Le discours prononcé par Nicolas SARKOZY en juillet 2007 à l’Université Cheick Anta DIOP de Dakar n’en finit pas de faire des vagues. Dernière réaction en date, la sortie fort remarquée de l’historienne Adame Bâ KONARE, épouse du président de la Commission de l’Union Africaine, l’ancien président malien Alpha Omar KONARE, sur RFI (Radio France Internationale) .

En substance, Madame KONARE en a appelé à ses collègues historiens africains pour l’écriture d’articles scientifiques sur l’histoire africaine, dans la perspective d’un ouvrage collectif adressé au Chef de l’Etat

français. Histoire, si ce dernier en ignore, d’offrir à celui-ci la matière

intellectuelle nécessaire à un polissage de son discours sur l’histoire du continent.

L’intention de Madame KONARE est noble. Elle participe d’une irritation légitime. Les propos de Monsieur SARKOZY, en ce haut lieu de l’intelligentsia africaine, portant le digne et illustre nom de quelqu’un dont les travaux de recherches ont scientifiquement démontré la place et te rôle du Noir dans la civilisation humaine, ont de quoi choquer, irriter, voire révolter. Le tout n’étant pas de s’indigner, la question restait donc de savoir quoi faire face à un tel affront. L’initiative de Madame KONARE s’inscrit, je pense, dans cette logique. Les limites d’une telle démarche se trouvent cependant dans la réponse à une toute autre question qui, à mon humble avis, mérite tout autant réflexion et débat.

Cette question est de savoir si les élucubrations intellectualistes d’un individu (a-t-il beau s’appeler Nicolas SARKOZY DE NAGY BOSCA et soit-il contre toute attente et logique gaullienne Président élu de France et de Navarre) méritent vraiment que les historiens africains se mobilisent pour lui écrire un livre sur l’histoire du continent, berceau de l’humanité.

Avec tout le respect, l’admiration et la considération que je voue à

. Madame KONARE, historienne de renom, ma réponse à cette question

est NON ! Ce serait faire trop d’honneur à Monsieur SARKOZY.

Du reste, au milieu des mille travaux d’Hercule qu’il s’est convaincu d’abattre pour reconstruire une Gaulle qui rame après les gloires perdues de l’empire, cela m’étonnerait fort que le « frangrois » de service se donne le temps (et moins encore la peine) de lire un ouvrage sur l’histoire africaine.

Cela lui rappellerait l’immonde vision de ces belles banlieues de la France de son cœur, sauvagement envahies par les fils d’immigrés Sarakolé « non choisis » que, naguère, il a promis et lamentablement échoue à nettoyer au karsher...

Non, Madame KONARE, Nicolas SARKOZY ne mérite pas un livre d’histoire.

Vous l’avez bien dit vous-même dans vos propos, des ouvrages de référence existent sur l’histoire africaine. Je parie mon cahier d’histoire de C.E.2 (où l’on nous apprenait déjà l’histoire de la France) que SARKOZY n’en a lu aucun.

Pour paraphraser quelqu’un qui le disait en boutade aux théoriciens de la négritude, arrêtons un jour de crier notre tigritude.

Ce Monsieur DE NAGY BOSCA a une piètre image de l’Afrique. N’allons pas, intellectuels de notre état, lui faire le plaisir de nous rabaisser à plaider de sa part une reconnaissance de ce qui, comme tout fait historique, est scientifiquement constant et têtu.

. Je suis tout à fait d’accord avec vous par contre que des efforts supplémentaires doivent impérativement être faits en faveur d’une plus grande connaissance de l’histoire africaine par les jeunes générations. Encouragez les recherches et les productions livresques de vos collègues dans ce sens et laissez courir SARKO.

. Dans un précédent écrit sur le personnage, au lendemain de son élection à la tête de l’Etat français, je disais sans trop y croire que, de par son profil de Président atypique dont venaient librement et étonnamment de se doter nos « ancêtres les gaulois », il « pourrait être le mal nécessaire et indispensable à la rupture du cordon ombilical qui noue (...) l’Afrique francophone à l’ancienne puissance coloniale. »

Le choc moral et intellectuel provoqué au sein de l’opinion et de l’intelligentsia par le ton et le verbe du discours de Dakar mériterait presque des remerciements à Monsieur SARKOZY.

Depuis des millénaires, a-t-il entre autres laissé entendre sans frémir, l’idéal de vie du paysan africain est d’être en harmonie avec la nature,

répétant les mêmes gestes et les mêmes paroles. Enlevons de cette

phrase ce qui est caractéristique de l’être humain, elle sous-entend clairement que, depuis des millénaires, le paysan africain vit comme un animal.

Bravo et merci Monsieur le Président. Ceux qui vous ont écrit ce discours n’ont certainement pas l’excuse d’ignorer l’histoire africaine, comme pense de vous en toute bonne foi Madame KONARE. Ils viennent

(recrutés à dessein ou par erreur, c’est pareil) des cercles connus et dangereux des négationnistes.

Ce qu’ils ont réussi à vous faire dire à Dakar, lors de votre toute première sortie en tant que Président de la République sur ce continent qui a fourni à la France occupée des colonnes et des colonnes de combattants pour reconquérir sa liberté, ne mérite définitivement pas que les historiens africains s’échinent à vous écrire un livre d’histoire africaine.

Iterre Somé

L’Observateur