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L’"opposition vraie" : Qui tirera les marrons du feu ?

Publié le jeudi 27 mai 2004 à 06h35min

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L’"opposition vraie" s’est, semble-t-il, mise en ordre de bataille. Première action d’une vaste stratégie de conquête du pouvoir présidentiel, le meeting tenu à la Maison du peuple le samedi dernier. De ce rassemblement annoncé à grand renfort de publicité, on était en droit d’espérer autre chose que les sempiternelles récriminations contre le pouvoir.

Les mêmes vieilles recettes consistant à diaboliser la majorité sont revenues telle une litanie intarissable. Savent-ils seulement que ce discours-là est rayé et n’intéresse plus personne.

Mais à travers ce jeu du rassemblement, on attend avec envie le moment où commenceront les choses sérieuses : la désignation du ou des candidats à la magistrature suprême.

Dans la forme déjà, le meeting était raté car le défilé des leaders au parloir avait quelque chose ressemblant à un jeu de dupes. Trop de personnalités voulant s’afficher et s’affirmer, la substance du message en a forcément pris un sacré coup. Le contenu manquait de structure et partant de spécificité, à savoir porter d’abord et pour cette première le concept fédérateur ne serait-ce que par symbole, de l’union.

En laissant à chacun la liberté et surtout le libre cours à son inspiration du moment, le meeting a fini par diluer dans une sorte de fourre-tout, incapable de quitter les sentiers battus. Mais n’est-ce pas même la configuration de cette opposition hétéroclite aux intérêts divergents qui l’empêchent d’être porteur d’un message ayant de la moelle ou capable de fédérer ?

Aussi loin qu’il est possible de remonter, depuis le G-14 en passant par toutes les autres formes d’union ou de tentative d’union de l’opposition, jamais celle-ci n’a donné un sens qui inspire la confiance et le respect, à ses actions. Invariablement elle s’est contentée de tirer à boulets rouges et à qui aura la formule qui tue la majorité. En contrepartie, on n’a pas perçu où elle voulait aller et comment elle comptait le faire.

Toute la limite objective, et une fois de plus de ce meeting, est là.

De la cohérence s’il vous plaît !
Une union se cimente d’abord autour de concepts politiques, point incontournable si ses composantes veulent lui donner par la suite un fondement idéologique. Or, les regroupements de l’opposition ont toujours été de circonstance, dictés par un impératif à solutionner dans le proche avenir. Ne pas réfléchir sur le long terme, mais en se contentant de "l’ici et maintenant", on attend toujours sa plate-forme minimale et une suite d’actions cohérentes à mener. Et ce n’est certainement pas en faisant dans le spectacle de l’offensé ou de l’indigné que l’opposition va asseoir une alternative a fortiori une alternance.

C’est pourquoi, en l’absence d’un style original, il lui est quasi impossible de pondre un projet crédible à opposer à la majorité d’en face. A moins que celui-ci ne soit un chapelet de vœux ou de promesses démagogiques n’ayant aucune prise avec la réalité. Et si par spectaculaire cela devrait se produire, on attend de savoir qui va porter ce projet, sachant que les différences idéologiques sont tellement criardes en son sein.

Attelage bancal

Me Hermann Yaméogo vient d’effectuer le grand écart, lui le chantre du libéralisme, en rejoignant avec armes et bagages le sankariste, un autre maître, Bénéwendé Sankara et son groupe parlementaire "Justice et Démocratie".

C’est connu en politique, qu’il n’est jamais simple pour un leader de se débarrasser de ses habits de lumière pour être dans l’ombre d’un autre. Cet anonymat, difficile à admettre explique en grande partie, le besoin pour l’opposition de distribuer la parole à tous, à chacune de ses sorties publiques ou médiatiques.

Que cherche alors, l’homme du "têkré", celui qui veut réhabiliter son père en accédant au fauteuil suprême et pour ce faire, en allant s’agenouiller devant le sankariste tout feu toute flamme, décidé à ramener la révolution démocratique et populaire.

On comprend aisément que chacun voit dans cette alliance circonstancielle la possibilité de tirer les marrons du feu et pour Hermann, cela ne fait pas l’ombre d’un pli qu’il s’agit d’être le candidat de l’opposition. Indépendamment du fait qu’il a toujours joué pour ses intérêts du moment, n’est-il pas celui qui a le plus participé à la gestion du pouvoir d’Etat aux côtés du CDP ? Hermann a tout temps surfé sur la vague de la manœuvre.

Son arrivée aux premières loges complique sans doute la donne car ce n’est pas lui qui va s’effacer au profit de qui que ce soit. A un an des présidentielles, il serait illusoire pour "ses amis" d’aujourd’hui de croire qu’il a renoncé à ses convictions.

A défaut pour lui de les faire partager par les autres, il n’hésitera pas au moment opportun à faire chevalier seul et à aller à la recherche de la gloire.

Reste maintenant à savoir les intentions des autres, même si nombre parmi ces opposants n’ont pas la carrure pour aller au combat. Quid maintenant de l’UNIR/MS et du PDP/PS, ce serait un suicide pour ces deux-là de se mettre à l’écart au profit d’un homme dont la vision de la société est aux antipodes de la leur. La course est lancée, mais l’attelage opposition paraît bien bancal et il faudra un vrai miracle pour qu’il tienne bien la route.

Souleymane KONE
L’Hebdodaire

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