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Lièrmé Dieudonné Somé : Hommage à un confrère disparu

Publié le mardi 18 décembre 2007 à 08h19min

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Ainsi donc, l’enfant de Memer s’en est allé discrètement, dans cet au-delà qui nous appartient tous et pour lequel chacun attend son heure. Quel que soit son étirement dans la durée, a dit le philosophe, la vie de l’homme demeure éphémère.

Dieudonné, le bien nommé est parti à l’appel du Maître du temps, celui qui donne la vie et qui vient aussi la reprendre. Bien sûr, attachés que nous sommes aux choses d’ici-bas, nous aurions aimé qu’il restât encore avec nous, tant les défis à relever sont encore là, nombreux et pressants : Norbert Zongo et ses compagnons, injustement assassinés, dont il a repris l’écriteau afin de poursuivre son œuvre.

Que d’embuscades tendues sur le chemin de la vérité et de la justice ! Liermé s’en est allé à un moment où la soif de vérité et de justice est grande au sein du peuple dont les actions citoyennes se nourrissent des révélations des hommes de médias. Et sur ce terrain, l’histoire retiendra qu’il a apporté une contribution remarquable et cela jusqu’au bout, alors même qu’il était rongé par la maladie. Un ami commun me disait qu’il était allé le voir à son bureau pour le conseiller de prendre du recul et un peu de repos pour s’occuper de lui-même. Ce qui frappait chez lui, c’était son énergie au travail.

Nous animions L’Indépendant quand de retour des Pays-Bas, il vint nous proposer des piges. Son dynamisme était tel que nous décidâmes rapidement de l’intégrer pleinement à la rédaction. Le journal traversait alors une crise qui a vu le départ de David Sandwidi, celui-là même qui succéda à Norbert Zongo. Liermé a été tout de suite perçu comme l’homme du consensus au poste de directeur de publication. Avec lui, nous avions vécu des moments passionnants de ferveur au travail et produit de belles pages dans l’histoire de L’Indépendant.

Nous nous devons cependant de reconnaître que nous n’avions pas toujours été d’accord sur nombre de questions touchant aux normes et pratiques de la profession. Mais le plus important, c’était le fait d’en parler ; et sur ce point, Liermé était d’une sincérité et d’un franc parler remarquables. Par ce trait de caractère, il était très attachant. Je dois dire que cela a été de bon augure pour les rapports de confraternité, quand par la suite, nous avons dû quitter L’Indépendant pour nous consacrer au mensuel L’Evénement que nous venions de créer. Notre dernière conversation date du 22 août dernier. Liermé avait flairé un mauvais coup à la suite de la publication dans le quotidien Sidwaya de l’article sur la mésaventure de Newton à Lomé.

Au-delà de cette expérience confraternelle, Liermé pour moi, c’est le souvenir d’une autre expérience. Celle du jeune enseignant de philosophie que j’étais en 1981. Mon penchant pour la philosophie active rencontrait la fougue et la générosité d’un certain Liermé Dieudonné Somé, alors élève en Terminale D. Pas étonnant que l’effervescence qui a précédé la révolution du 4 Août ait fourni l’occasion d’intenses échanges entre nous. Le jeune élève était devenu étudiant à l’université de Ouagadougou. Parti par la suite en France pour y poursuivre ses études, j’appris qu’il fut victime de la répression CDR, aux yeux de qui, il passait pour être un populiste contre-révolutionnaire.

Nos destins étaient donc semblables, puisqu’au même moment, avec d’autres camarades enseignants, nous fûmes chassés de la Fonction publique pour " entrave à la marche radieuse de la révolution ". Le séjour à L’Indépendant était donc pour Liermé le prolongement de cette activité citoyenne qui lui valut tant de déboires. Son engagement n’avait d’égal que la flamme qui le dévorait, quand il était conscient d’être dans le vrai et le juste. En pareille circonstance, il se souciait très peu du détail, ce qui le conduisait parfois à des excès. Liermé était tout entier volontaire, quand d’autres sont plutôt invisibles.

Certes, le métier comporte des risques et exige une grande capacité de travail. Il en était parfaitement conscient et développait à cet égard un sens élevé de la responsabilité. L’Indépendant perd donc en lui un travailleur exceptionnel qui s’est toujours dépensé sans compter. Il s’en va à un moment où la profession s’active à réhabiliter ces valeurs positives qu’il a su incarner de son vivant, au moyen d’un instrument juridique approprié. Il ne pourra pas hélas bénéficier personnellement des retombées positives de ce cadre qu’il aura contribué à dessiner. Mais là où il se trouve, Liermé pourra s’en réjouir si la profession dans son ensemble y gagne. C’était le sens de son combat : valoriser le métier de journaliste en le sortant de la précarité.

Dans quelques jours, nous commémorerons le 9ème anniversaire de l’assassinat du fondateur de L’Indépendant. Nul doute que la figure de Liermé sera présente dans tous les esprits. Sa mort est une grande perte non seulement pour sa famille, mais aussi pour la grande famille de la presse ainsi que pour tous les militants du " pays réel ", habitués à sa silhouette dans les manifestations citoyennes. Il s’en est allé prendre la place qu’il mérite, au panthéon des héros de la lutte contre l’impunité et pour la démocratie. Qu’il repose en paix n

Germain Bitiou Nama

L’Evénement

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Vos commentaires

  • Le 18 décembre 2007 à 22:48, par Aubs En réponse à : Lièrmé Dieudonné Somé : Hommage à un confrère disparu

    Merci a cet hommage rendu a un vaillant defenseur des droits humains.Immortels sont ceux qui devouent leur vie a la defenses de nobles cause.Leur nom restera a jamais grave dans le coeur et dans l’esprits des hommes.Vivent que d’autres suivent ton exemple et ta devotion.Repose en paix.

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