LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Les réactions n’ont pas manqué suite à la visite de la commission Justice et Paix de l’Eglise catholique, présidée par Monseigneur Thomas Kaboré aux Femmes en noir (FEN) qui se rendent chaque premier dimanche du mois sur la tombe de Norbert Zongo et de ses compagnons.

Cette visite se situe, je pense, dans la logique de la motion qui avait été adoptée à la dernière semaine sociale de l’Eglise catholique et qui disait le désarroi engendré par le non- lieu dans l’affaire Norbert Zongo.

Favorables ou défavorables, ces réactions nous ont bien réjoui, parce qu’elles attestent qu’il n’y a et ne peut y avoir aucune indifférence par rapport à cette tragédie.

Je voudrais comparer cet évènement et ses suites à l’expérience de ceux qui circulent à bicyclette sur les petites pistes de brousse. Quand un arbre tombe sur le chemin, quand une ravine ouvre un fossé dans la route, etc, on contourne l’obstacle en ouvrant un petit sentier et peu à peu, la route principale disparaît, tant les obstacles sont nombreux auxquels on ne remédie jamais. Le village s’isole, se coupe du monde, l’ambulance et les commerçants ne peuvent plus s’y rendre...A moins de réparer la route, le village souffrira et peut-être mourra.

On ne peut indéfiniment "contourner " les difficultés et les situations tragiques qui jalonnent nos vies et celle de la nation. Il est nécessaire d’aborder ces sujets difficiles, trouver les solutions, soigner et guérir ce qui doit l’être, faire advenir la vérité, réparer, etc.... On ne peut indéfiniment dire, "passons à autre chose », sous peine de détruire notre lien aux autres et d’étouffer avec nos questions non résolues. La confiance disparaît, la vie ensemble devient difficile, sinon explosive.

C’est ainsi que j’interprète l’intervention de cette commission : Monseigneur Thomas Kaboré, les membres de la commission, et bien d’autres ne sont pas des magistrats ni des enquêteurs et ne peuvent donc pas faire avancer ce dossier difficile sur le strict plan de l’enquête et de sa solution juridique. Mais ils nous rappellent que tant que des gens sont dans la souffrance et dans l’attente, la compassion exige d’être présents aux côtés de ceux qui souffrent, des victimes....

En venant rencontrer les FEN et encourager leur démarche, ils nous rappellent que la vraie paix, la paix sociale dont nous rêvons et qui permet à chacun de trouver sa place dans notre société, se construit sur la vérité et la justice, sans haine et sans violences.

La justice raisonnable, celle qui cherche, trouve et sanctionne les meurtriers et les commanditaires, celle qui dit le droit sans consacrer l’impunité, cette justice raisonnable n’a pas encore eu lieu dans cette affaire.

En attendant, les FEN, comme les mères de la place de mai sous d’autres cieux, nous rappellent à toutes et à tous - et pas seulement aux autorités politiques - que les engagements pris lors des journées de pardon sont loin d’avoir été remplis.

Il serait bon de cesser de tourner autour de nos problèmes, d’oser regarder notre passé pour le guérir, pour aborder l’avenir dans une vraie paix, avancer sur les chemins de la réconciliation pour qu’enfin, le pardon demandé et donné dans la lumière de la vérité, nous rende enfin libres pour avancer !

Que Dieu bénisse le Burkina, ses filles et ses fils !

Père Jacques LACOUR (jacqueslacourbf@yahoo.fr)

(1) Parole de Jésus citée par l’Evangile de St Jean

Le Pays

Vos commentaires

  • Le 24 juillet 2007 à 11:02 En réponse à : > <I>Droit dans les yeux </I> : "La vérité vous rendra libres" (1)

    Merci père Laccour,
    C’est aussi cela le combat pour l’évangile. Dieu n’est pas à chercher loin. Il est à côté, dans l’Homme qui souffre, dans qui rit, dans l’Homme martyrisé.... Si nous sommes des enfants de ce Dieu bon, sachons aller du côté de la vérité et cessons de cautionner l’oppression, l’injustice et la violence. S’il n’est besoin d’aucune force morale ou intellectuelle pour faire de la violence, il en faut cependant beaucoup pour réparer les méfaits de la violence (si toutefois c’est réparable). C’est pourquoi, il me semble que c’est un devoir moral pour des personnes éprises de paix de se reconnaître dans l’action des FEN qui demandent réparation dans la paix.
    Il est facile pour des journalistes achetés et engraissés d’écrire ce qu’ils "pensent" (en vérité pensent-ils vraiment ?). Ils ont leurs raisons. Mais c’est souvent faire peu cas de dignité. Imaginez un enfant de 7 ans. Tout fière d’aller à l’école avec tous les projets nourris pour lui par ses parents. Et voilà que le père ou la mère est trucidé parce que quelqu’un le veut ainsi. Et paf, notre fier petit enfant est orphelin, sans appui, déséquilibré.... et en veut à la société. Et des gens pensent qu’il faut savoir passer à autre chose. Qu’est-ce qui est plus important dans cette vie donc, pour qu’on évacue les drames des autres de façon désinvolte ?
    Il s’agit simplement pour nous de rester humain. de savoir peser la douleur des autres et dire que pour bâtir une société inclusive, il ne faut exclure personne. Cela passe aussi par une réparation des coeurs meurtris et une solution à la détresse des autres.

    Merci mon père !

    • Le 24 juillet 2007 à 15:41 En réponse à : > <I>Droit dans les yeux </I> : "La vérité vous rendra libres" (1)

      Très beau texte. Merci.

      • Le 25 juillet 2007 à 14:17, par yassa En réponse à : > <I>Droit dans les yeux </I> : "La vérité vous rendra libres" (1)

        Merci mon père pour votre analyse bien logique et cohérant

        l’autre disait ceci : "Quelque soit la deuré de la nuit le soleil apparraîtra".j’encourage les FEN car rien de ce monde n’est au dessus de la prière .Les hommes peuvent bien dormir devant le problème d’autrui mais quand à Dieu il ne dors jamais.
        "si les hommes refusent de faire justice sur le dossier de mon fils alors Dieu fera sa justice :disait la maman de Norbert Zongo dans le film Bouribana". Merci père Nous comptons beaucoup sur vous les hommes d’eglise pour que la lumière soit faite sur ce dossier qui traine toujours dans les tirroires.
        illas

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina Faso : La politique sans les mots de la politique
Le Dioula : Langue et ethnie ?
Sénégal / Diomaye Faye président ! : La nouvelle espérance