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Institutions républicaines : Le Parlement, un haut lieu du pouvoir

Publié le mardi 18 décembre 2007 à 08h47min

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"L’Assemblée nationale est-elle une institution nécessaire pour le Burkina Faso ? » Le député Mahama Sawadogo ose une réponse qui ne manquera pas de susciter d’autres réactions. Voilà une question récurrente depuis un certain temps dans notre pays et qui mérite une réponse à la hauteur de l’intérêt politique qui s’y rattache.

Les faits générateurs de cette question sont "le caractère budgétivore de l’institution parlementaire" et son "inefficacité dans l’accomplissement de ses missions constitutionnelles".

A travers les lignes qui suivent, nous n’envisageons nullement de réfuter ces appréciations à l’endroit de l’institution parlementaire, mais plutôt de démontrer (malgré tout) la nécessité du Parlement dans le paysage institutionnel burkinabè.

L’Assemblée a comme fonctions (connues de tous) la législation, le contrôle de l’action gouvernementale et le consentement de l’impôt. Au-delà de ces fonctions dites constitutionnelles, l’institution parlementaire en exerce bien d’autres. Il s’agit, pour ne citer que les plus importantes, de la fonction de légitimation et de celle de prise en compte du pluralisme, surtout politique, de la société.

La fonction de légitimation

Le consensus quasi planétaire sur la démocratie représentative comme système politique pertinent fait obligation aux différents pays de disposer d’un Parlement, qui est l’institution caractéristique du système démocratique, et cela, indépendamment de son efficacité fonctionnelle. Ceci pour dire qu’aujourd’hui, plus qu’hier, le Parlement légitime le régime d’un pays à l’intérieur comme à l’extérieur de ses frontières. De nombreuses situations politiques dans le monde attestent de cette réalité.

La fonction de prise en compte du pluralisme politique

La loi de la majorité gouverne le fonctionnement de la démocratie. Il résulte de ce fait une conséquence dangereuse pour le système politique. En effet, la minorité ne peut exiger d’être représentée au gouvernement, sauf dans des cas exceptionnels. Ces exceptions sont des conjonctures politiques extraordinaires qui sont des occasions de formation de gouvernements baptisés « d’union nationale », « de grande coalition », « protocolaire », etc.

Evidemment, il arrive qu’en dehors des situations exceptionnelles, des personnes issues ou proches de l’opposition soient nommées au gouvernement, mais ces nominations sont très souvent considérées comme relevant d’une tactique de débauchage par le pouvoir. Dès lors, il se pose la nécessité de trouver un cadre pour prendre légalement en compte l’opposition.

Manifestement, il n’y a pas de meilleur cadre de haut niveau, « après » le gouvernement, que le Parlement, qui permet d’associer la minorité à la majorité dans la participation politique.

Certes, le fait majoritaire contraint juridiquement l’opposition à s’incliner devant le vote de la majorité.

Toutefois, sa participation n’est pas sans effet positif dans la mesure où ses critiques, observations et suggestions ont nécessairement des influences sur le comportement du gouvernement et de la majorité gouvernementale qui, quelquefois, sont obligés, de manière visible ou masquée, de prendre en considération les propositions de l’opposition.

Par ailleurs, au Parlement l’opposition joue un rôle très important dans la formation de l’agenda politique, entendu dans le sens de « l’ensemble des problèmes perçus comme appelant un débat public, voire l’intervention des autorités politiques légitimes ».

La focalisation sur les activités législatives et de contrôle peut conduire à sous-estimer la place de l’Assemblée nationale dans le système politique, dans la mesure où elle ne remplit que modestement ces fonctions. Mais, si on tient compte des autres fonctions non explicites, l’on comprendrait mieux sa nécessité dans le paysage institutionnel du pays, l’on reconnaîtra que, somme toute, elle est le haut lieu du pouvoir après ou avant le gouvernement, et l’on relativiserait le caractère budgétivore de l’institution.

Mahama Sawadogo

Député

Le Pays

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