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Maroc-Espagne : Un cas pratique de l’immigration choisie

Publié le jeudi 6 septembre 2007 à 07h28min

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Le reportage en a frappé plus d’un. Une recruteuse de chaînes hôtelières basées en Espagne dépêchée à Rabat, au Maroc. Objectif : ramener 200 candidats marocains spécialisés dans les métiers de l’hôtellerie sur la péninsule ibérique. Le pays a besoin de cette main-d’oeuvre et ses entreprises vont la chercher là où elle se trouve, qualifiée certes, mais surtout bon marché.

Cette opération de sélection de candidats à l’eldorado espagnol n’est-elle pas la matérialisation de l’immigration choisie, théorie chère au président français ? Les Espagnols, eux ne font pas dans la théorie et vu le succès de l’opération, les détracteurs de l’immigration choisie auront du mal à convaincre les candidats marocains que partir dans ces conditions revient à piller les ressources de leur pays.

D’ailleurs, ils n’en ont cure. Les candidats à ce type d’immigration pensent d’abord à leur avenir personnel, aux revenus qu’ils peuvent tirer pour eux-mêmes et pour leurs familles. Les plus ambitieux reviendront au pays et ouvriront leur propre affaire, peut-être. Car l’opération reste une aventure avec toutes ses incertitudes, même si les migrants rejoignent le pays d’accueil en vol régulier et souvent aux frais du recruteur et avec en sus un contrat de travail en bonne et due forme dans les mains.

Ici, c’est une formule qui arrange bien les deux pays. Le Maroc exporte une partie de sa main-d’oeuvre, à qui il n’aurait pas pu offrir un emploi. Il est vrai que dans le lot, ils sont nombreux ceux qui vont abandonner leur poste pour rejoindre Madrid. Mais enfin, ne libèrent-ils pas des places pour les autres ?

Pour le pays demandeur, c’est une expertise bon marché. Et tant pis pour ceux qui crient au pillage des cerveaux africains. Ce flux migratoire organisé nous éloigne des scènes humiliantes d’Africains qui meurent dans leur tentative de se faire une place au soleil en Occident ou de clandestins que l’on rapatrie de force par des charters.

Le tort de Sarkozy est d’avoir ouvertement conceptualisé une pratique qui existe depuis longtemps. La loterie américaine n’est rien d’autre qu’une immigration choisie. Sous le couvert d’un jeu du hasard, des candidats avec un pre-réquis en matière d’instruction peuvent y participer. Le même type de sélection existe pour le Canada où l’on est plus regardant sur ce que le candidat possède comme savoir-faire.

C’est donc de bonne guerre que les pays occidentaux ciblent leurs besoins de cette façon. On ne saurait leur faire un mauvais procès. Le vrai défi que les Africains doivent relever est de mieux former leurs diplômés et de valoriser la ressource humaine au plan local. Cela suppose que les formations doivent être adaptées à leurs besoins de développement.

L’Afrique doit donc travailler à développer ses intelligences et ses capacités à former et à absorber ses diplômés d’abord. Vu l’écart entre les revenus, l’Occident sera toujours plus attractif en terme de salaire. Mais si l’emploi y est bien rémunéré, seuls les prétendants les plus compétents, c’est-à-dire bien formés, y ont leur place.

Le Maghreb, d’une certaine façon, a compris qu’il doit s’adapter aux enjeux de la mondialisation en matière d’offre et de demande d’emploi. Aujourd’hui, il joue sur la proximité avec l’Europe pour légaliser une certaine forme de migration. Le Maroc, une fois de plus a développé un ingénieux système qui consiste à recruter des travailleurs saisonniers pour aller faire la récolte dans les champs de fraise. 5 000 postes sont disponibles cette année et une agence a été créée à cet effet.

L’expérience connaît un tel succès que certains pays européens vont bientôt se jeter à l’eau. Le public cible visé est celui de la paysannerie. Trois mois en Europe dans les champs d’agrumes avec la garantie d’y revenir si le travailleur est exemplaire, tels sont les termes du contrat. Là encore, les candidats sont soumis à des critères rigoureux.

Faut-il interdire ce type de recrutement qui, quoi qu’on dise, a des retombées positives pour les travailleurs et par ricochet pour le pays ?

Visiblement, il s’agit là d’une alternative à l’immigration clandestine qui ruine tant de familles et fait tant de victimes. Ce n’est certainement pas la panacée dans la mesure où l’Europe est obsédée par le durcissement des conditions légales de séjour des étrangers sur son sol.

La vraie question aujourd’hui est de savoir si l’Europe est vraiment demandeuse et comment l’Afrique peut saisir cette opportunité !

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 6 septembre 2007 à 15:30 En réponse à : > Maroc-Espagne : Un cas pratique de l’immigration choisie

    Une fois encore je m’incline devant la lucidité avec laquelle vous analysez la situation du développement en Afrique et surtout quand il s’agit des relations Afrique Occident et des intérêts afférents. Je suis totalement d’avis avec vous que la pratique de l’immigration choisie exite depuis et que Sarkozy ne l’a fait que conceptualiser et surtout l’avoir proclamée. Si non comme vous le dites si bien, le Canada la pratique depuis très longtemps et les USA ne font pas exeption. Pour retourner dans le passé, l’esclavage n’est-il pas aussi une forme d’immigration choisie vue du coté des occidentaux ? Quand on fait trier, inspecter le groupe d’hommes à acheter avant de l’accepter et de les envoyer dans les caveaux, ne sommes nous pas en présence d’un choix fait par le maître acheteur ? surtout que dans ce cas, seuls les plus robustes et sains sont choisis pendant que les moins robustes ou ceux soupconnés d’être malades sont laissés de coté.
    Comme vous le souligner aussi, de nos jours, il est difficle pour le candidat à qui on offre cette possibilité d’immigrer de ne pas acccepter, quelque soit son dégré de patriotisme. Car étant au chomage dans son pays ou ayant un revenu qui ne fait son bonheur. La solution est plutôt du coté des pays africains. Il nous revient de voir oû se situe notre intérêt. Beaucoup de nos cadres formés à coup de millions trainent dans les capitales de nos pays. Le Bénin par exemple compte des milliers de Ph.D. au chomage pendant que ses universités manquent d’enseignants et que l’éducation au secondaire et au primaire manquent de cadres. Ces chomeurs vont-il refuser une main tendue si les pays du Nord les leur offrent ? Pas si sur. Il revient à nos pays de savoir retenir leurs fils en leur offrant les conditions d’épanouissement et de développement si non le reste serait des discours.
    Merci une fois encore pour la lucidité de vos analyses.

    • Le 6 septembre 2007 à 18:27, par KALMOGO En réponse à : > Maroc-Espagne : Un cas pratique de l’immigration choisie

      Tu as fait un bon commentaire et je suis parfaitement d’accord avec toi : Lepays est l’un des journaux de notre pays à avoir des journalistes intélligents(es) et compétents(es) dans leurs métiers et Nous Nous réjouissons.

      Pour revenir à la situation d’immigration choisie, il nous faut effectivement réflechir sur le sujet. Je prendrai en exemple ma personne pour illustrer un besoin de réforme sur la formattion de nos cadres. En effet, j’ai été choisi par le gourvernement Burkinabé pour suivre une formation en Europe et mon espoir était qu’une fois terminé mes études je retournerai au Pays pour y participer à son développement. Mais au vu du manque de suivi, quand j’ai fini mes études et je suis rentré mais laissé pour me débrouiller à trouver quelque chose et là ce n’est pas évident. Peut être que j’étais aussi préssé de trouver quelque chose, mais au bout de quelque semaines après avoir parcouru la capitale, je me suis rendu compte que je dois malheureusement me résoudre à rétourner en Europe pour y me débrouiller. Et c’est qui fut fait !

      Tout ce commentaire pour dire qu’il y a necessité que Nous Nous organisions et que les cadres formées à coups de millions puissent apporter leur pierre à la construction de Notre Chère Faso en particulier et à l’Afrique en générale.
      Nous pouvons nous passé de l’immigration choisie car comme le dit le journaliste cela passe par une bonne organisation et une garantie de conditions décentes en Afrique.

      Bon vent à Lepays, Notre journal de référence !

      Cordialement

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