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Côte d’Ivoire : Jusqu’au bout de l’absurde

Publié le vendredi 21 mai 2004 à 07h48min

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Le président ivoirien Laurent Gbagbo a opté pour la logique de la radicalisation, dans la crise ouverte qui l’opposait à l’ensemble de l’opposition ivoirienne. Exit donc les "têtes dures" de cette opposition du gouvernement de réconciliation nationale de Seydou Diarra. Ce dernier est dans l’expectative quant à la conduite à tenir, alors que le pays, retient son souffle les positions s’étant durcies de part et d’autre.

Après son discours "surréaliste" du mardi 18 mai dernier dans lequel il annonçait pêle-mêle la "suspension" des traitements des ministres en "congé" du gouvernement ainsi que d’autres mesures vexatoires prises à leur en encontre (retrait des véhicules de fonction et des logements) tout en dénonçant leur "vagabondage" (sic) dans la sous-région, Laurent Gbagbo a franchi un palier supplémentaire dans sa volonté de mettre à mal l’application des accords de Marcoussis.

Mercredi dernier en effet, il a tout simplement démi certains de ces ministres (Guillaume Soro, Patrick Achi et Youssouf Soumahoro) de leurs fonctions, pour les remplacer par des intérimaires, provenant tous de son parti, le FPI. "Démission" logique pour Guillaume Soro, si tant est que le secrétaire général des Forces nouvelles ne cesse de clamer que "Gbagbo est le principal obstacle à la paix" (à juste raison). Dépité de voir la communauté internationale tergiverser depuis deux ans sur la conduite à tenir à l’égard de Gbagbo, Soro et ses hommes ont du reste commencé à organiser leur fief du Nord, persuadés que "rien de bon" ne peut se faire avec Laurent Gbagbo.

Quant à Patrick Achi du PDCI/RDA, il paie ainsi le bras-de-fer qui oppose son parti à celui du président pour le contrôle du port autonome d’Abidjan véritable "pompe à fric" qui attise les convoitises. Youssouf Soumahoro, lui est sanctionné pour cause de "vagabondage nocif", pour avoir dit-on, visiter certains pays de la sous-région.

Un écran de fumée

L’un dans l’autre cependant, ces mesures rentrent dans la logique de la surenchère dont le camp présidentiel ne s’est jamais départi depuis la signature des Accords de Marcoussis. Ce, parce que malgré les professions de foi le régime Gbagbo n’a jamais adhéré à la lettre encore moins à l’esprit desdits Accords.

Le Premier ministre Seydou Diarra, principal maître d’œuvre de leur mise en application, n’a jamais eu les pouvoirs effectifs pour ce faire. Imposition de ministres par Laurent Gbagbo, immixtions grossières dans le travail de certains ministres (rappelez-vous la séquestration de Guillaume Soro) violation des lois de la république (passation de marchés de gré-à-gré) il a subi moult vexations, avant de se voir asséner le coup du 19 courant. Un coup d’Etat en fait, dans la mesure où le consensus marcoussien est rompu. On comprend l’ambarras de Seydou Diarra qui ne sait plus sur quel pied danser. Toute cette "ratatouille" déclenchée par Gbagbo, vise un seul objectif : mettre un voile opaque sur les problèmes qui accablent le pouvoir ivoirien. Acculé par le rapport onusien qui l’indexe comme le "principal auteur" des massacres des 25 et 26 mars 2004, esseulé au plan régional pour avoir tenu des propos discourtois, voire injurieux à l’encontre de certains de ses pairs, fâché avec toute son opposition, la marge de manœuvre de Gbagbo est de plus en plus étroite.

D’autant plus que dans son propre camp, certains faucons avaient commencé à montrer les dents, en l’accusant de "noblesse" vis-à-vis du camp d’en face. En reprenant la main, Gbagbo veut indiquer qu’il est le maître du jeu et qu’il n’a que faire des "désirs" et de la volonté de l’extérieur dans la résolution de la crise.

La logique de la radicalisation mais aussi de l’absurdité, l’expérience ayant prouvé que tout cela débouche sur des "mini" génocides (octobre 2000, janvier 2001 et mars 2004).

Alors si rien n’est fait, c’est le génocide grandeur-nature qui se profile à l’horizon. Le décor est en tout cas planté.

Boubacar SY

Sidwaya

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