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Emancipation de la femme : Invitation à ne pas brûler les étapes

Publié le mercredi 26 décembre 2007 à 07h05min

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L’émancipation de la femme est au coeur de la réflexion de Yacouba H. S. Ouédraogo, agent de l’Action sociale. Il trouve qu’il y a une mauvaise ou une trop grande compréhension (c’est selon) de l’émancipation par certaines femmes. Et c’est la raison pour laquelle il invite à un recadrage, afin de ne pas brûler les étapes du processus.

Le 24 décembre 1949, en Côte d’Ivoire, près de quatre mille femmes se rassemblent autour de la prison de Grand -Bassam pour protester contre l’incarcération arbitraire de leurs maris, fils et frères, membres du RDA. Parties d’Abidjan, elles ont fait quarante kilomètres à pied en utilisant toutes sortes de ruses pour déjouer la police. Les affrontements sont violents : les forces de l’ordre utilisent des lances à eau pour refouler les manifestantes vers la lagune. Ce mouvement eut un grand retentissement et quelques mois plus tard une grande partie des détenues fut libérée.

Ce petit rappel nous permet de parler un tant soit peu des qualités de la femme (la vraie) et de nous inquiéter sur quelques aspects qui risquent de tromper beaucoup de femmes (si ce n’est déjà fait). La femme est symbole de vie et d’humanité," l’autre moitié du ciel". C’est celle-là qui nous donne la vie. C’est elle aussi qui guide nos premiers pas, nos premières actions. C’est toujours elle la première à se lever et la dernière à se coucher. C’est elle qui est le pilier permanent de la famille. Il suffit de constater les batailles quotidiennes de nos mères pour être d’accord avec le Premier ministre Son Excellence Monsieur Tertius Zongo lorsqu’il déclarait devant les députés que "Les femmes représentent la colonne vertébrale de notre nation". Il a d’ailleurs soulevé "leur immense contribution à notre passé et à notre avenir" à cette occasion et c’est tout dire. C’est une invite à placer la femme au cœur du développement dans toutes ses facettes et à bannir ce qu’on appelle désormais "les violences faites aux femmes". A moins d’être phallocrate, l’entreprise aux cotés des femmes est une tâche noble. Seulement voilà !

Mauvaise compréhension de l’émancipation de la femme

A notre humble avis, nous pensons très sincèrement que nos épouses et sœurs n’ont pas assez compris, ou du moins elles ont trop compris, la lutte pour l’émancipation de la femme. Mademoiselle X nous a lancé à la figure il y a quelques jours ses vœux les plus chers en ces termes : "Quand j’aurai mon boulot, et quand je me marierai, il appartiendra à mon mari de faire très attention parce qu’en réalité il est mon 2e époux après mon boulot. Il ne doit pas me marcher dessus parce qu’entre lui et moi..., on se commande". Notre tentative de lui opposer notre point de vue est restée vaine. Nous pensons qu’elles sont assez nombreuses à raisonner de la sorte. Nous avons voulu faire savoir à Mademoiselle X que la liberté de la femme doit être une réalité indéniable mais dans les règles de l’art. Quand déjà dans le discours imaginaire un éventuel foyer, le probable mari est déjà mis en garde, avouons qu’il y a un réel danger à l’horizon. L’émancipation, ce n’est guère être la championne d’une bataille conjugale. Bien au contraire. Nous pensons que les solides familles d’où nous sommes issus ne nous ont guère offert de tels spectacles.

Quand on parle d’émancipation, elle est loin de l’anticipation. Un ami de nos relations nous a confié un jour pourquoi il partait au service presqu’au chant du coq et ne revenait que tard la nuit. Il nous disait ceci : "Quand les collègues se réjouissent à l’heure de la descente pour retrouver femmes et enfants, c’est en ce moment que je cogite pour retrouver le point de chute du jour pour gérer la journée jusqu’à la nuit tombante. Quand la nuit annoncée je reprends le chemin du domicile, c’est comme si j’allais en Enfer". Entre deux soupirs, il lâcha cette phrase : "Elle m’a construit un paradis avant d’ériger les murs de mon enfer". Il a fallu que nous fassions le tour un jour en famille pour comprendre l’ampleur de son "drame conjugal."

Ce n’est pas réussir son foyer que de faire courir son mari tout le temps dans les rues. Ce n’est pas être une femme émancipée que de penser que cette émancipation viendra des torts qu’on infligera aux hommes. Cela nous fait rappeler cette conception ironique de la femme émancipée que le Journal Bendré dans sa livraison n°185 du lundi 27 mai 2002, traduit en ces termes : "La femme émancipée est celle là qui possède villa, argent et voiture. Une émancipée est celle-là qui se marie à 40 ans au plus tôt, qui compte au moins 4 enfants de pères différents, chacun de ces papas versant une pension alimentaire substantielle et déboursant follement d’autres sommes pour les fréquents "retours sur les lieux du crime". Une femme émancipée est celle-là qui travaille dans un bureau, qui, d’abord, arrive à porter chaque jour une tenue au coût 2 fois plus élevé que son salaire. Une femme émancipée est celle qui fait seulement la cuisine chaque 1er janvier, et qui licencie sa bonne quand elle refuse de laver les sous-vêtements de certains matins. Porter un pantalon "Jean 501" moulant ou une muni ¬jupe transparente serait sans équivoque un droit de femme émancipée. Une femme émancipée est celle-là qui avorte quand elle s’aperçoit que l’auteur de la grossesse n’est pas le "mogo¬ puissant" qu’elle croyait...".

Les mentalités pas encore à la hauteur

Ce constat ironique doit interpeller plus d’un quand on sait qu’au nom de l’émancipation, des femmes s’illustrent tristement dans ces genres de pratique. On chante souvent que nous sommes jeunes sur le plan démocratique. Malheureusement aussi, en 40 ans, il est suicidaire d’appliquer toute la littérature de droit de la femme car nos mentalités ne sont pas encore à la hauteur .

On nous rétorquera que c’est justement pour changer de mentalités que.... Mais entre nous, avouons que nous allons assez vite. Nous allons si vite que nous parlons assez fréquemment de droits de la femme, d’émancipation de la femme, mais nous parlons très peu des DEVOIRS de la femme. Le ministère de la Promotion de la femme devrait y penser.

Nous pensons que ce ministère doit être plus regardant sur certains faits et gestes des filles et femmes au lieu d’être toujours sur la défensive. Par exemple, pourquoi ne pas commencer des séances de sensibilisation sur la dépigmentation et autres ports de tenues qui portent atteinte à la pudeur.

Tout compte fait, c’est la fille d’aujourd’hui qui est inéluctablement la femme de demain. Nous avons le devoir de l’inculquer des valeurs de femme. Faisons halte et parlons un peu de l’instinct maternel qui est une denrée rare de nos jours. Avant, cet instinct pouvait amener la femme à opposer une farouche résistance face aux assauts les plus meurtriers lorsque la vie de son enfant (par exemple) est en jeu. Mais que constatons-nous aujourd’hui ? C’est cet instinct charnel qui prend le pas et qui pousse les filles à se débarrasser de leurs bébés au détour d’une rue. N’y a-t-il pas lieu de revenir sur certaines valeurs naturelles et élémentaires que doivent avoir les femmes avant de porter la robe de cette émancipation ? C’est vrai que ce n’est pas en buvant simplement de l’eau qu’un bébé qui est de trop peu survenir. Il faut des partenaires sexuels qui, souvent, sont indélicats. Mais ceci peut-il expliquer cela ? Bien sûr que non ! Si nous voulons vraiment promouvoir la femme, il nous appartiendra de cerner le rôle combien central et indispensable de la femme sans trop de superlatifs, sans trop d’incompréhensions et au rythme des mentalités. Si nous n’agissons pas prudemment, les femmes ne vont pas bien comprendre. Elles vont trop comprendre. Quand on comprend bien, on construit. Quand on comprend trop, on passe à côté. On n’échoue pas parce qu’on est ignorant. On échoue toujours parce qu’on croit connaître.

C’est dans le même registre que nous ne sommes pas trop d’accord avec la "discrimination positive" Aux yeux des gamins, on ne peut pas aisément comprendre pourquoi une disposition favorise un groupe au détriment d’un autre. Une discrimination n’est d’ailleurs jamais positive. Il faudrait qu’on réfléchisse à d’autres approches pour qu’un jour on ne nous invite pas à sauver des hommes en danger.

Avec beaucoup de précautions, la femme s’émancipera le sourire aux lèvres. L’honneur de "l’autre moitié du ciel" sera à ce prix. Enfin ! Ce n’est qu’un point de vue citoyen. Sans rancune !

Yacouba H-S Ouédraogo

Direction provinciale de l’Action sociale et de la Solidarité nationale du Yatenga

Le Pays

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