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Force hybride au Darfour : Pourvu que Béchir montre toute sa bonne foi !

Publié le jeudi 14 juin 2007 à 07h15min

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Enfin ! Pourrait-on s’exclamer, face à la dernière option prise par le régime de Khartoum d’autoriser l’envoi d’une force mixte composée d’éléments de l’ONU et de l’Union africaine pour le maintien de la paix au Darfour.

Après avoir longtemps défié et nargué la communauté internationale sur ce terrain, Béchir a enfin lâché du lest, donnant ainsi lieu à la plus grande opération de maintien de paix rarement vue au monde. La pression internationale qui s’est particulièrement intensifiée sur Khartoum ces derniers temps est sans doute à la base de ce revirement de situation au Soudan.

En effet, l’on se rappelle que ces derniers mois ont vu naître une coalition des grands de ce monde en faveur d’un retour de la paix au Darfour. A ce sujet, la pression secrète de la Chine, jusqu’ici considérée comme le complice du régime soudanais a, sans doute, été pour beaucoup dans ce volte- face soudain de Béchir et ses sbires dans la crise du Darfour. Aussitôt après l’annonce de cette nouvelle mardi dernier, la communauté internationale a crié victoire.

D’aucuns ont vu dans ce geste du régime soudanais un signe d’espoir quant à l’imminence d’une fin de la géhenne darfourienne. Mais n’y a-t-il pas lieu de mettre un bémol à cet optimisme quand on sait la versatilité de celui que l’on a en face ? Quelle prouesse Oumar El Béchir n’a-t-il pas réalisée en matière de retournement de veste et de reniement de soi ? Combien de fois n’a-t-il pas renoncé à ses propres engagements ?

En tout état de cause, s’il est vrai que la décision qui vient d’être prise par Khartoum est salutaire, il reste que l’épreuve du terrain est une autre paire de manches. Il y a certainement lieu d’attendre Béchir à l’oeuvre, au moment de la mise en oeuvre de l’accord tripartite qui l’engage désormais avec l’ONU et l’UA pour tester véritablement sa bonne foi. Cela parce que c’est à l’aune du terrain que l’on pourra véritablement mesurer la sincérité de l’homme fort de Khartoum et sa volonté réelle d’aller à la paix.

Car, rien ne dit, au stade actuel des choses, que celui-ci n’ait accepté cet accord que du bout des lèvres. Il reste à poser des gestes forts sur le terrain, à travers une coopération franche sans un esprit de roublardise pour convaincre les uns et les autres. Pour ce faire, le rôle de l’ONU et de la communauté internationale en général, reste prépondérant. Il serait imprudent de se laisser obnubiler par cette concession de Béchir et oublier l’essentiel.

Un état de veille permanent est plus que nécessaire pour continuer à contraindre ce régime, presqu’aux abois, à la pacification totale du Darfour. En effet, au-delà de la pression, il faut reconnaître que Béchir et ses hommes ne pouvaient pas continuer indéfiniment de cacher au monde cette plaie béante que constitue le Darfour. Sa puanteur de plus en plus suffocante avait commencé à devenir insupportable pour le monde entier et il fallait coûte que coûte arrêter le massacre.

Aussi ce régime a-t-il dû réaliser que son obstination allait, à la longue, devenir suicidaire pour lui-même. La cohabitation raciale au sein du gouvernement à Khartoum, qui était de plus en plus éprouvée par le massacre de la population négro-africaine, finirait par craquer. Ce qui serait mortel pour lui. Une autre leçon à tirer de cette question du Darfour est sans conteste celle de l’unilatéralisme américain. En d’autres temps, notamment avant l’invasion irakienne, une telle obstination de la part d’un régime aussi fort fût-il n’était envisageable.

Si Khartoum a pu oser jusqu’à ce point, c’est aussi le signe que l’ONU a montré toute sa faiblesse face à l’indiscipline caractérisée de certains qui veulent donner des leçons de démocratie au monde pendant qu’eux-mêmes foulent royalement aux pieds les principes de base de celle-ci. Cette évolution positive de la situation au Darfour ces derniers temps, montre une fois de plus que chaque fois que tous les grands de ce monde s’unissent autour de l’ONU pour une cause, il n’y a pas de raison que cela n’aboutisse pas.

Continuer, chacun de son côté, à naviguer au gré des intérêts particuliers et égoïstes, l’ONU restera toujours cette coquille vide, incapable de la moindre autorité sur les micro-nations, au grand bonheur de quelques aventuristes qui n’hésiteront pas à marcher sur les corps de leurs concitoyens pour assouvir leurs appétits cannibales. Les moyens pour la mise en oeuvre du processus ainsi enclenché, on le sait, ne seront pas faciles à réunir. L’on parle même d’attendre jusqu’à la fin de l’année 2007. Il est indéniable qu’une si longue attente peut jouer négativement en faveur de la paix.

Néanmoins, il faut souhaiter que le consensus de la coalition internationale qui vient de voir le jour reste intact jusqu’au bout. Les récentes mises en garde du G8, la position prise désormais par la Chine, celle des Etats-Unis, sans compter l’avènement de Sarkozy à la tête de l’Etat français et la récente visite de son ministre des Affaires étrangères dans la région, sont autant de facteurs qui ont sérieusement pesé dans la balance. Si une telle unanimité demeure dans le temps, il n y a pas de raison qu’elle ne vienne pas à bout du régime Béchir, même si celui-ci essaye toujours de sauver la face à travers quelques conditions posées çà et là au sujet du commandement de la force de paix.

Le Pays

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