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Tracasseries policières dans l’espace CEDEAO : Une réalité quotidienne malgré les discours

Publié le lundi 3 septembre 2007 à 08h27min

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Le Réseau informel des journalistes (RIJ), en collaboration avec le Service allemand de développement (DED) et grâce à l’appui financier de la société de téléphone mobile TELMOB, a initié du 16 au 26 août 2007, un voyage d’échange avec des confrères mais également de tourisme dans la sous-région.

Ce voyage nous a respectivement conduit au Bénin (Cotonou, Ouidah), au Togo (Lomé) et au Ghana (Accra, Kumassi). Tout le long du voyage, les tracasseries policières ont été au rendez-vous.

L’un des objectifs du voyage entrepris par le Réseau informel des journalistes (RIJ) était de voir de visu les scènes de tracasseries policières au niveau des postes de police transfrontalière et de mesurer du même coup le degré d’intégration des peuples ; un vœu très cher à nos autorités de l’espace CEDEAO et de l’UEMOA.

C’est la raison pour laquelle, à défaut du passeport, il a été demandé aux dix membres de la délégation de posséder un carnet de voyage CEDEAO. Consigne bien respectée par tous. A bord d’un car de transport en commun de la compagnie TSR, le périple a débuté le 16 août 2007 à 7 h, direction Cotonou. Mon plus long voyage (17 heures de route). Comme tout bon passager, nous nous sommes installés dans un siège et direction, l’Est : Fada N’Gourma, Pama puis Nadiagou, dernier village burkinabè avant la frontière avec le Bénin et seul poste de contrôle policier côté burkinabè.

Là, après les formalités d’usage (sans souci pour les passagers), ceux-ci reprennent place dans le car et direction Porga, un faubourg où ont été implantés un poste spécial de police transfrontalière et un poste de douane. Bonjour les tracasseries ! Les convoyeurs de car, pour éviter de longues discussions avec les policiers, exigent des passagers une contribution individuelle de 500 FCFA sauf à ceux qui possèdent un ordre de mission. Même ceux-ci doivent fournir un argumentaire solide en plus du papier (car comme ils aiment à le dire, policiers ne mangent pas papiers) au cas où ils ne veulent pas être tournés en rond.

“Policier s’en fou de papiers”

De Porga à Cotonou, les cars de transport font l’objet de racket sur racket de la part des policiers gendarmes, douaniers. Inutile de leur demander de lire un papier.
Glissez juste 1000 FCFA avec les papiers du véhicule pour eux et vous circulez en toute tranquillité. Dans le cas contraire, ce sont les coups de sifflet (ils excellent là-dedans) qui finissent par vous irriter. Même en plein cœur d’Abomey-Calavi, les coups de sifflets stridents des policiers continuent la nuit venue, pour juste vous soutirez 500 à 1000 F CFA. A Cotonou, ne vous avisez pas à mal stationner votre véhicule, autrement, vous en aurez pour votre compte : 200 ou 500 F CFA.

Après quatre jours de séjours à Cotonou, nous avons décidé toujours de relier Lomé (Togo) par la route, cette fois-ci dans un mini-bus. La route qui mène à Lomé longe la côte atlantique, avec une vue agréable sur la mer. Elle donne également l’opportunité de découvrir des villages lacustres comme Ahémé (Bénin) et Aného (Togo).
D’un pays à l’autre, l’on a aucunement le sentiment d’avoir traversé une frontière, tant la nature qui se donne à voir est la même. Mais le gros problème au Bénin, c’est l’attitude de ces policiers abonnés aux rackets.
Cela s’est encore vérifié à Hilla Condji, frontière entre le Bénin et le Togo.

Là, en plus du poste de douane, il y a deux postes de police situés à 100 m l’un de l’autre plus un poste de service de l’immigration côté togolais. Le chemin se fait à pied pour tout passager. Dans l’intervalle de 100 m, il y a encore deux contrôles des passagers à faire, au niveau d’une passoire, par des policiers. C’est le lieu privilégié des rackets.

D’un côté à l’autre, si vous n’avez pas un nom qui sonne béninois ou togolais, vous débourserez 300 à 500 FCFA quel que soit le papier (carnet CEDEAO, passeport, ordre de mission) que vous allez leur tendre.
A ce poste frontalier, les policiers n’ont rien à “cirer” avec la libre circulation des personnes et des biens prônée par les autorités de l’espace CEDEAO ou même de l’UEMOA. Par contre, à la frontière entre le Togo et le Ghana le contrôle a été fluide et le passage pour nous s’est effectué sans grand problème.
Ce d’autant plus que les policiers togolais ont compris que le groupe était composé de journalistes.

Deux heures d’attente pour des cachets

De Aflao (frontière Togo-Ghana) à Accra, les policiers ghanéens sont aussi dans la danse. Mais les rackets sont surtout opérés sur les passagers des mini-bus et des cars moyens. Les passagers de la société nationale de transport STC sont la plupart du temps sereins eu égard à l’image de marque de la société. Mais ce mercredi 22 août 2007, alors qu’embarqués dans un car STC pour Accra, le chauffeur du car a été interpellé par des coups de sifflets stridents venant d’une fourgonnette de policiers en patrouille.

Certainement habitué à cela, le chauffeur continua sa course. Mais voilà que quinze minutes plus tard, la fourgonnette était à notre niveau et le chauffeur sommé de se ranger sur le côté. Il a fallu un long moment d’explication entre le chauffeur et les policiers. Pour calmer leur fureur et au risque de voir son car bloquer, le chauffeur a été obligé de débloquer les cédis (franc ghanéen).

Et nous voilà à Accra, puis Kumassi, 3e et dernière étape de notre périple. Après le séjour en terre de Kwamé N’Krumah et des Ashanti, nous avons décidé de rentrer au pays.

A la frontière entre le Ghana (Paga) et le Burkina Faso (Dakola), les passagers que nous sommes ont encore souffert le martyr. Plus de deux heures d’horloge pour récolter, rien que des cachets. C’est à ne rien comprendre.

Ce d’autant plus que nos bagages ont cette fois-ci été épargnés au contrôle douanier. Rentré enfin au pays après une telle expérience, nous nous interrogeons sérieusement sur la libre circulation des personnes et des biens.
Dans son préambule, le traité de l’UEMOA modifié, affirme que les Etats membres, fidèles aux objectifs de la CEDEAO, conviennent des objectifs qui sont de créer entre les Etats membres, un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens, des services, des capitaux et le droit d’établissement des personnes exerçant une activité indépendante ou salariée ainsi que sur un tarif extérieur commun et une politique commerciale commune ; ensuite d’intituler une coordination des pratiques sectorielles nationales par la mise en œuvre d’actions communes et éventuellement de politiques communes notamment dans les domaines des ressources humaines, des transports, etc.

Comment comprendre que certains pays-membres mettent tout en œuvre pour appliquer le traité et d’autres non ? Le citoyen burkinabè a du mal à comprendre que les barrières policières et ce qui s’y rattache soient levées dans son pays et pas ailleurs. Cette anecdote d’un policier ghanéen en dit long sur les discours et les faits. A un passager qui voulait traverser la frontière pour un autre pays, carnet CEDEAO en main, il a lancé : “CEDEAO, CEDEAO ! Vos histoires de CEDEAO, c’est à la télé. Nous, on n’a pas de télé ici. “Give money !” (donne l’argent !)

Ismaël BICABA

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 3 septembre 2007 à 09:50 En réponse à : > Tracasseries policières dans l’espace CEDEAO : Une réalité quotidienne malgré les discours

    Eh oui il faut que l’UEMOA et la CEDEAO ou les pays membres de ces institutions bougent le Q ! Moi une fois, je faisait Bamako-Ouaga, arrivé à la police de frontière malienne, j’ai présenté mon passeport et mon carnet de santé. A ma surprise, la police a remis les cartes d’identité des passagers qui en avaient présentés, elle a également remis les passeports aux blancs qui étaient dans notre car, et elle nous a demandé 1000FCFA pour le cachet apposé sur notre passeport. J’ai refusé de payer sans reçu associé à ces 1000FCFA. Alors ils ont rerereregardé mon carnet de santé et ont trouvé que mon numéro de passeport ne s’y trouvait pas. Là ils ont dit que c’est une amende de 3000FCFA. J’ai payé les 3000FCFA contre un reçu, seulement une fois dans le car, j’ai remarque que le reçu avait comme raison : "Défaut de vacination". Oh quelle malhonnêteté ! Je vous dis que j’ai gardé un rancoeur indescriptible. Ne vous étonnés pas que de frustration à frustration des gens comme moi se soulèvent contre le système. Je pense que l’UEMOA a échoué après plus de 10 ans d’existence (créé en 1994). Que des définitions, ue des objectifs. On a marre !

  • Le 3 septembre 2007 à 16:26, par Kanzim En réponse à : > Tracasseries policières dans l’espace CEDEAO : Une réalité quotidienne malgré les discours

    J’espère que cet article fera l’objet d’une grande diffusion. Je propose que les fasonautes qui ont été victime de ces tracasseries, au Burkina ou ailleur fasent des témoignages. Et nous inviterons alors les officiels sourieurs et angéliues de la ’UEMOA à lire ces témoignages. Peut-être cesseront-il de nous servir de larges sourires et des discour démagogique, pour enfin ouvrir les yeux sur la réalité. Le officels burkinabè devront également lire ces témoignages. Peut-être que le fossé entre le monde chimérique des officiels pansus et jouflus et la réalté quotidienne des commerçants et du citoyen lamda qui voyagent seront comblés. Je me rappelle encore cette femme qui disait dela mévente des tomates et leur pourrissement, que cette mévente était due aux tracasseries routières en partie. Dommage

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