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Forum sur la bonne gouvernance : Rien que du réchauffé !

Publié le lundi 29 octobre 2007 à 08h17min

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Ouagadougou a abrité, du 24 au 26 octobre, une rencontre internationale de haut niveau consacrée à la bonne gouvernance. Il s’agissait du 7e Forum africain sur la question. Organisée sous l’égide du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), cette session avait pour thème « Renforcer la capacité de l’Etat en Afrique ».

A cette occasion, pas moins de 11 recommandations ont été faites, notamment en ce qui concerne la gouvernance politique et économique, la décentralisation et, bien sûr, le renforcement de l’intégrité morale et des capacités.

Il y a exactement 11 ans, le sujet était déjà d’actualité, cette fois dans le cadre du 19e sommet France-Afrique tenu dans notre capitale sur le thème « Bonne gouvernance et développement ».

Depuis, ce nouveau vocable est sur toutes les lèvres sans que personne sache exactement ce qu’il renferme. Cette année encore, chefs d’Etat, premiers ministres, membres de gouvernements, fonctionnaires internationaux et « développeurs professionnels » ont disserté à volonté sur le sujet.

Mais une chose est de partager avec ses pairs son expérience de gouvernant ou d’expert, à travers discours, rapports et communications réactualisés au fur et à mesure des rencontres, une autre est de s’inscrire véritablement dans une démarche constructive.

Or là est le véritable nœud du problème. D’abord, les organisateurs se soucient parfois plus de leurs per diems que d’autre chose. Ensuite, les promesses et les bonnes résolutions sont, aussitôt les lampions éteints, rangées dans les placards, dans l’attente du prochain forum ou colloque. Car force est de reconnaître que d’un meeting à l’autre, les choses ne changent pas véritablement...en tout cas, pas dans le bon sens.

Dans nos Etats en effet, la vertu de la transparence n’est pas la mieux partagée. Il faut plutôt compter avec une race de prédateurs qui luttent davantage contre leur propre pauvreté que contre celle de leurs concitoyens.

A cet ingrédient s’ajoute celui de la corruption endémique qui gangrène le tissu économique ainsi que toutes les classes sociales et dont on ne semble pas se préoccuper outre mesure, si ce n’est que par la tenue de séminaires ou la création de « machins » de lutte contre la fraude, histoire de se donner bonne conscience.

Et pour couronner le tout, on ne manquera pas de faire mention du train de vie dispendieux de nos Etats dont les premiers responsables ne se privent de rien et surtout pas du meilleur, se complaisant dans des dépenses somptuaires quand le gros de la troupe a du mal à joindre les deux bouts.

Le sombre tableau des réalités africaines ainsi dépeint, on ne peut que désespérer de ce continent où les gouvernants semblent davantage occupés à assurer leurs arrières qu’à développer leurs pays.

Alors qu’est-ce donc que la bonne gouvernance ? Des mots, rien que des mots censés guérir nos maux. Et de ces maux ils se fichent comme de l’an 40 avec hélas, la complicité de partenaires au développement bien conscients, pour leur part, des intérêts qu’ils défendent.

Qui ne se souvient de l’affaire Elf qui avait révélé un vaste enchevêtrement politico-financier dont les ramifications allaient jusqu’en Afrique. Pour protéger les intérêts de la multinationale, les autorités françaises d’alors n’avaient pas hésité à soutenir certains régimes parmi les moins attachés aux vertus de la démocratie.

Quelques années plus tard, à Ouagadougou, Jacques Chirac affirmera, comme pour gommer les vestiges de cette françafrique, que « la bonne gouvernance est devenue la condition même du développement.

Un impératif absolu qui s’impose tant aux bailleurs de fonds qu’aux pays aidés » Depuis, les forums et leurs déclarations de bonne intention n’ont cessé de se succéder, sans que sur le terrain des réalisations, les choses aient véritablement évolué.

Les années passent et les Africains, qui avaient placé leurs espoirs dans ce concept novateur, doivent se contenter d’un plat devenu insipide à force d’être réchauffé.

L’Observateur Paalga


L’article 37 s’invite sur la table de Blaise

Le 7e Forum africain sur la gouvernance s’est terminé comme il avait démarré : en grandes pompes, surtout avec la présence de deux chefs d’Etat. Et pour sacrifier à la tradition, il a accouché de 11 recommandations sur la bonne gouvernance qui viennent s’ajouter aux anciennes exhortations faites pendant les six précédentes rencontres du genre. Mais le petit grain de sel de la rencontre, c’est pendant la cérémonie de clôture, quand deux participants ont évoqué la nécessité de la limitation des mandats présidentiels devant Blaise et Kagamé.

Finalement le Forum africain sur la bonne gouvernance n’a reçu que deux chefs d’Etat. Celui du pays organisateur naturellement et l’homme mince des Grands Lacs, Paul Kagamé du Rwanda. Calendrier trop chargé pour les uns ou désintérêt de la bonne gouvernance pour les autres ? On ne le sait trop. En tout cas, l’on se perd en conjectures face à l’absence de nos dirigeants africains qui ne peuvent prononcer une phrase sans y mettre l’expression fétiche « bonne gouvernance ».

D’ailleurs, l’on peut, au risque d’être traité d’oiseau de mauvais augure, spéculer que Paul Kagamé, qui a été l’hôte du sommet précédent a voulu simplement rendre la politesse à son homologue du Burkina Faso. N’empêche, les 32 délégations (dont quelques-unes de rang ministériel) et les représentants d’une quinzaine d’institutions ont répondu présent dans la capitale du Pays des hommes intègres.

Après trois jours de communion, les 300 participants ont accouché d’un gros bébé, un gros trousseau de recommandations qui ressemble fort bien aux autres enfantés pendant les six précédentes rencontres. Il serait fastidieux et ennuyeux d’énumérer ici ces exhortations au nombre de 11, tant elles donnent une impression de déjà vu et de déjà entendu.

Mais elles tournent autour de la redéfinition du rôle de l’Etat, du renforcement de la capacité institutionnelle, de la légitimité de l’Etat et de ses dirigeants, du renforcement de l’intégration économique régionale et de la capacité des acteurs non étatiques, de l’amélioration de la gouvernance locale, etc. Le plus sérieusement du monde, les invités à la table de la bonne gouvernance n’ont pas manqué dans une de leurs recommandations de prier « les partenaires techniques et financiers à accroître l’aide publique au développement, en tant que moyen supplémentaire nécessaire aux Etats africains pour entreprendre les réformes indispensables ».

La petite pincée de sel de la rencontre

Avant que le principal hôte serve aux participants la conventionnelle formule « Bon retour dans vos familles respectives », ces derniers ont eu le privilège de faire quelques suggestions et surtout de poser des questions aux deux dirigeants présents à la cérémonie de clôture. Dans la rangée suggestions, une dame du Sénégal, membre du réseau des femmes d’affaires du Sénégal, a interpellé les chefs d’Etat sur la nécessité de l’utilisation des matériaux locaux, notamment le bois qui fait profusion en Afrique centrale plutôt que d’importer des meubles des pays asiatiques chers pour orner les salles.

Avant de passer la parole à son voisin de droite, voici le début de réponse d’un Blaise Compaoré souriant, qui ne se sentait pas spécialement concerné par la question : « Comme mon pays n’a même pas de ressources naturelles... ». Une autre intervenante, de nationalité ougandaise et membre du Parlement de son pays, mettra sur le tapis l’épineuse question(1) de la limitation des mandats présidentiels pour une meilleure gouvernance en Afrique.

Comme pour banaliser la question, le président du Burkina a commencé par une touche ironique, faisant rire l’assistance : « Moi j’ai 20 ans et quelques jours... je ne sais pas pour mon homologue du Rwanda ... mais je pense que la principale préoccupation des peuples, c’est de se demander si les dirigeants qui les gouvernent les conduisent vers le bien-être ». Après cette réaction quelque peu laconique, viendra, à la rescousse de la dame qui a été la première à poser le problème, un autre intervenant qui est camerounais. « C’est évident que la limitation des mandats présidentiels, c’est comme la limitation des naissances pour une femme. Si une femme persiste à accoucher jusqu’à un âge avancé, elle risque de mettre au monde des mort-nés ».

Issa K. Barry

(1) Pour les Burkinabè que nous sommes, cette question remet sur le tapis l’article 37 de notre Constitution qui a fait et continue de faire l’objet d’un sérieux débat juridico-politique. L’article 37 de la Constitution burkinabè stipule que "le président du Faso est élu pour cinq ans au suffrage universel direct, égal et secret.

Il est rééligible une seule fois". Avant d’être modifié en avril 2000, l’article 37 stipulait que "le président du Faso est élu pour sept ans au suffrage universel direct, égal et secret. Il est rééligible une seule fois". Les partisans du chef de l’Etat estiment que le nouvel article 37 ne peut s’appliquer à Compaoré que si ce dernier accomplit deux mandats de cinq ans et ce, à compter de l’élection qui a eu lieu en 2005.

Pour l’opposition, c’est un autre son de cloche : l’article 37 "interdit à toute personne ayant effectué deux mandats successifs de cinq ans de se présenter, a fortiori une personne ayant déjà effectué deux mandats successifs de sept ans". Ceux-ci soutiennent qu’en conséquence, la candidature du président Blaise Compaoré devrait être écartée, car ce dernier a cumulé quatorze ans (de 92 à 2005) comme président et ce, sans interruption.

Observateur Paalga

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