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Journée de la "Flamme de la paix" en Côte d’Ivoire : La victoire du "bien" sur le "mal"

Publié le mercredi 1er août 2007 à 08h09min

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Remise d’armes à Gbagbo et Soro

Le peuple ivoirien a, dans la ferveur populaire et la communion d’esprit, célébré la paix, le 30 juillet 2007 a Bouaké, à travers la Journée dite de
"la flamme de la paix". En présence de six chefs d’Etat africains, les Ivoiriens ont décidé de tourner définitivement le dos à la guerre, en brûlant symboliquement des armes qui ont semé terreur, désolation et mort dans leur pays ces dernières années.

Il est 11h 40 mn TU, lorsque le président ivoirien, Laurent Koudou Gbagbo, la main dans celle de son Premier ministre Guillaume Kigbafori Soro, pénètre dans l’enceinte du stade de Bouaké baptisé "Stade de la paix" en cette historique et symbolique journée.

Dans une ambiance "électrique" ou "suintait" l’esprit de l’espoir et de la paix, les deux hommes font un tour d’honneur du stade avant de prendre place à la tribune d’honneur. Puis, on annonce tour à tour les différents chefs d’Etat qui ont fait le déplacement, le facilitateur du dialogue direct interivoirien, Blaise Compaoré en tête. Lequel recevra une ovation à la mesure de son mérite immense, lui qui, pour les Ivoiriens, est le "maître d’œuvre" de cette journée, pour avoir tracé et balisé le chemin de la paix.

Le sud-africain Thabo Mbeki a droit lui aussi aux mêmes vivas de la foule, Pretoria ayant été un passage sur la route de cette paix retrouvée. Amadou Toumani Touré, Faure Gnassingbé, Joao Bernardo Viera et Yayi Boni sont logés à la même enseigne, eux qui ont manifesté "leur sens de la fraternité et de la solidarité africaine" en faisant le déplacement de Bouaké. Après l’Abidjanaise (l’hymne national ivoirien) repris en chœur par la foule, le Premier ministre Guillaume Soro pouvait délivrer son speech.

A cet instant solennel, Soro a banni toute médiocrité en livrant un message empreint de spiritualité et de rationalité sans ostentation. "En ce jour béni, je laisse éclater ma joie et je communie avec vous" dira-t-il, avant de clamer avec conviction, que "la paix est là, à Bouaké. Bouaké "capitale de la paix", d’un peuple "debout et fort qui a su transcender ses propres contradictions". Cette "détermination commune" pour construire la paix a abouti à ce "grand jour" qui voit la solidarité africaine "magnifiée".

Le peuple ivoirien, issu des 60 ethnies et de différentes confessions religieuses, "crie sa soif de la paix", poursuivra-t-il. "Deux armées ont décidé de mettre fin au sang versé à la guerre" et, Laurent Gbagbo "a la lourde responsabilité de transformer cette paix en une paix durable pour les générations futures de la Côte d’Ivoire". Après avoir cité l’écclésiaste ("Il ya un temps pour tout") il terminera en indiquant que la venue de Laurent Gbagbo à Bouaké, "matérialise la réunification de la Côte d’Ivoire". "Nul n’a le droit de ramer à contre courant du processus de paix".

Dans cette optique, il faut "tourner le dos aux intrigues, aux attentats et aux assassinats" et n’exclure personne et ne donner le sentiment à personne d’être exclu". Avant de demander à tous "une prière pour la Côte d’Ivoire", Guillaume Soro avait pris le soins de préciser que "réaliser des élections démocratiques, c’est réaliser un programme délicat, mais exaltant".

Lui succédant, Laurent Gbagbo s’inscrira dans la même veine, en remerciant ses pairs, particulièrement Blaise Compaoré qui ont contribué à l’avènement du dialogue direct, lequel a conduit à la paix. "Nous sommes à la paix" dira-t-il, invitant ses compatriotes à jouir dorénavant de leur liberté, d’aller et de venir à travers toutes les contrées du pays.

" La guerre est finie" et il faut transformer l’essai en organisant "au plus vite" des élections véritablement démocratiques. "Cela commence aujourd’hui" et, il faut "bannir" la violence car, elle est "mauvaise". Après avoir souhaité que "Dieu garde la Côte d’Ivoire en paix", pour qu’elle soit "une grande Nation", le président ivoirien pouvait, en compagnie de son Premier ministre et de ses pairs, procéder à l’autodafé des armes et munitions. Portée par une escouade des différentes forces militaires présentes en Côte d’Ivoire, la flamme de la paix fera son entrée au "Stade de la paix" et après avoir "transité" entre différentes mains, sera transmise aux deux hommes d’Etat, qui embraseront le bûcher géant.

Les généraux, Philippe Mangou et Soumaïla Bakayoko, chefs d’Etat-major des deux armées avaient auparavant scié un canon 105, puis l’avait émietté et jeté dans la cuve, en signe de renonciation des deux armées à la guerre. Ils avaient aussi remis de façon croisée à Laurent Gbagbo et Guillaume Soro, des armes dans le même esprit "de paix, d’union pour le bonheur des Ivoiriens dans un pays réunifié à jamais". Le lâcher de colombes et l’hymne national mettaient fin à cette journée "historique" au cours de laquelle le bien aura triomphé du mal pour paraphraser le "rastafoulosophe" Alpha Blondy.

Boubacar SY
Envoyé spécial à Bouaké


Ils ont dit...

Après la tenue de la Journée de la paix, quelques participants ont bien voulu nous dire les grands enseignements qu’ils tirent de cette rencontre et leur entendement du processus de paix en Côte d’Ivoire
qui vient de vivre une étape cruciale.

Blaise Compaoré, président du Faso, facilitateur du dialogue interivoirien : C’est une journée particulière, une journée de fierté, formidable et pleine de symboles. Symbole de la réconciliation en Côte d’Ivoire, symbole d’une nouvelle détermination à aller vers la paix.
Les engagements nouveaux que nous avons entendus de la bouche du président Gbagbo et du Premier ministre Soro, nous réconfortent et je pense que le chemin est celui qu’il faut prendre pour aller vers la concrétisation de tous les engagements passés pour la paix en Côte d’Ivoire. Devant tout le peuple ivoirien a été exprimé le désir de réconciliation et de paix.
Le gouvernement, le président et nous-même devons nous engager plus fortement à faire aboutir le processus et aller concrètement vers les tâches qui nous attendent”.

Laurent Gbagbo, président de Côte d’Ivoire : C’est une journée très importante, capitale pour les Ivoiriens car elle marque la fin de la guerre et consacre la réunification du pays. Je voudrais remercier les chefs d’Etat qui nous ont aidé à réussir cette réconciliation. Je suis animé d’un sentiment de joie, tout en étant groggy car je ne le réalise pas encore totalement. Je remercie le président Compaoré, cheville ouvrière de la négociation de l’Accord et de sa mise en œuvre. C’est pourquoi il est resté un peu pour que nous parlions de la suite, car, je lui ait dit de rester à nos côtés jusqu’à la fin du processus.

Seydou Elimane Diarra, ancien Premier ministre de Côte d’Ivoire : Je voulais saisir cette occasion pour saluer l’action du président Compaoré qui, depuis le début de la crise, n’a ménagé aucun effort pour que la Côte d’Ivoire se retrouve unie.

Je suis d’autant plus heureux qu’il a eu à négocier l’Accord de Ouagadougou qui a amené l’exécutif actuel, composé du couple Gbagbo-Soro. Ils ont fait un excellent travail et nous bénéficions aujourd’hui, des fruits de ce travail. Cette journée vient couronner tous les efforts pour sortir de la crise. Je me suis inscrit dans cette dynamique dès le début de la crise et bien avant cela avec le forum de réconciliation nationale. Je suis allé à Ouagadougou pour rencontrer le président Compaoré qui m’a prodigué des conseils et aujourd’hui, nous voyons un résultat tangible. Plus de rancœurs, plus de haines, plus d’injures. C’est par là que nous arriverons à sortir du tunnel et je remercie mes frères burkinabè qui même dans les moments les plus sombres, ont été à nos côtés. Les Ivoiriens doivent s’inspirer de cette tolérance pour aller de l’avant et pour que nous puissions bâtir la sous-région ouest-africaine et l’Afrique.

Siriki Konaté, ministre ivoirien en charge de l’Artisanat : L’enseignement principal c’est que l’Accord politique de Ouagadougou n’est pas illusion, un vain mot, un accord de plus. C’est un accord réel qui a touché les intérêts vitaux de tous les Ivoiriens et qui mobilise l’ensemble des Ivoiriens. Nous retenons qu’un accord signé entre nous avec l’assistance de nos frères de la sous-région, nous permet de sortir la Côte d’Ivoire de la crise. C’est la réconciliation des fils et des filles de la Côte d’Ivoire et la réconciliation de la Côte d’Ivoire avec l’Afrique. Nos frères de la sous-région nous ont encouragés à aller dans la bonne direction et c’est l’image que nous retenons de cet Accord. Il faut maintenir le cap à tous les prix.

Cet acte ne peut être un simulacre car, il fait suite à d’autres actes. L’Accord de Ouagadougou prévoit des étapes importantes et nous sommes aujourd’hui, à l’effectivité de circuler librement sur toute l’étendue du territoire. C’est l’Etat ivoirien qui était à Bouaké, retrouvant ainsi toute sa place. Les deux armées ont travaillé ensemble pour sécuriser cette grande cérémonie et c’est un symbole qu’il faut retenir. Demain, nous continuerons avec notamment le désarmement, l’identification des populations. A chaque jour suffit sa peine et petit à petit, nous irons à la paix s’il plaît à Dieu.

Mohammed Ibn Chambass, président de la Commission de la CEDEAO : Nous sommes contents de la tenue de cette journée qui indique que le travail du facilitateur, Blaise Compaoré a eu de bons résultats. Aujourd’hui, la Côte d’Ivoire est réunie et la paix revient. Le mérite en revient tout d’abord au facilitateur et ensuite, aux deux hommes d’Etat, le président Gbagbo et le PM Guillaume Soro et tout le peuple ivoirien, enfin. L’Afrique est fière et heureuse de ce travail qui ramène la paix dans l’un de ses pays membres.

Propos recueillis à
Bouaké et Yamoussoukro
par Boubacar SY


Les a-côté

* Absence remarquée de Bédié et Ouattara

Le président Henri Konan Bédié et le Premier ministre Alassane Dramane Ouattara ont brillé par leur absence à la Journée de la flamme de la paix, le 30 juillet 2007 à Bouaké. Est-ce à dire que ces deux poids lourds de la scène politique ivoirienne n’adhèrent pas à la dynamique de la paix enclenchée en Côte d’Ivoire depuis le mars 2007 ? On ose croire que non, surtout qu’ils ont été parties prenantes des discussions qui ont abouti à la conclusion de l’Accord. Peut-être ont-ils quelques appréhensions quant à une bonne application de l’Accord, mais, ce n’est pas en se mettant à l’écart qu’ils pourront influer positivement sur le processus. Ne dit-on pas que "les absents ont toujours tort" ?

* Maman Thérèse Houphouët-Boigny était là

Discrète dans un tailleur bleu marine, l’ex-première dame de Côte d’Ivoire, a honoré de sa présence la cérémonie de Bouaké. Celle dont l’époux avait dit que la paix était un "comportement" a ainsi respecté la mémoire de son défunt mari et prouvé qu’elle avait à cœur le bonheur du peuple ivoirien. Toute chose qui a valu que le président Gbagbo lui présente ses hommages dans son discours et invite ses compatriotes à l’ovationner. S’en est suivi un tonnerre d’applaudissements qui prouve que le "bélier" de Yamoussoukro, Houphouët-Boigny, est toujours présent dans le cœur des Ivoiriens et que sa femme a su entretenir l’héritage dans la discretion qui caractérise les plus grands.

* Sécurité "nerveuse" à Bouaké

La venue de six chefs d’Etat dans la deuxième ville de Côte d’Ivoire à quelque peu "fouetté" le sang de certains agents de sécurité. C’est ainsi que notre chauffeur qui manœuvrait devant l’hôtel qui a servi de pied -à-terre bouakéen à Blaise Compaoré a été prié de "déguerpir" au plus vite, sous peine de se faire "flinguer". Une menace proférée l’arme au poing par ledit agent qu’il nous à littéralement mise en joue. Nous ne dûmes donc notre salut qu’à une marche-arrière précipitée au cours de laquelle nous avons frôlé le "tonneau" Philosophe, le photographe de la Présidence burkinabè s’est contenté de dire que "trop de sécurité pouvait nuire à la sécurité". A Bouaké, en tous cas, nous nous en sommes rendus compte.

* Débandade autour du brasier de la paix

Après la mise à feu du bûcher qui devait consumer les armes de la guerre, une détonation sourde a provoqué une panique-monstre car, le président et son Premier ministre étaient à quelques mètres du bûcher. Transportés en urgence hors de la zone de danger, les deux hommes ont pu poursuivre le reste de la cérémonie sans problème. Après coup, un spécialiste en armement nous a indiqué qu’il restait peut-être un "fond de poudre" dans les armes, ce qui a pu provoquer cette déflagration. Ce qui nous rappelle à quel point les armes peuvent être destructrices. Cultivons donc la sagesse à tous les instants de la vie.

Sidwaya

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