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Etats-Unis d’Afrique : L’union qui divise

Publié le mardi 3 juillet 2007 à 08h07min

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La majeure partie de ce que le continent africain compte comme chefs d’Etat, de gouvernement ou de têtes couronnées se retrouve présentement dans la capitale ghanéenne, Accra, pour le 9e sommet de l’Union africaine (UA). Au menu de cette grand-messe ouverte le 1er juillet dernier et pour 72 heures, le projet des Etats Unis d’Afrique cher au guide libyen Mouamar Kadhafi.

A priori, l’on devrait se réjouir que l’unité africaine tant désirée préoccupe (maintenant) les nouveaux maîtres du continent, ceux qui sont venus aux affaires après l’ère des Kwame N’Krumah. Malheureusement, la charrue semble avoir été mise avant les boeufs comme d’ailleurs on en a l’habitude sur le continent noir.

Au lieu que le projet soit applaudi, accueilli avec enthousiasme, c’est plutôt la méfiance, le scepticisme qui caractérisent plus d’un Africain. A Accra, ceux-là mêmes qui doivent discuter du projet ne sont pas sur la même longueur d’onde. En effet, on a entendu par exemple des ministres des Affaires étrangères adopter sans réserve le projet en affirmant tout simplement que c’était le moment de le réaliser avec la mise en place immédiate du gouvernement, de l’Armée unique tel que prévu.

Pour eux, c’est maintenant qu’il faut réaliser l’unité sinon ce ne sera plus possible. Par contre, d’autres chefs de diplomatie estiment que c’est un peu prématuré de réaliser l’unité en question. A leur avis, il faut faire preuve de réalisme car ce n’est pas par un coup de baguette magique que l’on amènera subitement les Africains à parler d’une seule voix, à penser et agir ensemble, bref à se donner la main pour former un bloc homogène.

Dans le même temps, certains ministres pensent également la même chose en préconisant le renforcement d’abord des organisations sous-régionales comme la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) ou encore la South african development community (SADC).

Les positions de ces différents ministres des Affaires étrangères reflétant sûrement celles de leurs mentors, à savoir les chefs d’Etat ou de gouvernement, c’est dire que ces lignes de démarcation se retrouveront forcément au niveau de ces derniers. A l’analyse , il est constant que personne ne remet en cause la nécessité de s’unir. Seulement, c’est la méthode utilisée et (pour ne pas dire surtout) la personne porteuse du projet, le guide libyen, qui posent problème. Bien que Mouamar Kadhafi se soit apparemment assagi avec le temps, son attitude suscite bien des interrogations.

Quelle mouche a pu le piquer pour qu’il s’intéresse depuis un certain temps à l’Afrique subsaharienne ? Pourquoi s’est-il mué subitement en panafricaniste après avoir, par le passé, soutenu par exemple des rébellions, des mouvements séparatistes ? En somme, Kadhafi s’est-il suffisamment amendé pour que l’on puisse accorder foi et crédit à ce qu’il fait ?

A l’évidence, on peut dire que l’union n’aurait sans doute pas fait autant de gorges chaudes si elle était chapeautée par une personne qui fait plus ou moins l’unanimité sur son nom. C’est dire que la méthode, la manière comptent également.

A propos de méthode, celle utilisée par le guide libyen ressemble à une entreprise de construction qui commence par le toit au lieu de la fondation. En pareille situation, nul besoin d’être devin ou expert pour savoir que cela sera difficilement réalisable, pour ne pas dire impossible.

Il est établi que le guide a brûlé des étapes essentielles et importantes dans le cadre de son projet ou plutôt de son rêve. La logique, le bon sens voudraient que l’on prête attention à bien des questions pratiques qui, si elles n’étaient pas résolues, pourraient gripper la machine de l’Union.

Par exemple, quel régime sera mis en place dans le cadre du gouvernement unique ? Serait-ce un régime républicain ou monarchique ? Quels critères remplir pour être membre de ce gouvernement ? Où celui-ci sera-t-il basé ? Comment se fera l’exploitation des ressources désormais communes ? Les Etats Unis d’Afrique seront-ils une fédération ou une confédération ?

Jusque-là, l’on n’a pas de réponses à ces questions et à bien d’autres qui taraudent les esprits. Aucun Africain ordinaire ne connaît dans ses moindres détails le contenu du projet du guide libyen. Pourtant, ce devrait être le cas pour que les peuples puissent donner leur avis à travers par exemple un référendum. Leur avenir est en jeu mais ils sont royalement ignorés par les dirigeants.

D’ailleurs, il est démontré que ce sont ces derniers qui constituent les obstacles à l’intégration, à l’unité des peuples, avec leurs lois et leurs attitudes aux antipodes des intérêts des gouvernés. C’est donc en spectateurs que les peuples assistent au 9e sommet de l’UA où les chefs d’Etat et de gouvernement se tirent déjà entre les pattes. C’est déjà en soi un mélodrame, comme l’Afrique en a l’habitude.

Le Pays

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