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Rébéllion nigérienne : Tandja se défausse sur les journalistes

Publié le mardi 3 juillet 2007 à 08h04min

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Le journalisme est un métier passionnant, et ceux qui l’exercent le savent mieux que quiconque. Mais les risques ne manquent pas dans ce métier quel que soit votre talent devant une feuille blanche.

Que vous soyez inspiré ou pas sur un sujet que vous devez aborder, il faut jeter sur le papier. Venir à bout d’un papier qui vous paraissait compliqué au départ vous donne une satisfaction morale. C’est un peu partout dans certains corps de métier. Mais en journalisme, les choses peuvent se présenter autrement. La moindre information déplacée peut vous coûter cher si vous avez en face un puissant monarque.

Le dernier exemple en date, c’est ce qui s’est passé récemment au Mali avec ce fameux article « la maîtresse du président de la République », qui a valu l’incarcération de notre confrère malien Mohamed Seydina Oumar Diallo du journal « Info Matin ». Un sujet de dissertation qui n’avait aucun rapport avec le chef de l’Etat Amadou Toumani Touré (ATT), qui s’est senti visé à travers cet écrit. D’autres journalistes et un professeur ont subi le même sort que Seydina.

Malgré la journée sans presse, plutôt bien suivie, organisée le 25 juin 2007 à la veille de l’audience, les protagonistes ont tous été reconnus coupables « d’offense ou de complicité d’offense au chef de l’Etat ».

Le procès, rappelons- le, s’était déroulé à huis clos en l’absence des avocats de la défense, qui manifestaient ainsi leur opposition à « cette parodie de justice », laquelle a donné le verdict suivant : deux mois de prison ferme et 150 euros d’amende pour Nana sahib Santara, le professeur, et treize jours ferme pour Seydina. Les quatre directeurs de publication ont écopé de quatre à huit mois de prison avec sursis et de 300 euros d’amende.

Si au Mali, cette atteinte à la liberté d’expression étonne plus d’un, on ne peut pas dire qu’il en soit de même au Niger, où la presse est constamment aux abois. Il y a un an, le directeur de publication de l’hebdomadaire nigérien, « Air Info », Maman Abou, et un de ses journalistes, Lalo Kéita, avaient été condamnées par le tribunal correctionnel de Niamey à 18 mois de prison et cinq millions de FCFA d’amende pour « diffamation et publication de fausses nouvelles ».

Ils avaient été interpellés à la suite de la publication d’un article dans lequel ils accusaient le Premier ministre, Hamadou Amadou, « de courtiser à fond les Iraniens » en risquant de provoquer une rupture avec les « Chancelleries occidentales et de liquider toutes les entreprises appartenant aux Blancs ».

Depuis quelques jours, ce pays est sous le feu des projecteurs avec la rébellion touareg qui accuse le pouvoir central de n’avoir pas tenu ses promesses contenues dans l’accord de paix de 1995 et portant sur l’intégration des anciens combattants à l’armée nationale ainsi que sur la fin de la marginalisation économique du nord du pays.

Aujourd’hui, la trêve semble être rompue, puisqu’un groupe d’hommes armés se réclamant du Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ) a tenté de s’attaquer aux avions de reconnaissance des Forces armées nigériennes stationnés sur l’aéroport international Mano Dayak d’Agadez (900 km au nord de Niamey).

Une situation inquiétante sur laquelle s’est penché le bimensuel « Air Info » qui avait consacrée sa dernière édition à la couverture d’un raid des rebelles du MNJ, lequel s’était soldé par la mort de 15 militaires le 22 juin à Tazarzatt, aux confins du Niger, du Mali et de l’Algérie. Un journal qui se veut sérieux ne passe pas sous silence un tel événement. Ce qui devait amener les autorités à prendre au sérieux un tel fait. Mais à Niamey, on n’entend pas la chose de cette oreille.

Savez-vous ce que l’homme fort du pays a décidé de faire ? Eh bien, au lieu de mettre dans un premier temps ses troupes en alerte, il a préféré suspendre le journal en question pour trois mois. Pour confirmer son autoritarisme, il a mis en garde trois autres publications, « coupables », dit-on, d’entreprise de « démoralisation des troupes » pour avoir évoqué des attaques de rebelles qu’il qualifie de trafiquants d’armes et de vendeurs de stupéfiants.

Tandja, qui a nié l’existence d’une rébellion dans son pays, se rend maintenant compte que c’est une réalité sur le terrain. Au lieu de se défausser sur les journalistes, il devrait comprendre que la solution au problème touareg n’est pas de les jeter en prison. En tant que militaire, il aurait dû quitter les appartements de son palais et se rendre au nord du pays pour voir si « Air Info » distille de fausses informations.

Le régime nigérien n’a pas besoin de ça quand on sait qu’il devrait mener un combat permanent contre le sous-développement.

Justin Daboné

L’Observateur

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Vos commentaires

  • Le 4 juillet 2007 à 17:56, par Gyengani jean-Marie En réponse à : > Rébéllion nigérienne : Tandja se défausse sur les journalistes

    Pauvre Afrique, voici un président en qui le peuple nigérien a confié son destin et qui pose des actes complètement en déphasage avec les comportements dans un pays démocratique. Au lieu de s’en prendre aux journalistes, le président TANDJA devrait plutôt avoir l’intelligence de cerner la réalité de la rebelion qui s’exprime dans son pays. Quand le peuple ne peut plus s’exprimer librement, il ne faut pas s’étonner de voir des rebelions naître.
    Il ya bel et bien une rebelion au Niger et les autorités nigériennes, le président en premier lieu doivent favoriser le dialogue.Il faut éviter les fuites en avant et regarder la réalité en face et de manière courageuse. Quand on avait parler de détournement de fonds dans l’éducation, le premier ministre d’alors avait nié l’évidence ; ce sont les députés de sa propre majorité qui l’ont censuré et il est parti. Sachons donc tirer leçon des expériences passées.

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