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Le 15 octobre nous appartient à tous !

Publié le mercredi 29 août 2007 à 08h10min

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En effet, la question n’est ni idéologique, ni sentimentale, elle est tout simplement banalement pragmatique parce que la vie au Burkina Faso aujourd’hui et certainement pour bien longtemps encore aurait été autrement pour tous si le 15 octobre 1987 n’avait pas eu lieu.

C’est un fait qui s’impose de lui-même et oblige les uns et les autres à se positionner non pas dans un schéma manichéen dans lequel il faudrait choisir entre le bien et mal mais dans la perspective de comprendre d’où on vient, ce que nous sommes aujourd’hui et où nous allons. C’est vrai qu’il n’y a pas de vent favorable pour qui ne sait pas où il va et que faute de savoir où on va on devrait savoir d’où on vient. C’est aussi simple que cela.

Près de deux mois avant l’événement, le 20e anniversaire du 15 Octobre 1987 occupe déjà l’actualité, au point de susciter des commentaires et des interrogations dans les médias. Tandis que certains s’affairent pour lui donner un éclat particulier, d’autres par contre voudraient qu’il n’en soit rien du tout comme pour dire, qu’ils n’ont rien à y voir et que tous comptes faits, cette date ne concerne que les principaux acteurs de la Révolution Démocratique et Populaire (RDP).

Trois visions d’un même événement qui, quoi qu’on dise, a profondément marqué le paysage sociopolitique du pays surtout qu’il a bouleversé tant le microcosme politique que le jeu des acteurs. Vouloir s’affranchir d’une telle réalité nous semble pour le moins essayer de cacher le soleil avec la main. En fait, il ne s’agit pas d’aimer ou de ne pas aimer l’une ou l’autre des facettes de cette date qui a vu les révolutionnaires s’étriper au propre comme au figuré mais de reconnaître toutes ses implications sur notre vécu quotidien et de les assumer pleinement, c’est-à-dire sans faux-fuyant.

Mais voilà, pendant trop longtemps l’immense majorité et avec elle certains acteurs ont laissé jouer les sentiments pour se donner bonne conscience en abandonnant le devoir de mémoire à d’autres qui en ont profité et à fond pour tenter de réécrire l’histoire, la travertissant au détour pour les besoins de leur cause.

On a poussé le sens de la compassion jusqu’à fermer les yeux et les oreilles sur le devoir de vérité sous prétexte de ne pas réveiller des douleurs et de laisser les morts reposer en paix. Ce faisant, en face, on ne s’est pas gêné pour jouer aux veuves éplorées en tirant au maximum sur cet aspect émotionnel des évènements, tout en profitant pour diffuser des messages politiques.

Du coup, il était interdit de penser autrement, encore moins d’évoquer d’autres angles d’analyses. Une dictature qui ne disait pas son nom qui a des allures hallucinantes d’autant que c’est une minorité qui l’exerce sur une majorité qui a volontairement décidé de renoncer à ses droits pour raser les murs. Elle pouvait difficilement se compromettre beaucoup plus car, même si c’était à son corps défendant, elle n’en était pas moins coupable de non assistance à peuple spolié de son histoire. En effet, en face, les Sankaristes, puisque c’est d’eux qu’il s’agit, en ont profité pour traficoter des faits et leurs significations aux fins d’embellir davantage leur icône et de noircir autant que faire se pouvait leurs adversaires.
Assurément, on ne peut pas continuer ce petit jeu, car il s’agit de l’Histoire de ce pays ; histoire avec un grand « H ».

Ce faisant on ne peut prendre le risque de la laisser à la seule écriture de petits charlatans qui ont plus d’une fois fait la preuve qu’ils portaient des œillères et ne s’embarrassaient pas des opinions des autres ou de tout ce qu’ils pouvaient ressentir. N’est-ce pas eux qui promettaient le poteau n°5 à tous ceux qui ne partageaient pas leurs points de vue et qui n’hésitent pas à fustiger la démocratie « libérale », celle-là même qui leur permet de vociférer ? Ils sont plus à plaindre qu’autre chose dans la mesure où eux-mêmes ne font pas mystère qu’ils agissent par procuration et se sont volontairement enfermés dans un manichéisme sans nom.

Il est donc plus que temps de tout mettre en œuvre pour que chacun occupe sa place dans la célébration de cette date. Le devoir de mémoire n’est pas seulement obligatoire pour les morts, il l’est aussi pour les vivants pour ne pas dire les survivants car dans cette affaire du 15 Octobre, il s’agissait beaucoup de cela puisque c’était vraisemblablement à quitte ou double. Il ne faudrait pas pour autant céder à la tentation de faire comme les autres, c’est-à-dire dans l’anathème et la caricature, mais de donner leur vrai sens aux faits afin que plus jamais notre peuple ne connaisse de telles situations. Voilà pourquoi il faut prendre la peine et le temps d’ausculter le 15 Octobre 1987 et de lui donner toute l’importance qu’il a dans notre histoire.

Ce serait trop réducteur d’en faire une affaire des seuls révolutionnaires puisque ce que nous sommes aujourd’hui, nous le lui devons, quelles que soient nos options politiques. Même les « sankaristes » doivent tout au 15 Octobre. Autant qu’ils sont, ils ne seraient rien aujourd’hui si le 15 Octobre 1987 avait tourné autrement. Ce n’est pas pour autant qu’il faille leur laisser tout le 15 Octobre !

Par Cheick AHMED

L’Opinion

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Vos commentaires

  • Le 29 août 2007 à 12:11, par Moctar Samba En réponse à : > Le 15 octobre nous appartient à tous !

    Un peu de serieux quand même :

    « Même les « sankaristes » doivent tout au 15 Octobre. Autant qu’ils sont, ils ne seraient rien aujourd’hui si le 15 Octobre 1987 avait tourné autrement. Ce n’est pas pour autant qu’il faille leur laisser tout le 15 Octobre ! »

    Non seulement, on ne joue pas avec la mort d’un homme de cette manière mais aussi il faut respecter les gens. Si la foudre tombe sur la maison de quelqu’un et que 20 ans après lorsqu’on se rappellera douloureusement de ce malheur, vous (l’Opinion) trouvez que cette personne ne serait rien sans cette foudre et que la personne doit tout à la foudre ? Si je vous comprends bien, la personne devrait même remercier cette foudre certainement pour l’avoir rendue célèbre en la dépossédant de son bien, la rendant le SDF le plus célèbre.

    Les sankaristes devraient s’estimer heureux alors ? Si c’étaient eux qui avaient remporté ce fameux quitte ou double (selon vous), c’est vous qui alliez occupé cette place aussi envieuse que confortable qu’ils occupent aujoud’hui et que vous vous décrivez si bien.Belle idée, ne cultivez pas le pardon, la tolérance, la réconciliation. Continuez à former des gens vindicatifs qui vont vous rendre très célèbres un jour et qui réclameront plus tard cette célébrité.

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