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Drum Hassadulah, artiste musicien : “Abidjan ne m’a pas souri”

Publié le jeudi 12 juillet 2007 à 07h28min

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Drum Hassadulah

Drum HASSADULAH, à l’état civil Abdoulaye Sourou SANOU, est un artiste musicien au parcours pour le moins atypique Dès l’adolescence, il crée une troupe où il est le maître d’orchestre. Végétant dans la « galère » d’autant qu’alors son art ne le nourrissait pas, le jeune artiste finit par tenter l’aventure avec pour point de chute Abidjan.

La musique, il l’a dans l’âme et il veut en faire une profession ce qui le ramène au Burkina Faso en 2006 sous la tutelle d’un producteur qui finit par être son arrangeur. Point de découragement, « Drum » croit en Dieu et relance sa chance avec ETK-Production. Cette fois, c’est la bonne, c’est la naissance de son premier bébé de 8 titres dont la sortie est pour bientôt.
Très imprégné de sa tradition, celle bobo, il nous livre ses sentiments et son combat pour l’Afrique.
Lisez plutôt !.

Qui est Drum HASSADULAH ?

Drum HASSADULA (DH) : Je me nomme SANOU Abdoulaye Sourou à l’état civil. Souvent vous entendez parler de l’hôpital Sourou SANOU. Sourou veut dire médicament.

Comment êtes-vous venu à la musique ?

DH : La musique est une passion pour moi. Depuis l’âge de 17 ans, je me suis lancé dans cette aventure en créant une troupe de danse traditionnelle où j’étais le chanteur.

A 17 ans déjà vous étiez à la tête d’une troupe. Comment est-elle née ?

DH : Cette troupe, je l’ai nommée « Danyoro ». Nous avons même remporté un troisième prix à Bobo-Dioulasso en 1997. « Danyoro » c’est un terme de l’art dramatique bobo. De la musique est jouée pour accompagner des scènes de théâtre.

J’ai fait mes premières années au sein de cette troupe où vraiment j’ai beaucoup appris. Mais en son temps. Je le faisais réellement par passion, je ne peux pas dire que je gagnais ma vie mais tout le groupe était mobilisé et on organisait des sorties dans les villages où on gagnait de quoi assurer la pitance.

Vous venez de boucler l’enregistrement de votre premier album. A quand remonte tout ce travail ?

DH : Je l’ai entamé en Côte d’Ivoire. Quand je suis arrivé là-bas, la musique était bien développée.
Un jour, je me suis dit et si j’essayais de moderniser la musique que je faisais au village. En 1998, j’ai commencé la composition des textes jusqu’en 2000 où j’ai essayé de rentrer en studio. Comme j’avais beaucoup d’amis qui fréquentaient le milieu du Show-Biz. J’ai croisé plusieurs artistes ivoiriens qui m’ont donné des conseils et les contacts nécessaires tels Mouloucoucou DJ, Erikson le Zoulou.

Ce nouvel opus est baptisé « dignité africaine ». Pourquoi un tel titre ?

DH : C’est un titre général que j’ai décidé de donner à tous les textes qui composent l’album.
Je chante en bobo. Quand je parle de dignité africaine c’est de la tradition africaine qu’il s’agit. Vous savez que nous sommes une jeunesse en perdition. Toutes les valeurs ancestrales ne sont plus respectées et de plus en plus nous sommes sans repères.

Pourquoi cette situation selon vous ?

DH : C’est cette histoire de modernisation, de civilisation à l’occidentale qui nous fait tourner le dos à notre tradition. Pour moi on peut respecter la coutume tout en étant civilisé. Nos coutumes sont notre civilisation. Mais nous ne refusons pas l’influence de la diversité culturelle.

Votre album comporte 8 titres. Quels sont les thèmes que vous abordez ?

DH : L’album est d’abord un mélange de rythme qui va du reggae au coupé-décalé et surtout le rythme du terroir bobo où je suis né. Je parle de politique africaine pour dire qu’il y a certains politiciens qui mettent le feu à leur pays et sont incapables de l’éteindre, s’ils ne se réfugient pas dans des pays étrangers. C’est pourquoi je dis « politique africaine, vraiment ping-pong ». Il y a le titre « Minfire » en bobo qui signifie l’acculturation de la jeunesse africaine. Nous avons suivi pendant longtemps le Blanc et aujourd’hui nous voulons nous rattraper pendant que les anciens qui pouvaient nous montrer notre coutume deviennent de plus en plus rares.

Je parle aussi de mariage. Là pour critiquer le fait que le Bobo ne s’est pas ouvert aux autres peuples par des liens matrimoniaux. Nous ne sommes pas nombreux parce qu’on a préféré se marier entre nous sans s’ouvrir autres ethnies.

Quel est le titre phare de l’album ?

DH : Nous avons deux titres que sont « Minfire » et « ma copine ». Ce dernier morceau est un featuring avec DJ Tiffus. Pour l’instant le choix n’est pas encore fait. Vous savez, le choix du coupé-décalé vient de l’influence que j’ai eue du côté d’Abidjan et du milieu que je fréquentais.

Pourquoi avoir choisi Drum HASSADULAH comme ton nom d’artiste ?

DH : « Drum », c’est tam-tam en anglais, pour me faire entendre. Dans nos traditions c’est le tam-tam qui annonçait toute forme de nouvelle que ça soit le malheur, le bonheur ou les réunions de conseils. C’est un relais qui avait son langage propre et seuls les initiés pouvaient le lire. « HASSADULAH », est composé de mon nom SANOU Sourou Abdoulaye.

Avez-vous rencontré des difficultés dans l’enregistrement de cet album ?

DH : Il y a eu plein de difficultés. Je ne m’imaginais pas arriver là. A Abidjan c’est le problème de producteur qui m’a fait râler surtout avec la crise ivoirienne. Un Burkinabè était mal vu. Par la suite j’ai rencontré un jeune Sénoufo du nom de Pénard SOUROU qui a décidé de s’engager pour m’aider. Quand on est arrivé ici, nous avons fait le tour des studios, comme Seydoni, Tam-Tam, Kalao, sans succès. Quand on a contacté ETK-Production, le directeur s’est engagé à nous soutenir. C’était depuis 2006.

Dans ce coup-là, mon producteur ivoirien m’a joué un faux tour. Il a signé un contrat avec ETK, on l’a financé mais il m’a roulé et est rentré à Abidjan. Je suis allé revoir le PDG de ETK qui ne m’a pas rejeté. C’est grâce à lui que l’album verra le jour.

La rencontre avec DJ Tiffus, s’est passée comment ?

DH : Le PDG de ETK-Production a fait venir un arrangeur ivoirien du nom d’Apocho pour qu’on revoie le mixage de certains titres. Cet arrangeur travaillait avec le groupe Anaconda DJ et c’est là que j’ai connu Tiffus et il a décidé de travailler avec moi sur le morceau « ma copine ».

Etes-vous marié ?

DH : Non, mais j’ai deux enfants, des jumeaux qui sont avec leur mère à Abidjan. Ce n’était pas facile en son temps. Cette étape a beaucoup marqué ma vie.

Votre aventure à Abidjan. Quels sont les points qui vous ont beaucoup marqués ?

DH : Abidjan ne m’a pas beaucoup souri surtout au cours des voyages. On est constamment dans la peur avec les tracasseries et autres humiliations sur la route. Il a fallu que je me débarrasse de ma Carte d’Identité Burkinabè (CIB) pour pouvoir circuler. C’est après que des amis m’ont aidé à confectionner une carte d’artiste.

Tu as des conseils à donner à la jeunesse africaine ?

DH : Oui. Surtout à ceux qui veulent tenter l’aventure européenne « sans papier ». Qu’ils se ressaisissent. Cela nous fait perdre notre dignité. Moi le jour que je vais mettre pied là-bas, c’est que c’est pour du concret.

Ton combat pour l’Afrique c’est lequel ?

DH : C’est d’arriver à faire prendre conscience à la jeunesse de la richesse culturelle qu’elle perd. C’est nous montrer digne de ce continent et fier d’être Africain, d’être Noir. Si en Afrique entre frère de peau on se dit étranger, ce n’est pas les Européens qui n’ont pas la même couleur que nous qui seront en reste.
C’est nous-mêmes qui croyons cette situation d’humiliation. C’est notre combat qui doit montrer la dignité africaine.

Par Issoufou MAIGA

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