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Suppression de la carte de séjour en Côte d’Ivoire : Un aspect d’accords secrets entre Blaise et Gbagbo ?

Publié le mercredi 31 octobre 2007 à 07h16min

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Tout le monde le sait, Koudou Laurent Gbagbo, le président ivoirien, a décidé de supprimer d’ici à deux semaines la carte de séjour dont devaient se munir les millions d’étrangers (surtout de Burkinabè) pour résider en Côte d’Ivoire. A n’en pas douter, c’est un acte d’une importance indiscutable tant cette carte avait été décriée par ces étrangers et par les responsables des pays dont ils sont les ressortissants.

Koudou Laurent Gbagbo a frappé un grand coup. Il a également fait preuve d’humanisme, de compréhension, d’altruisme et de sacrifice. S’il n’est nullement besoin de revenir sur l’humanisme, la compréhension et l’altruisme de l’acte car ces qualités sont évidentes, il n’en est pas de même pour le sacrifice. C’est pourquoi, pour lever juste un coin du voile, on peut dire que le manque à gagner pour le budget ivoirien se chiffre à des milliards de francs CFA.

Il est donc à prévoir la recherche de ressources additionnelles pour combler le gap et c’est là le sacrifice.

Certes, on peut penser que la Côte d’Ivoire est suffisamment riche pour se passer de ces recettes ; mais c’est se tromper car l’humain est fait de telle sorte que plus il en a, plus il en veuille. En outre, sur un plan purement comptable, ce n’est pas beau de voir des ressources se volatiser sans que l’on sache, pour l’instant, comment combler le déficit.

Par ailleurs, on peut se laisser convaincre que ce geste de bonne volonté du numéro 1 ivoirien sera récompensé par la communauté internationale par des subventions. Cependant, avant que ces subventions soient réalité (à supposer que le principe ait recueilli l’assentiment des partenaires au développement), il va falloir que la Côte d’Ivoire améliore sa gouvernance politique, démocratique et économique. Autrement dit, cela risque de prendre du temps.

Pourquoi avoir pris autant de risque ?

Alors, on peut se demander pourquoi le président ivoirien a pris autant de risque sans être sûr qu’il sera récompensé à la hauteur de l’acte ainsi posé. Pire, en dépit de cette décision, le Conseil de sécurité de l’ONU (dont le Burkina est membre non permanent) a voté à l’unanimité la reconduction, pour six mois encore, des sanctions qui frappent la Côte d’Ivoire. On perd forcément son latin face à cette situation.

C’est pourquoi, l’on est fondé à croire que derrière les aspects officiels des accords de Ouagadougou, il y a des accords officieux (mais non moins importants) qui engagent le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire. Sinon comment comprendre qu’au moment où Koudou Laurent Gbagbo signe l’arrêt de mort de la carte de séjour en Côte d’Ivoire, le Burkina vote pour la reconduction des sanctions qui frappent ce pays alors qu’il aurait pu observer le service minimum en s’abstenant ?

Un autre élément qui fait que l’hypothèse des accords secrets est plausible, c’est qu’il est inimaginable qu’un chef d’Etat (et particulièrement Blaise Compaoré) œuvre à ramener la paix dans un pays frère où il compte des millions de compatriotes sans poser des conditions visant à favoriser le bien-être de ses compatriotes là-bas. Qui a dit qu’en lieu et place des amis, les nations ont autre chose que des intérêts ?

Est-ce là le seul élément de ces accords secrets ?

• La suppression de la carte de séjour est-elle la seule condition posée par Blaise Compaoré ? Il est permis d’en douter ! Est-ce la seule condition acceptée par Koudou Laurent Gbagbo ? Rien n’est moins sûr !

Les autres points de ces accords pourraient être l’indemnisation des victimes (ou de leurs ayants droit) de la guerre et des violences politiques, la question des créances d’entreprises burkinabè ou de citoyens burkinabè compromises en Côte d’Ivoire et le règlement définitif des problèmes liés au foncier rural.

En retour, il y a lieu de s’interroger sur ce que Blaise Compaoré donne à Koudou Laurent Gbagbo ou plutôt de se demander ce que ce dernier voit comme parti à tirer de cette situation : si le président burkinabè peut le parrainer afin qu’il se construise une stature internationale, le nombre non négligeable de Burkinabè naturalisés ivoiriens peuvent constituer une base électorale supplémentaire inattendue pour l’enfant de Mama. Comme quoi en politique, il faut penser à tout ou au maximum du maximum.

Reste à savoir maintenant si ces actions suffiront à les convaincre de voter FPI. Le charme de la démocratie, c’est qu’il n’y a pas nécessairement une relation de cause à effet entre les nobles actes que l’on pose et le choix de l’électorat.

Le bien le plus précieux : la paix

En échange de la réconciliation avec Blaise Compaoré et de l’implication de celui-ci dans la résolution de la crise ivoirienne, le chef de l’Etat ivoirien obtient la paix, car l’influence de son "frère et ami Blaise" sur les rebelles devenus plus tard Forces nouvelles ne s’est jamais démentie. De cette paix, la sous-région en profitera. Cela étant, le président ivoirien a joué sa partition quelles que soient les motivations qui sous-tendent ou qui peuvent sous-tendre ce brusque accès de générosité. Il revient aux communautés étrangères (avec les Burkinabè en tête) de jouer la leur.

En effet, si l’écrasante majorité des hommes et femmes qui les composent ne cherchent qu’à vivre en paix dans le respect des lois ivoiriennes, une minorité faite de brigands de grand chemin, de braqueurs, d’escrocs et de hors-la-loi de tous genres jette l’opprobre sur ces paisibles personnes et rend tout le monde suspect avec les abus que l’on peut imaginer de la part des forces de défense et de sécurité. "Il n’y a pas de bons et de mauvais pays, dit-on. Il n’y a que la manière de résider dans un pays qui le rend bon ou mauvais".

Z. K.

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