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Enseignement de base et alphabétisation au Burkina : Les appréhensions d’un formateur

Publié le mardi 11 septembre 2007 à 07h42min

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Dans une lettre adressée à Madame le ministre de l’Enseignement de base et de l’Alphabétisation (MEBA), Mme Odile Bonkoungou et au Premier ministre, Tertius Zongo, Donatien Yaméogo, formateur à l’ENEP de Loumbila les félicite pour les actions menées sur le terrain. Cependant, il y affiche ses craintes et ses inquiétudes face à un éventuel conflit entre parents d’élèves et enseignants.

Je voudrais dans cet écrit m’adresser dans un premier temps à Madame le Ministre de l’Enseignement de base et de l’Alphabétisation et dans un second temps, à son Excellence Monsieur le Premier ministre sur des questions qui, à mon sens, méritent d’être abordées.
Mais avant, je tiens à souligner que je ne suis pas de ceux qui brandissent les mauvaises actions et qui taisent les bonnes et vice versa selon leurs motivations. Je suis tout juste un abonné aux critiques constructives. Ceci dit, Madame le ministre, depuis août 2006, j’avais plaidé dans un de mes écrits pour que l’on n’affecte plus les nouveaux enseignants sans un "sou" en poche au risque de continuer de les voir perdre leur dignité sur le terrain.
Je salue donc cette deuxième édition des avances sur salaires que vous venez de leur promettre.

Cela témoigne de l’attention que le gouvernement accorde à leur situation. Le problème qui demeure en suspens et sur lequel je ne voudrais plus m’étendre est la formule actuelle des préparations de classe qui date, je le répète, de l’ère coloniale et dont le poids joue sur l’efficacité des enseignants en classe.

Je ne sais pas pourquoi notre pays s’enferme dans un conservatisme dégradant alors que d’autres s’en sont débarrassés.
Bref, j’espère que la réforme de l’éducation tient compte dans ses détails, de tous ces aspects. Le second point vous concernant madame le ministre, est un constat : quand je vous ai vu vous déplacer avec tous les responsables des départements de votre ministère pour la conférence annuelle des conseillers pédagogiques itinérants, a priori, j’ai eu un pincement au cœur quand j’ai essayé d’imaginer le volume de l’enveloppe financière qui accompagnait cette mission.

Mais, quand j’ai assisté aux échanges, au débats, j’ai compris que c’était de l’argent dépensé utilement parce que, pour une question de transparence, chaque département interpellé devait apporter une réponse claire et satisfaisante. Cette façon de procéder a beaucoup plu aux participants, à en croire à leurs réactions. C’est une démarche qui met à nu les insuffisances et révèle les compétences. Elle oblige donc à la maîtrise de la gestion des différents départements. En attendant de revenir sur d’autres préoccupations et avant de me tourner vers la primature, je vous souhaite bon vent à la tête du ministère.

Excellence Monsieur le Premier ministre,

J’apprécie positivement votre pragmatisme et votre détermination à sortir le pays de sa torpeur, de son marasme économique. Mais là où j’ai freiné mon enthousiasme, c’est lorsque vous avez déclaré dans la région de l’Est, le 28 août 2007 à l’occasion du lancement de la distribution des manuels scolaires que : "Les parents d’élèves, les mères éducatrices doivent faire pression sur les enseignants pour qu’ils soient présents à leur poste".

J’ai des appréhensions quant aux interprétations qui peuvent être faites par certains parents d’élèves eux-mêmes démissionnaires.

Monsieur le Premier ministre, peut-être que cela vous a échappé mais vous venez de créer une source de conflits entre maîtres et parents d’élèves alors que l’idéal aurait été d’avoir un tandem (maîtres - parents d’élèves). Le problème de désertion de classe ou d’abandon de poste ne peut pas se régler par des pressions de parents d’élèves. On peut obliger un enseignant à être dans sa classe mais pas à travailler comme il se doit. Dans la logique, un enseignant n’a pas besoin d’un policier ou d’un gendarme pour faire son travail.
Si c’en était le cas, il y a quelque chose qui cloche. Une enquête vous déterminera les vraies causes. Pour ma part, c’est une question de mentalité, c’est un état d’esprit qui a été cultivé pendant longtemps et qui ne pourrait être éradiqué par une pression incontrôlée, sans règles. Le mal est très profond et tend à s’ériger en système. Dans les autres services, après 10 h, ce ne sont que quelques rares agents à la conscience professionnelle pointue que l’on trouve à leur poste.

Excellence Monsieur le Premier ministre, de manière générale, les questions de présence et de ponctualité peuvent être résolues en partie par l’exemple venant des premiers responsables.

Je vis cette expérience dans mon service où les agents rivalisent de ponctualité parce que le premier responsable est à son poste dès 7 h.

Excellence, il y a du boulot. Mais, ils sont nombreux ceux qui sont prêts à mettre la main à la pâte pour aider à apporter des remèdes aux multiples maux de notre société. J’en appelle donc à la conscience professionnelle des collègues pour que l’honneur, la dignité, l’intégrité soient "nôtres" car, comme j’aime à le dire, l’enseignant n’est pas "n’importe qui", travaillons à le mériter.
Excellence, je vous souhaite beaucoup de courage, beaucoup de réussite.

Donatien YAMEOGO
Formateur à l’ENEP de Loumbila

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 11 septembre 2007 à 13:22, par kanzim En réponse à : > Enseignement de base et alphabétisation au Burkina : Les appréhensions d’un formateur

    En dehors de cette note part trop laudatrice à l’égard d’un Ministre et d’un Premier Ministre qui n’ont fait que mettre en oeuvre des actes régaliens de l’état, je suis d’accrd en effet qu’une bonne collaboration entre Enseignants et Parents d’Elèves est un gage de bonnes production et productivité de la tâche éducatrice et enseignante. Je partage l’idée aussi que la gangrène de l’absentéisme et des retards au service sont un problème qui requiert tout un ensemble de thérapeutiques et qu’il concerne tous les genres et catéggories de fonctionnaires, (je dis bien fonctionnaires), dont la difficulté à mobiliser la conscience croît proportionnellement au flétriseement de l’engagement patriotique et professionnel des supérieurs hiérarchiques de haut niveau. Pour moi, si le Premier Ministre l’a dit, c’était dans le cas contextuel de l’enseignement. Il faudrait qu’il se décide, dans les cas contextuels à venir, à engager les populations de veiller à ce que les officiers de l’Etat Civil soient là pour signer les actes de naissance, les infirmiers soient plus à leurs postes qu’à des réunions et autrtes ateliers, que les enseigants de l’UO soient plus dans les amphi que dans les chantiers de la consultation ; demandez à cet effet seulement, aux étudiants de 4ème Année de Sociologie, le calvaire qu’il y a à trouver un directeur de Stage : à l’UO, la Maîtrise en socio devrait, plutôt que de s’appeler Bac + 4, se désigner sous le vocable Bac + 5, 6, ou 7. Mais le cas contextuel dont devrait se servir plus le Premier Ministre pour enjoindre les populations à se mobiliser, se rapporte à ce que les Ministres soient plus autour de leurs dossiers ; enfin, un dernier cas contextuel : que les populations demandent des comptes à tout conducteur de véhicule fond rouge ou bleu, pendant les week ends, aux mariages ou autres funérailles ; que le Premier Ministre explique aux populations que la maintenance de ces véhicules, le carburant pour ces véhicules et leur réparation, diminuent proportionnellement les capacités de l’Etat à répondre à leurs besoins de santé et au besoin d’éducation de leurs enfanst. L’oeuvre serait plus utile dans ce cas, que d’interpeller des parents d’élèves à requértir des enseignants affamés, sous formés et non motivés, qu’ils soient à leurs postes.

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