Ces deux pays ont forcé l’admiration par leur hardiesse. Ils ont pourtant en commun d’être considérés comme pauvres, en retard et peu avancés dans l’expérience démocratique. Reste aux Africains à s’inspirer réellement de ces exemples. Mais le pourront-ils vraiment ?

Ce qui vient de se passer à Bamako et Niamey confirme nos propos : l’appareil d’Etat a périodiquement besoin en Afrique de sérieux coups de balai qui le débarrassent de ses oripeaux. Dans toutes ses éditions, "Le Pays" n’a de cesse d’interpeller les classes dirigeantes africaines : la misère siège et croît dans nos villes et campagnes, et le vent de la contestation mugit de plus en plus fort sur le continent.

Les peuples appauvris n’en peuvent plus de subir l’arrogance, la suffisance et la cupidité d’élites politiques et économiques qui ont démissionné de leurs obligations vis-à-vis du citoyen électeur. Mais il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut point entendre, et il n’ y a pas pire aveugle que celui qui ne veut point voir. Ceux qui n’y croient pas ou feignent de ne rien voir, n’auront certainement pas le temps de s’en repentir.

Aussi faut-il se féliciter des réussites du Mali et du Niger qui ont fait des pas décisifs dans la répression des délinquants à col blanc.

Au Mali, la lutte contre la corruption et les détournements gagne du terrain, notamment dans les sociétés d’État. Des fonctionnaires indélicats dont plusieurs hauts responsables alliés au pouvoir d’État ont ainsi été jetés en prison. Des sommes ont été récupérées et les procédures suivent leur cours.

Ceci, grâce au courage et à la détermination des responsables et membres des structures chargées de lutter contre ces fléaux. Pour plus d’efficacité, ils avaient exigé et obtenu de travailler en toute indépendance. Cela leur permet aujourd’hui de veiller sur les intérêts du peuple. Les autorités maliennes semblent avoir résolument opté de ne point couvrir les indélicatesses de personnes compromises. Cela est très honorable.

Au Niger, l’opposition minoritaire est parvenue à faire voter une motion de censure à l’origine du départ du Premier ministre Hama et de son gouvernement. Cette équipe s’était compromise à force de miner la lutte contre la corruption et les détournements de deniers publics sévissant dans ses rangs. Après avoir longtemps harcelé la presse et nargué l’opinion, certains individus devront donc se résoudre à faire profil bas. La presse africaine attend impatiemment que ce dossier aboutisse, plusieurs journalistes nigériens ayant été pris à partie pour avoir simplement voulu faire leur travail.

Le Mali et le Niger constituent ainsi des exemples- phares pour de nombreux pays africains. Tel est le cas des pays du Sahel où la misère des populations croît de manière scandaleuse, pendant que les élites ne s’embarrassent nullement d’étaler leurs richesses aux origines parfois douteuses. Dès lors, il paraît important d’élargir la lutte contre la fraude et la corruption au phénomène du blanchiment d’argent et de fouiller davantage dans les dossiers de privatisation de nos sociétés d’État.

Comme toujours, dans ce cas de figure, la presse qui lève généralement le lièvre est toujours la première à faire les frais de la lutte : les délinquants et leurs protecteurs s’acharnant à ne jamais reconnaître les faits.

D’où l’importance pour les élus et les membres des structures de lutte contre la fraude et la corruption de savoir travailler en symbiose avec les journalistes. Il faut déplorer au passage les coups de boutoir de certains gouvernements africains passés maîtres dans la répression systématique des journalistes. Le cas du Niger montre bien que lorsque la presse met le doigt sur certaines indélicatesses, plutôt que de la vouer aux gémonies et de se lancer dans des invectives sans fin, il vaut mieux chercher à voir plus clair.

Loin de construire, les responsables gouvernementaux qui s’adonnent à ce jeu, compromettent indubitablement l’avancée de la démocratie. Ce faisant, ils donnent la preuve qu’ils sont au pouvoir pour défendre leurs intérêts et ceux de leurs proches. Non les intérêts de ceux dont ils ont sollicité et obtenu les suffrages. C’est bien pourquoi il faut savoir pour qui voter et dans quel but précis. Pour ne pas regretter demain.

Le Pays