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Elections au Burkina Faso : Compétition "sur un terrain incliné"

Publié le jeudi 16 août 2007 à 08h29min

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L’Institut des affaires africaines de la Germen institute of global and area studies (GIGA) de Hambourg, en collaboration avec la Fondation Konrad Adenauer, a organisé lundi 13 août 2007 à Ouagadougou un atelier sur le fonctionnement du système des partis politiques au Burkina Faso. Il s’est agi de restituer les résultats d’une étude réalisée courant 2006 sur ledit sujet au pays des hommes intègres.

Porter à la connaissance du grand public les résultats d’une étude réalisée dans le second semestre de l’année 2006 sur les partis politiques en activité au Burkina Faso, tel est l’objectif d’un atelier que l’Institut des affaires africaines de la Germen institute of global and area studies (GIGA) de Hambourg, en collaboration avec la Fondation Konrad Adenauer, a organisé lundi 13 août dernier à Ouagadougou.

Les participants, venus des partis politiques concernés, des institutions de la République, de la société civile, des organismes internationaux et des missions diplomatiques, ont, une journée durant, passé en revue les diverses facettes de cette problématique à travers exposés et panels animés par des spécialistes.

Dans son bref historique des partis politiques de la Haute-Volta au Burkina Faso, en guise d’introduction à cet atelier, Dr Yacouba Banhoro du CNRST est revenu, entre autres, sur le contexte d’apparition des partis politiques avec la fin de la Seconde Guerre mondiale, en pleine domination coloniale. De 1945 à 1960, il distingue 2 moments forts de l’évolution du système de partis en Haute-Volta : le bipartisme, de 1945 à 1954, et un multipartisme qui a abouti au parti unique, de 1954 à 1960.

La période de 1960 à 1991 est celle des régimes constitutionnels avec partis politiques et de régimes dits d’exception sans parti politique classique. Cette période dont la dernière décennie (1980-1991) est considérée comme la séquence la plus mouvementée de l’histoire du pays, avec des coups d’Etat à répétition, fera place à celle dite de multipartisme intégral qui court jusqu’à nos jours, avec une floraison des partis (plus d’une centaine).

En définitive, Dr Banhoro retiendra que plusieurs systèmes de partis ont été expérimentés entre 45 et 80 : multipartisme intégral, multipartisme limité, parti unique. Toute chose qui traduit, selon lui, une certaine discontinuité dans le système partisan du pays. Dans ses sondages sur les « perceptions populaires du paysage partisan », Alexander Stroh de GIGA, partant de 3 dimensions qu’il assigne au système de partis, à savoir la fragmentation, la polarisation et l’institution, conclut, entre autres, à un système de parti prédominant et des compétiteurs au parti prédominant fragmentés ; toute chose qui rend l’alternance difficile.

La polarisation est à la fois idéologique et comportementale, avec un rôle vague de l’opposition dite modérée. Son sondage révèle aussi une confiance élevée des enquêtés aux partis politiques au Burkina Faso, comparativement à d’autres pays où la même enquête a eu lieu. « Un système de partis politiques est davantage que la somme des partis qui le composent. Ce sont surtout les relations qui lient les différents éléments qui fondent le système », dit Alexander Stroh.

"Un match de football sur un terrain incliné"

Un exposé sur lequel se seront le plus focalisés les intérêts au cours de cet atelier aura incontestablement été celui du Pr Augustin Loada de l’université de Ouagadougou. « Système de parti et système électoral burkinabè : impact sur les élections législatives du 6 mai 2007. » Tel est le thème sur lequel a « presté » le professeur. C’est un tableau terne de la démocratie burkinabè qui fut dépeint à l’occasion. Selon Augustin Loada, ce n’est pas un système de multipartisme qui prévaut au Burkina Faso mais plutôt un système de parti ultra dominant, avec une nette domination de l’exécutif sur le judiciaire et le législatif. Dans un tel contexte où, à l’analyse de l’orateur, le parti ultra dominant caporalise tout, c’est-à-dire argent, forces religieuses et traditionnelles, appareil d’Etat, les élections deviennent une formalité.

Il n’y a plus de suspens, car le gagnant est connu d’avance ; reste à savoir l’écart avec lequel il l’emportera. La compétition électorale, dans pareille circonstance, est vue par M. Loada comme « un match de football sur un terrain incliné ». Aussi, la vie d’opposant, dans cette situation, est assimilable au sacerdoce du moine, remarque-t-il. Les législatives de 2007, qui ont consacré la suprématie du parti au pouvoir, se présentent comme la fermeture d’une parenthèse ouverte par l’affaire Norbert Zongo, considère le patron du CGD.

Autres plaies du système partisan burkinabè retenues par Augustin Loada, le nomadisme politique et la pléthore de partis politiques dont la plupart, n’existant que sur le feuillet de leur récépissé, ne vivent que pour capter les fonds publics. La force de nuisance de tels « commerces » labellisés partis politiques, pour la démocratie, est telle que l’orateur se demande s’il ne faut pas « désenrégistrer » certains. En définitive, M. Loada conclut qu’avec un parti hégémonique, l’alternance ne pourra pas venir de l’extérieur mais de l’intérieur du régime lui-même. Toutefois, il avertit qu’« on peut tout faire avec les élections, sauf s’asseoir dessus ».

Une fin en queue de poisson

Après une deuxième partie qui a vu Me Bénéwendé Sankara de l’UNIR/MS exposer sur le travail des partis politiques dans la démocratisation du Faso, la dernière partie de cet « atelier marathon » a été consacrée à la problématique des femmes en politique. Des femmes élues ont, dans le cadre d’un panel, évoqué, entre autres, les difficultés rencontrées par la gent féminine sur le terrain politique. La suite donnera lieu à des débats surchauffés qui finiront par installer la salle dans un tohu bohu général que les organisateurs ne parviendront pas à contenir tant les antagonismes étaient vifs.

La goutte d’eau qui fera déborder le vase surviendra lorsqu’une femme élue du parti majoritaire évoquera des difficultés financières qui seraient un handicap majeur à leur épanouissement en politique. Un participant lui contestera une telle assertion, au motif que le parti au pouvoir détiendrait toutes les ressources du pays, qu’il gérerait à sa guise. Pour cela, il aurait accepté qu’une telle thèse soit soutenue par une femme de l’opposition. Il n’en fallait pas plus pour compromettre définitivement l’issue de l’atelier que les organisateurs finiront par interrompre.

Par Ladji BAMA

Le Pays

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