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Conseil de paix et de sécurité de l’U.A : Vous avez dit "devoir de non-indifférence" ?

Publié le mercredi 26 mai 2004 à 07h17min

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A. O. Konaré

Mardi 25 mai 2004, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a été officiellement installé à Addis-Abéba, en Ethiopie. Objectif principal, prévenir, circonscrire, voire intervenir dans les conflits et autres crises dont le continent est coutumier hélas.

Seul bémol en forme d’interrogation, la paix et la sécurité peuvent-elles être effectives en l’absence de démocratie véritable, et surtout dans un océan de misère ?

L’Afrique a donc décidé de prendre en main sa paix et sa sécurité, en portant sur les fonts baptismaux, le Conseil qui sera chargé dorénavant de ces questions. En attendant d’y voir plus clair, soulignons que ledit Conseil aura une architecture proche du Conseil de Sécurité de l’ONU. Une sorte de "censeur" qui se chargera de remettre au pas les "Etats-voyous" et de régler à défaut de prévenir, les nombreux conflits qui ensanglantent le continuent.

Nonobstant le fait que la désignation des membres de ce Conseil ne se fera pas sans heurts (quels critères prévaudront), il y a le fait que l’état de la démocratie et des droits de l’homme en Afrique n’incite pas à un optimisme béat. La corne de l’Afrique, théâtre de cette naissance, est l’illustration parfaite du déficit démocratique avec l’Etat-néant somalien, le conflit ethio-érythréen qui tarde à connaître une solution définitive, sans oublier un peu plus loin, le Kenya devenu depuis septembre 2001 (avec Djibouti et les Comores) une base-arrière du terrorisme international. Sur cette question du terrorisme, l’Afrique devra nécessairement composer avec les autres continents et il y a fort à craindre, au vu des divergences "idéologiques" que certains dossiers se règlent sans elle. Un peu plus loin, le conflit du Dafour soudanais qui a fait jusque-là plus de 100 000 morts et un million de réfugiés interpellent ce nouveau Conseil de paix et de sécurité (pour le moment, l’Union africaine n’y a pas envoyé que des observateurs militaires) de même que le conflit "ethnico-politico-économique" du Kivu congolais. Autre dossier urgent, la Côte d’Ivoire où le ton se durcit chaque jour un peu plus entre les protagonistes de la crise.

Impulser aussi l’économique

Autant de dossiers à l’aune desquelles on mesurera cette nouvelle volonté politique de s’auto-assumer. On ne peut cependant manquer d’être circonspect compte tenu de l’état de déliquescence économique du continent et dans la mesure où l’infrastructure détermine la superstructure. C’est vrai que le NEPAD a été conceptualisé et mis en œuvre, mais il est tellement dépendant des financements extérieurs, et la part du privé international y est si importante, qu’on ne cessera de souligner son caractère aléatoire. Le développement ne pouvant être qu’endogène, il eût fallu conceptualiser des projets moins grandioses et plus réalistes. Et puis, la "vocation agricole" du continent, commandait de mettre en avant les projets promouvant ce secteur.

A titre d’exemple, il est démontré et prouvé que le Tchad a les potentialités hydriques et agricoles pour nourrir une bonne partie du continent.

Mieux, avec l’Angola, ces deux pays peuvent nourrir toute l’Afrique. Au lieu de quoi, le défi de la terre, le défi alimentaire semblent reléguer au second plan, au profit de projets plus spectaculaires, voire médiatiques, dont les populations ne perçoivent pas les retombées. La fin de la faim n’est donc pas pour demain, ce d’autant que les artisans de l’agriculture ne disposent pas de moyens technologiques performants, encore moins de moyens biotechnologiques. Il n’est pas trop tard pour bien faire, et c’est en cela qu’il faut saluer la décision du président malien, hôte du récent sommet de la CEN-SAD, de mettre à la disposition des pays-membres 100 000 hectares de périmètres aménagés. A ce propos, on s’interrogera là aussi sur l’Office du fleuve Niger qui devait alimenter tout l’Ouest-africain. Dans ce contexte, force est de reconnaître qu’il y a une distanciation entre les réalités africaines et les solutions et réponses proposées pour embellir ces réalités.

Alors, la paix et la sécurité sont-elles possibles quand le paysan et sa terre ne cessent de s’appauvrir, quand des territoires sont occupés par des voisins "boulimiques", quand le commerce se conjugue avec iniquité et quand le besoin de tous les êtres humains, celui de se nourrir, n’est pas "rassasié" ? Le devoir de non-indifférence qui a prévalu à la création du Conseil de paix et de sécurité, devra aussi prévaloir dans le domaine économique, car, "ventre affamé n’a point d’oreilles".

Boubakar SY

Sidwaya

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