LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

15 octobre 1987 - 15 octobre 2007 : Si les Burkinabè pouvaient regarder ensemble vers l’avenir

Publié le lundi 22 octobre 2007 à 07h27min

PARTAGER :                          

Il y a vingt ans que le Burkina Faso a connu la rectification et en même temps la disparition du capitaine Thomas Sankara. Depuis, beaucoup de choses ont été dites et redites sur les circonstances de sa disparition. Le 15 octobre 1987 a été douloureux pour notre pays si bien que plusieurs actions sont entreprises pour immortaliser son œuvre à la tête de notre pays, il y a de cela 20 ans.

Mais ce qui est dramatique, choquant, c’est le fait d’instrumentaliser cette mort à des fins inavouables. L’histoire du Burkina Faso, ni son président et encore moins son avenir ne peuvent se réduire en un seul événement, fut-il dramatique. C’est le président Thomas Sankara lui-même qui le disait.

Blaise Compaoré, le président de tous les Burkinabè sans exclusive. La veuve de feu le président Thomas Sankara, Mariam Sankara est rentrée au Burkina à l’occasion de la célébration des 20 ans du décès de son mari. Il faut le dire, Sankara mobilise toujours du monde. Les jeunes Burkinabè assoiffés de découvrir l’histoire de Sankara qu’ils connaissent seulement à travers les livres veulent bien connaître l’homme. Cela est normal. Le président du CNR est présenté comme un héros, le héros de la révolution, personne ne peut dire le contraire, parce qu’il a marqué le Burkina d’une pierre blanche. Son passage à la tête du pays a permis au Burkina d’avoir une prise de conscience par rapport à son avenir. Mais la révolution a connu des erreurs et cela a abouti au 15 octobre 1987 avec l’avènement du mouvement de la rectification qui a conduit le pays sur le chemin de la démocratie.

Mariam Sankara et autres ayants droit, ayant revendiqué plusieurs années durant la reconstitution des faits sur les circonstances de la mort du président du CNR le 15 octobre 1987 ont posé une plainte devant les instances onusiennes. Tout d’abord, il convient de souligner qu’avant que le dossier Thomas Sankara ne parvienne entre les mains des juridictions internationales, à savoir le Comité des droits de l’Homme de l’ONU, les juridictions burkinabè n’avaient jamais refusé de s’en saisir. Tout au plus, peut-on noter que les juridictions civiles s’étaient déclarées incompétentes du fait de la nature de l’affaire et de la qualité des protagonistes, tous militaires, même si des civils y avaient perdu la vie.

Seules les juridictions militaires pouvaient donc connaître de cette affaire et on était dans cette attente, le ministre de la Défense n’ayant jusque-là pas été saisi du dossier, tel qu’il était ressorti dans les propos qu’ils avaient tenus. Que le Collectif juridique de la campagne justice pour Thomas Sankara ait fait fi de cette réalité pour saisir le Comité des droits de l’Homme de l’ONU relève d’une fébrilité suspecte et d’une volonté de diaboliser les tenants de la IVe République. Le Burkina a eu le mérite de ratifier le 04 janvier 1989, le pacte international relatif aux droits civils et politiques qui fondent l’essence même de ce Comité. Au pays des Hommes intègres, on ne voudrait pas faire les choses à moitié. Selon le verdict du Comité saisi par les ayants droit, il y aurait eu dans le dénouement de la crise interne au Conseil national de la révolution violation de droits civils et politiques. Faut-il le rappeler, les droits civils et politiques de l’époque se résumaient à un manichéisme forcené, aujourd’hui dénoncé par la Communauté internationale.

La démocratie sous la révolution admettait le droit à la parole pour les adhérents à la cause et celui de se terrer pour les non-adhérents, alors dénommés les réactionnaires. On peut admettre que sur un plan humanitaire, on lève la chape de plomb qui pèse sur cette période trouble de notre histoire. Du reste, le gouvernement était engagé à donner une suite appropriée à cette décision du Comité. C’est dire que le dossier Thomas Sankara est en train de connaître son dénouement final et il sera difficile pour ceux qu’ils veulent instrumentaliser le dossier, de continuer à se nourrir de la mort de Thomas Sankara.
Notre pays depuis les événements du 15 octobre 1987 a grandi en maturité et n’accepte plus de se laisser séduire par la propagande.

20 ans après ne réveillons pas Sankara

20 ans après donc, alors que les uns, les Sankaristes continuent de s’accrocher à la mort de leur leader pour espérer gripper la machine de la stabilité institutionnelle au Burkina les autres qui ont accepté la rectification et la démocratie peuvent se satisfaire d’avoir engagé le Burkina Faso sur la voie de la démocratie. Une démocratie qui s’est traduite par des élections pluralistes. Quant à Thomas Sankara, le gouvernement a désigné une avenue qui porte son nom et un mausolée sera érigé à sa mémoire. C’est dire que chaque jour des efforts sont faits dans le sens de pouvoir placer l’ex-président à la place qu’il devait occuper. C’est vrai qu’en politique comme en affaire, les bienfaits des autres ne sont pas toujours perçus d’un bon œil par le camp adverse. Pour la simple raison que cela ne va pas dans le sens de leurs intérêts. Pour les Sankaristes qui se sont accaparés le 15 octobre, c’est chaque fois l’occasion pour eux de se faire entendre. On ne peut pas empêcher quiconque d’exprimer ses émotions. On est dans un pays où règne la liberté d’expression.

Mais ce qui est dangereux c’est le fait de récupérer cet événement douloureux à des fins politiciennes. Dans l’interprétation des événements du 15 octobre, chacun y va de sa sensibilité, en raison de sa charge fortement émotive et passionnelle. Renaissance démocratique, deuil montrent le degré de la liberté que connaît le pays actuellement. Les Sankaristes devraient le reconnaître. En jetant un regard dans le rétroviseur de l’histoire, le 15 octobre 1987, avec le dénouement sanglant qui l’a marqué, apparaît avant tout comme une date qui après tout appartient à l’histoire commune du Burkina. On ne peut que regretter les pertes en vie humaine, tourner cette page sombre de notre histoire et regarder vers l’avenir pour construire un Burkina démocratique.

Kibsa KARIM

L’Hebdo

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique