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Style Tertius Zongo : Baisse de régime ou plus de planification ?

Publié le mercredi 21 novembre 2007 à 18h54min

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Tertius Zongo et Roch Kaboré

Nommé en juin 2007, Tertius Zongo est depuis lors Premier ministre et chef du gouvernement du Burkina. On se rappelle que dès le lendemain de sa nomination, on l’a vu visitant les installations hydroélectriques et les aménagements agricoles de Bagré. On l’a également vu rencontrant la société civile, le secteur privé. Tout cela en l’espace de peu de temps et surtout en parlant de façon franche, directe et décapante à ses interlocuteurs.

Aujourd’hui, seulement six mois se sont écoulés depuis la date de sa nomination, mais, déjà, au sein de l’opinion, certains susurrent que le chef du gouvernement éprouve quelques difficultés à maintenir le rythme qu’il avait imprimé à l’action gouvernementale au lendemain de sa prise de fonction.

Certains compartiments du nid de mouche maçonne qu’est le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) lui mèneraient la vie dure et ceci expliquerait cela. Ces rumeurs dont Ouagadougou bruisse ne sont certainement pas nouvelles.

En effet, elles sont devenues seulement récurrentes depuis quelque temps et témoignent quelque part de l’esprit, a bien des égards, négatif des Burkinabè : quand un individu, une autorité, un groupe d’individus font preuve de hardiesse, de dynamisme en ce qu’ils bousculent les mauvaises habitudes, et enregistrent (ne serait-ce que) quelques succès, ils attirent sur eux la convoitise et le dédain de ceux qui n’y parviennent pas ; soit parce qu’ils ne peuvent pas, soit parce que, bien que potentiellement capables, ils n’ont pas suffisamment confiance en eux-mêmes. Cette incapacité et ce défaitisme se muent pratiquement en jalousie et même en haine vis-à-vis de l’autre.

Quand on estime que ces personnes porteuses de progrès (du fait de leur hardiesse et de leur dynamisme) sont en baisse de forme et sont moins dynamiques ou lorsqu’elles perdent leur position, ou encore quand leurs affaires marchent moins, bien, voilà ceux qui les jalousaient hier tenir des propos du genre : "On savait que cela se terminerait ainsi malheureusement, on ne pouvait pas le dire pour qu’on ne nous traite pas de jalouses".

Et c’est pratiquement le même discours qui est appliqué à tous ceux qui osent porter en eux les germes de progrès comme si personne, au sein de la société, ne devait oser pour vaincre la fatalité du moment où "on sait comment ça va se terminer". Prophétie de malheur s’il en est.

Relayer la rumeur a-t-il vraiment un intérêt ?

Ces rumeurs autour de l’action du Premier ministre ne mériteraient pas qu’on s’y attarde si l’intention était tout juste de les relayer, de les propager. Du reste, elles n’ont même pas besoin de nous pour le faire, car du fait que la rumeur est, selon un auteur comme Jean-Noël Kapferer, "le plus vieux média du monde", elle a ses méthodes propres de création, de collecte, de traitement et de diffusion de l’"information".

Ici, le souci est d’émettre, dans cette rubrique qui est une chronique, un point de vue, car en tant que chronique, elle doit s’intéresser aussi à tout ce qui défraie la chronique dans la cité. En outre, c’est parce que contrairement à ce que l’on croit, la rumeur peut être un crime par personnes interposées, un crime parfait, car sans traces, sans armes (parfois) et sans preuves.

Au Burkina, la chaîne des maquis Kundé, qui en ont fait les frais, ne s’est pas encore tout à fait relevée. Parfois, elle en arrive à tuer : les ministres français Roger Salengro et Robert Boulin se suicidèrent, l’un en 1936 et l’autre en 1979, à la suite d’une campagne et de rumeurs insupportables. Plus près de nous, en mai 1993, le suicide de Pierre Bénégovoy, ancien Premier ministre français a été, en partie, le fait de la rumeur.

Où se trouve donc la vérité ?

Question moins difficile à poser que d’y trouver des réponses. Dire que Tertius Zongo n’est pas quelque peu épuisé par six mois d’intense activité, nous exposerait à l’erreur tout comme si nous affirmions le contraire dans la mesure où nous ne sommes ni son médecin ni un de ses proches. Toutefois, il est avéré qu’humainement parlant, personne ne peut être permanemment à l’offensive.

Mais le "surhomme" Nicolas Sarkozy, président français, trouve des astuces pour prendre du répit tout en donnant l’impression de demeurer sur le terrain par le biais de la scène médiatique.

Par voie de conséquence, il semble tout à fait indiqué pour le chef du gouvernement de donner l’air d’être absent plutôt que de faire de la surcommunication qui peut se révéler être de la sous-communication tant les effets négatifs de l’une peut ressembler à ceux de l’autre.

Seulement, au regard de ce qui se passe, T. Zongo semble n’avoir pas varié. Effectivement, si l’on le voit moins et si l’on l’entend moins à travers les médias, son discours et ses apparitions innovantes sont constants : on l’a vu accompagner ses ministres à l’Assemblée nationale (chose inédite) par respect pour les élus et par souci de soutenir les membres de son équipe.

Si les précédents chefs de gouvernement ont laissé leurs ministres aller se démêler tout seuls, ce n’était pourtant pas par irrespect vis-à-vis de l’auguste Assemblée nationale ou un lâchage de leurs ouailles. C’était comme le disait quelqu’un pour les laisser expérimenter les dures péripéties de l’apprentissage, de la représentation et de la responsabilité. Ce qui était tant aussi une bonne chose.

On l’a aussi vu à la rencontre avec les syndicats. Dans un environnement économique et social de plus en plus difficile et insupportable pour les salariés, ce genre de geste est un symbole fort. Effectivement, à défaut de pouvoir résoudre tous les problèmes, les salariés attendent au moins des autorités politiques et du patronat le respect, et cela en est un signe.

En somme, la posture actuelle de T. Zongo semble relever de la planification de ses actions, de ses propos et de ses apparitions pour ne pas pêcher par excès ou par défaut. Seulement pourra-t-il y demeurer pendant longtemps ? L’avenir nous le dira.

Zoodonoma Kafando

L’Observateur

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