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Affaire des informières bulgares : Khadafi jusqu’au bout de sa logique

Publié le mardi 17 juillet 2007 à 08h10min

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Les familles des enfants libyens contaminés par le sida ont, en définitive, accepté un dédommagement d’un million de dollars par victime. Cet accord est considéré comme une renonciation de leur part à la peine capitale à l’encontre des cinq infirmières bulgares et du médecin palestinien accusés d’avoir inoculé le virus du sida à 438 enfants dont 56 sont décédés.

La stratégie du président libyen Moammar Khadafi aura été in fine payante. En donnant, dans cette afffaire, l’impression de laisser la Justice faire et de laisser braire, Khadafi veut manifestement renvoyer l’image d’une Justice libyenne qui n’est pas sous sa pression.

Peu importe l’idée que l’extérieur se fait de cette Justice, elle aura travaillé jusqu’au bout. Après la Cour suprême libyenne, qui a confirmé la condamnation à mort des infirmières bulgares et du médecin palestinien détenus depuis 1999, il a fallu avoir recours au Conseil supérieur des instances judiciaires. Vu sous cet angle, on peut dire que la Libye a tenu tête à l’Occident, d’autant qu’elle était soumise à une forte pression internationale.

De l’affaire, Khadafi, pour sa part, en a fait une récupération politique. Le moins qu’on puisse dire est qu’une fois de plus, le Guide de la révolution libyenne, de qui on a imploré la clémence, a été courtisé. Si fait que le Guide se sentait en position de force, poussant quelque part la Libye à maintenir la barre, toujours haut.

Pour ainsi dire, l’homme fort de Tripoli démontre ses talents de redoutable négociateur. L’accord intervenu ne saurait faire oublier aux six praticiens condamnés par la justice libyenne, sa forte valeur symbolique. Aux yeux des parents des victimes et d’une certaine opinion libyenne, les infirmières et le médecin ont bel et bien été reconnus coupables des faits. Ce qui est non seulement bon pour le moral, mais aussi sauve la face de la Libye qui n’entendait pas être mêlée à cette tragédie. Alors que le système de santé était jugé défaillant à une période où le pays était sous embargo, il fallait à tout prix éviter de faire le procès du régime en ... déballant le linge sale du système de santé, en public. C’est pratiquement chose faite.

En fin de compte, de même que l’Etat libyen s’en tire à bon compte, l’Occident peut crier victoire dans la mesure où ses six ressortissants étrangers ne moisiront plus dans les geôles de la Libye. Chaque partie sort donc finalement gagnante dans cette tourmente partagée.

Mais à y voir de près, on est porté à croire que la Libye en sort plus gagnante, elle qui, en apparence, tenait à rendre à l’Occident la monnaie de sa pièce.

Comme on le sait, le Conseil de sécurité de l’ONU avait définitivement levé ses sanctions contre la Libye, seulement après que Tripoli a accepté de dédommager les familles des victimes de deux attentats d’inspiration libyenne, ceux de Lockerbie, et du DC 10 d’UTA.

Autant le retour de Tripoli dans le concert des Nations après plus de dix ans d’ostracisme lui a coûté cher, autant elle a voulu négocier à prix d’or l’élargissement des six condamnés.

Certes, la plupart des Etats africains ont encore une image à construire quant à l’indépendance et à la crédibilité de leur Justice. Mais la forte propension des pays du Nord à vouloir juger eux-mêmes leurs ressortissants auteurs de délits sur d’autres sols, cache parfois mal leur volonté de délivrer ces derniers des juridictions étrangères. Et si les condamnés ont ou non, eu leur part de responsabilité dans la contamination des enfants en Libye, tout laisse croire en tout cas qu’ils ne seront pas poursuivis, une fois qu’ils seront rentrés au bercail, les pays dont ils sont originaires s’étant déjà montrés solidaires d’eux.

Du désaccord survenu entre la Libye et les pays qui militent pour l’élargissement pur et simple des six condamnés, bon nombre d’Etats africains retiendront du peuple libyen - et des pays arabes en général - qu’ils n’aiment pas se laisser marcher sur les pieds, pour rien au monde.

En somme, ils sont « pénétrés » d’une fierté nationale que les peuples situés particulièrement au Sud du Sahara n’ont pas toujours. Comment ces derniers pourront-ils se faire respecter et être craints s’ils se mettent eux-mêmes en situation d’infériorité dans leurs rapports avec les autres, notamment les Occidentaux ?

En tout état de cause, Khadafi, qui n’a visiblement aucun complexe à l’égard de personne, indique donc la voie à suivre à bien des peuples africains qui, malgré leur pauvreté, doivent se montrer moins complexés et plus dignes.

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 17 juillet 2007 à 10:35, par Gorkomawdo En réponse à : > Affaire des informières bulgares : Khadafi jusqu’au bout de sa logique

    Il ne faut pas faire l’éloge de Kaddafi. Il pense que tout le monde devrait être à ses genoux. Voilà que dans son pays, on expulse des burkinabé pendant qu’au même moment, au sommet de l’UA au Ghana, notre prédident n’avait pas l’air de le suivre dans son projet de gouvernement africain. Au même moment la banque lybienne du Burkina (que tous connaissent) introduit des conditions draconiennes pour l’octroi des prêts. Pourquoi tout ceci ? Pourquoi nous burkinabé sommes-nous si burkinabêtes pour accepter tout ceci ? Il faut expulser tous les lybiens du Burkina car ils ne sont pas si irréprochables qu’on le pense, et fermer leur banque et on ne mourra pas de faim pour autant. Il faut savoir que Kaddafi n’est pas le président du Burkina Faso et on s’en fout de lui, même si certains politiciens appatrides courrent aller s’agenouiller devant lui et laper ses billets.

  • Le 17 juillet 2007 à 16:10 En réponse à : > Affaire des informières bulgares : Khadafi jusqu’au bout de sa logique

    D’accord avec l’intervenant précedent.
    Devons nous brader le peu de dignité qui nous reste au profit d’ambitions mercantiles ?
    Pourquoi n’avons nous pas au burkina des HOMMES couillus (excusez moi du terme) pour prendre des positions fermes et concrètes pour réclamer un traitement équitable de nos concitoyens qu se trouvent sur d’autres sols ?

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