difficile d’y penser. Nous voulons pour preuve la mise récente sur orbite du satellite africain. C’est un précédent dans l’histoire africaine en même temps qu’il constitue un signal fort.

L’Afrique "scandale géologique", demeure encore le continent du sous-développement et de la pauvreté la plus crasse, du SIDA et du paludisme, des génocides et des rébellions parce que tout simplement certaines personnalités ont manqué du "culot" pour dire non en des situations qui pourtant l’exigeaient. Que de heurts, que d’humiliations nous avons subis ! Il est donc temps aujourd’hui de prendre la bonne décision. C’est pourquoi nos autorités politiques à la suite des organisations des producteurs ainsi que des parlementaires Ouest-africains se doivent de réserver un refus cinglant aux APE. Mais il faut se raviser que l’Europe ne tient pas à perdre une seule fois la face dans une confrontation avec l’Afrique. A coup sûr, elle tentera de trouver un compromis. A propos, l’on parle de plus en plus d’accord-cadre en attendant de poursuivre les négociations sur la question des produits sensibles.

Il convient de retenir qu’aujourd’hui au plan mondial, de nouvelles forces se dessinent au gré de la montée de la Chine et de l’émergence inattendue de l’Inde. De ce fait, l’Europe acculée et apeurée a besoin d’un nouveau souffle et l’Afrique s’avère la solution idéale pour permettre d’écouler le surplus de la production européenne. Que se passera-t-il si l’Afrique dit non et que l’Europe campe sur ses positions ?
Cette situation n’est pas envisageable et il vaut mieux même ne pas y penser car autrement, il est à craindre que des foyers de tensions se rallument sur le continent comme il en a été jusqu’à un passé très récent. Ainsi, pendant que l’Afrique sera de nouveau occupée à éteindre le feu, son partenaire économique, lui, sera occupé à autre chose. Dans ce contexte, les Africains ne pourront rien contre l’envahissement des produits étrangers surtout pas en ce qui concerne les armes.

Célestin BAKOUAN

Sidwaya

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