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IIIe législature : les hommes de presse font le bilan

Publié le jeudi 7 juin 2007 à 08h49min

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Edouard Ouédraogo

Après l’ouverture de la IVè législature lundi dernier avec la validation du mandat des nouveaux élus et la réélection de Roch Kaboré, des hommes de presse font le bilan de la précédente législature

Edouard Ouédraogo, Directeur de publication de L’Observateur Paalga : “Au commencement de la démocratie, c’était la presse”

La 3e législature a pris fin le vendredi 1er juin. Quelle appréciation faites-vous de cette législature ?

Edouard OUEDRAOGO (E.O) : Si je compare la 3e législature aux deux précédentes, je dirai que c’est celle pendant laquelle toutes les sensibilités qui se disputent l’échiquier national, étaient représentées. Au terme des élections de mai 2002, on a conduit à l’Assemblée une représentation nationale équilibrée, du moins suffisamment représentative de l’ensemble des forces politiques de notre pays. Et cela grâce au mode du scrutin, le système de la proportionnelle au plus fort reste. Un des facteurs les plus importants est qu’en 2002, la circonscription électorale était la région alors que cette fois-ci, il s’est agi de la province.

Chaque découpage de circonscription électorale a ses avantages et ses inconvénients. Certes, quand c’était la région, il y a des provinces qui n’avaient pas de représentants mais cela avait l’avantage de mieux pondérer les choses. De façon générale, notre parlement lors de la 3e législature a été un modèle selon moi par rapport aux deux précédents et peut-être par rapport même à celui que nous avons aujourd’hui.

Quelle appréciation faites-vous de la contribution de la presse à cette législature ?

E.O : Les médias ont joué leur rôle. Ils se sont engagés à respecter les principes du pluralisme, de l’équité autant que possible. Ça n’a pas toujours été facile mais pour l’essentiel, les médias ont joué le rôle qu’on attendait d’eux.

D’une manière générale, quelle est la place de la presse dans l’édification de notre démocratie ?

E.O : C’est une question récurrente. Le rôle de la presse dans l’édification de la démocratie est tellement central qu’on se demande si on a encore besoin de la justifier. On peut dire qu’au commencement de la démocratie, c’était la presse. Que ce soit au niveau du Burkina ou des autres pays africains, le processus démocratique s’est d’abord amplifié par l’apparition des journaux indépendants. Il y a eu bien sûr la création des partis politiques ; mais de manière visible et quotidienne, c’est d’abord à travers la presse indépendante que s’est appréciée au début des années 90, la santé démocratique de chaque pays. La presse dans l’édification de la démocratie est donc incontournable. On n’a même plus besoin de le démontrer, il s’impose.

Pour terminer, quelle lecture faites-vous de la tenue des 4es élections législatives de la IVe République ?

E.O : Sur le plan de l’organisation, je pense que tout s’est bien passé. Sauf qu’il y a eu les récriminations classiques, des accusations de fraude que les différents protagonistes s’envoient et se renvoient réciproquement. Mais globalement je pense que les choses semblent s’être déroulées dans les règles de l’art. En tout cas de manière à ce que les résultats ne puissent pas être valablement contestés. Je ne dis pas qu’il n’y a pas eu des irrégularités ; d’ailleurs il n’y a pas d’élection au-dessus de tout soupçon.

Mais, on peut constater que les résultats sont en régression par rapport à ce qu’ils ont été en 2002 qui a connu un certain équilibre entre le parti majoritaire et l’ensemble de l’opposition. Cette année, le CDP a renversé la tendance en s’adjugeant à lui seul 73 députés. A la limite, l’Assemblée peut fonctionner et légiférer sans avoir besoin des autres formations et je ne crois pas que ça soit dynamisant pour notre vie parlementaire. Il eût fallu vraiment qu’au fur et à mesure qu’on avance, le fossé se réduise entre le parti majoritaire et l’opposition. C’est en cela qu’on juge la vitalité d’un processus démocratique.

Quand il y a au contraire une petite régression en faveur du parti majoritaire, ce n’est pas bon pour lui-même. Pour ceux qui sont à l’Assemblée, il n’y a pas de problème. Mais je raisonne globalement parce que j’ai eu quand même la chance de voir aussi des processus électoraux sous lesquels ça se jouait à un siège près entre la majorité et l’opposition. Je veux parler de la IIIe République. Et je me rappelle la richesse de la vie parlementaire à cette époque-là.

Peut-être que ce n’est pas possible que nous ayons encore une telle Assemblée mais c’est souhaitable que nous tendions vers cette formule où le parti au pouvoir est obligé vraiment de faire très attention à la gestion de la chose publique parce qu’il sait que l’Assemblée, qui est chargée de contrôler l’action du gouvernement n’est pas une Assemblée bénie oui - oui, une Assemblée qui lui facilitera la tâche. Quand c’est une Assemblée qui peut même mettre le gouvernement en difficulté et l’amener à rendre le tablier. Par contre, on fait très attention quand on est sûr que de toute façon aucune motion de censure n’a de chance de passer, on a tendance à faire ce qu’on veut.

Je ne dis pas pour autant qu’on est un mauvais gouvernant.
Mais l’homme étant ce qu’il est, quand il a un pouvoir absolu, il a tendance à vouloir en user absolument. Par contre, losrqu’il y a des contre-pouvoirs notamment un parlement capable de mettre le gouvernement en difficultué par la force des choses, ceux qui gouvernent deviennent plus vertueux, plus démocrates.

L’une des caractéristiques aussi de cette nouvelle législature, c’est la faible représentativité des femmes. Tous les plaidoyers qui ont été faits par la société civile, notamment le CGD, pour renforcer la représentation féminine dans la vie parlementaire ne semblent pas avoir eu l’effet escompté. On se serait attendu à ce qu’il y ait au moins 30% de femmes à l’Assemblée nationale . Malheureusement ce n’est pas le cas.

Par Drissa TRAORE


Boureima Sigué

Boureima Sigué, Directeur de publication des Editions "Le Pays" : “Il faut une police des élections”

Monsieur le directeur, la 3e législature a pris fin le vendredi 1er juin. Quelle appréciation faites-vous de cette législature ?

Boureima SIGUE (B.S) : C’est une législature globalement satisfaisante. Comme on dit, nous sommes dans un apprentissage démocratique et qui dit apprentissage dit trébuchements, relèvements. Alors, l’essentiel est qu’on avance. Je peux dire que quelle que soit la distance sur laquelle nous devons évoluer on a un tout petit peu avancé. Mais j’estime qu’on aurait pu mieux avancer si on avait conservé le code électoral précédant et sur la base duquel les élections 2002 ont été organisées. Cela a été à mon avis un des plus gros points noirs du tableau.

Dans ce sens, je voudrais dire honnêtement qu’on a enregistré un recul. Je considère ce recul justement comme faisant partie des trébuchements. C’est presque sûr que pour la législature à venir, il y aura certainement des améliorations qui seront faites et qui tiendront compte de ce que nous avons eu comme recul par rapport à la législature précédente. Mais globalement, nous avons avancé.

D’une manière générale, quelle est la place de la presse dans l’édification de notre démocratie ?

B.S : La presse est fille de la démocratie. Dans un certain sens aussi, la démocratie est fille de la presse. C’est dire combien démocratie et presse sont interdépendantes. Nous avons un rôle de formation. Nous ne pouvons pas former ou bien informer quand nous ne disons pas les tares de notre société dans laquelle la presse évolue. La presse n’étant pas un élément ex-nihilo par rapport à la société, elle est donc partie intégrante.

A ce titre, elle doit dénoncer ce qui ne va pas et saluer ce qui va. Je crois que la presse burkinabè dans son ensemble a fait ce travail de dénonciation de conscientisation et de la formation toujours en visant l’intérêt supérieur de la nation. Je pense que dans son ensemble nous avons une presse critique. C’est d’une certaine façon l’aiguillon de l’anti-démocratie.

La contribution de la presse à la consolidation de la démocratie n’est pas quantifiable au mètre carré. C’est un travail qui s’exerce sur les montagnes. Le métier de la presse s’exerce essentiellement sur les mentalités. C’est un travail de sédimentation qui se fait dans la conscience de chacun. Cette sédimentation est le ciment émanant de notre action, de l’action des hommes politiques, des citoyens ordinaires dans le processus de démocratisation. La presse a donc un rôle très évident que ce soit dans une société de démocratie ou de dictature, elle a forcément un rôle. C’est à elle de l’orienter et à lui donner un caractère positif par la nature et l’orientation de son action.

Pour terminer, quelle lecture faites-vous de la tenue des 4e élections législatives de la IVe République ?

B.S : J’avais dit tantôt que ces élections ont été organisées sur la base d’un code électoral que j’estime être en retrait par rapport au précédent en terme de démocratie.Par ailleurs, il y a eu aussi des cas de fraudes émanant de tous les partis politiques sans exception, opposition comme majorité, chacun usant de ses méthodes. Seuls les moyens utilisés par les uns et les autres ont fait la différence.

Ces élections ont été quelque part ternies par l’ampleur de la fraude d’où qu’elle vienne. J’estime qu’il est temps maintenant de trouver des balises ; des paravents pour endiguer le phénomène de la fraude. C’est le lieu de dire donc qu’il faut absolument une police des élections qui sanctionne les fraudeurs.

Parce que jusque-là les fraudeurs ont toujours eu le beau rôle. Ils fraudent, on les prend et on les relâche si fait qu’on croirait à une forme d’encouragement même à la fraude. J’estime aussi que les fraudes auraient pu être minimisées à l’extrême s’il y avait eu des cartes d’électeurs avec photo.

Drissa TRAORE


Jacques BAMA, Directeur de Publication de L’Express du Faso : “La démocratie ne se limite pas seulement à l’organisation d’élections”

Quelle appréciation faites-vous sur la 3e législature qui vient de s’achever ?

Jacques BAMA (JB) : La fin logique de la 3e législature est une preuve que le peuple burkinabé s’imprègne de plus en plus de la culture démocratique. Et l’achèvement de trois législatures consécutives constitue à mon avis un exploit politique à saluer à sa juste valeur, d’autant plus que le pays a été si souvent « sevré » de représentations parlementaires par les Etats d’exception.

Quelle est selon vous la place de la presse dans l’édification de notre démocratie ?

JB : Dans un Etat moderne digne de ce nom, la presse participe à l’éveil des consciences, à l’information des citoyens et à la lutte contre les fléaux sociaux que sont la corruption, les injustices... Bref, la presse est indispensable. C’est pourquoi d’ailleurs les régimes qui bafouent les droits humains cherchent toujours à museler la presse. Mais pour jouer ce rôle si important dans la société, les journalistes doivent faire preuve d’un professionnalisme irréprochable, par exemple, éviter de faire du zèle selon « la direction du vent ».

Quelle lecture faites-vous de la tenue des 4e élections législatives ?

JB : La tenue des 4e élections législatives marque la consolidation progressive du Burkina à la démocratie. Il est bien vrai que la démocratie ne se limite pas seulement à l’organisation d’élections. Il y a toute une culture c’est-à-dire un comportement qu’il faut avoir. Une culture qui s’acquière avec le temps pourvu que chaque citoyen reconnaisse et accepte que celui qui a une opinion différente de la sienne n’est pas nécessairement le « fossoyeur » du peuple.

Drissa KONE


Lamoussa Robgo

Lamoussa ROBGO, directeur de la Radiodiffusion du Burkina : “La presse est comme l’éclaireur de la démocratie”

La 3e législature a pris fin le vendredi 1er juin. Quelle appréciation faites-vous de cette législature ?

Lamoussa ROBGO (L.R) : La législature qui vient de s’achever, a été assez pleine. En ce sens qu’elle a été une législature multicolore en terme de représentation des partis politiques. Elle a été également assez féconde au regard des personnalités qui l’ont animée durant les cinq ans. Au plan de la représentation politique, il y avait les partis de la mouvance, l’opposition, et le parti au pouvoir.

Ce magma donc de formations politiques et des personnalités de très hautes qualités a permis d’avoir une législature riche en projets et propositions de lois adoptés, et des questions orales car le gouvernement a été interpellé à plusieurs reprises sur des faits liés à l’actualité tout comme ceux liés aux conditions de vie des Burkinabé. Au regard de tous ces éléments, mon appréciation est que c’est une législature satisfaisante qui vient de boucler ses portes. J’espère que pendant la nouvelle législature, les idées ou les aspirations de la population seront prises en compte.

Quelle appréciation faites-vous de la contribution de la presse à cette législature ?

L.R : De façon générale, je dirai que la presse a beaucoup accompagné l’activité parlementaire durant les cinq années. A chaque ouverture ou clôture de session, la presse est toujours là pour rendre compte. Quand il y a des questions de préoccupation nationale, la presse de façon générale, va vers les députés, les groupes parlementaires ou le président de l’Assemblée nationale pour avoir des explications afin d’éclairer au mieux l’opinion. Je crois qu’à ce niveau, la presse a joué véritablement son rôle.

Si je prends l’exemple de la Radiodiffusion du Burkina que je connais le mieux, toutes les questions orales qui sont passées à l’Assemblée nationale durant cette législature ont été retransmises en direct parce que nous pensons que c’est à travers ce genre d’exercice que nous allons permettre à la population, aux auditeurs, de savoir exactement ce qui se fait, ou ce qui se dit au niveau de l’Assemblée nationale.

Toutes les cérémonies d’ouverture ou de clôture de sessions sont retransmises également en direct. En dehors de ces aspects, nous avons au niveau de la radio, une émission hebdomadaire de 30 minutes consacrée spécifiquement à la vie parlementaire. A notre niveau donc, les conditions sont réunies pour que tout ce qui se passe à l’Assemblée puisse être connu par l’ensemble des auditeurs.

Je crois que la presse de façon générale a joué également ce rôle en essayant tant bien que mal de rapporter ou de faire passer un certain nombre de points de vue.

D’une manière générale, quelle est la place de la presse dans l’édification de notre démocratie ?

L.R : Je pense que s’il n’y avait pas la presse aujourd’hui, on ne parlerait pas de démocratie. Pour moi, la démocratie est fortement liée à l’évolution de la presse. Plus une presse est libre mieux ça vaut pour la démocratie. Parce qu’aujourd’hui, la population a soif d’information, de nouvelles. Elle veut non seulement savoir exactement ce que ses dirigeants font mais aussi ce qui se passe dans le monde entier. Je crois donc que la presse de façon générale est consciente de ce rôle et fait en sorte que la population puisse avoir ces informations. Elle joue donc un rôle extrêmement important dans le processus démocratique.

En ce sens elle est un peu l’interface entre les dirigeants et la population et vice-versa. L’action de la presse a permis de nos jours, à certains dirigeants d’amoindrir leur rythme de vie, à des dossiers judiciaires d’avancer, à des "escrocs" d’être arrêtés, à des innocents de recouvrer leurs droits... La presse est donc comme l’éclaireur de cette démocratie. Nous sommes, comme dirait l’autre, le porte-voix des sans voix. De façon générale, nous jouons très bien ce rôle.

Pour terminer, quelle lecture faites-vous de la tenue des 4e élections législatives de la IVe République ?

L.R : Avant tout la tenue de ces élections prouve que les institutions fonctionnent bien, que la démocratie est en marche et qu’elle ne s’arrête pas. Ça prouve aussi que les partis politiques veulent être là où se décident un certain nombre de choses. Cet engouement de partis politiques, au nombre de 47, à ces législatives, signifierait cette envie d’utiliser les urnes, les moyens démocratiques pour accéder au pouvoir, à des cercles de décision afin de faire passer leur point de vue.

La meilleure façon qu’on peut retenir de ces législatives, c’est la volonté pour les partis politiques, pour tous les acteurs de bien vouloir passer par les urnes pour s’exprimer. Au cours de la campagne, on a remarqué que les messages qui ont été diffusés prenaient en compte l’ensemble des aspirations du peuple burkinabè. C’est vraiment fantastique et cela prouve la maturité de notre démocratie.

Ce sont des élections qui ont davantage approfondi la démocratie au Burkina. Elles grandissent notre pays et l’ensemble des partis politiques puisqu’il n’y a pas eu trop de violences, ni trop de fraudes. Nous n’avons rien à envier à ce qui se passe dans d’autres démocraties.

Par Drissa TRAORE


Zéphirin Kpoda

Zéphirin KPODA, DP de l’Hebdo du Burkina : « ... La démocratie burkinabé gagne en maturité »

Monsieur le Directeur, la 3e législature a pris fin ce vendredi 1er juin. Quelles appréciations faites-vous de cette législature ?

Zéphirin KPODA (ZK) : Elle a été particulièrement dynamique dans le sillon tracé par les deux précédentes. Après ce qu’on peut appeler les phases de renaissance sous la 1ère législature, de croissance sous la 2e, la 3e aura été celle de maturation. Une maturation qui était d’autant plus attendue que le Burkina, en 2002 sortait d’une crise sociocritique consécutive au drame de Sapouy qui avait quelque peu jeté comme un doute sur la capacité de certains acteurs politiques à accepter les règles du jeu démocratique avec le respect que cela suppose pour les institutions républicaines. Réussir à organiser des élections législatives consensuelles à l’époque était un grand défi. Il a été bien relevé. Les 13 partis qui eurent déjà en 2002 au moins un élu à l’Assemblée nationale avaient formé, on s’en souvient, 05 groupes parlementaires.

Ces groupes parlementaires ont véritablement animé des débats à l’hémicycle et donné une bonne image d’une démocratie pluraliste qui se consolide au Burkina. Cinq ans après, ce qui nous paraît le plus important à retenir de cette législature, c’est d’avoir sauvegardé les acquis des deux précédentes dans une dynamique de maturation que l’on souhaite irréversible pour l’ensemble du processus.

Quelle appréciation faites-vous de la contribution de la presse à cette législature ?

ZK : Il est difficile d’être juge et parti. Je veux dire qu’il appartient à d’autres acteurs nationaux de nous dire à nous hommes et femmes animateurs des médias, qu’elle a pu être notre contribution à la réussite de cette législature... Mais enfin, s’il faut y répondre, je dirai qu’à L’HEBDO DU BURKINA, nous nous sommes attaché à faire un maximum de comptes rendus des séances plénières de l’Assemblée nationale accompagnés de commentaires qui reflètent, cela va de soi, ,notre ligne éditoriale.

L’objectif, c’est de rendre accessible à nos lecteurs les décisions les plus importantes prises par les parlementaires. Modestement, nous pensons que cela peut contribuer à crédibiliser l’institution et partant tout le système démocratique.

D’une manière générale, quelle est la place de la presse dans l’édification de notre démocratie ?

ZK : L’assertion selon laquelle la presse est le quatrième pouvoir dans les régimes démocratiques est valable au Burkina. A côté des institutions qui gèrent l’exécutif, le législatif et le judiciaire, la presse est le reflet du foisonnement des opinions qui donnent de la saveur au pluralisme qui est le moteur par essence d’une démocratie multi-partisane. C’est ce qui fait dire que les médias sont le baromètre de la démocratie.

Au Burkina la presse participe incontestablement à former et à façonner l’opinion publique et à faire des Burkinabé des citoyens avertis. Nous devons continuer dans ce sens avec une pleine conscience de nos responsabilités sociales. Celles qui nous mettent à l’abri des dérives. Il ne faut pas, par exemple, que la liberté d’expression devienne la liberté d’injurier, de diffamer ou que le droit de critiquer se mue en prétention de jouer aux censeurs de la République.

Soyons constructifs même dans la dénonciation des travers de notre société, de notre démocratie. Une personnalité burkinabé a déclaré en 2001 « qu’on ne construit pas un pays avec des paroles haineuses ». A sa suite je dirai qu’on ne construit pas une démocratie avec une presse haineuse.

Quelle lecture faites-vous de la tenue des 4es élections législatives de la IVe République ?

ZK : C’est une preuve supplémentaire que la démocratie burkinabé gagne en maturité. Bien entendu tout n’est pas parfait, mais si l’on considère le chemin parcouru dans ce voyage continu, il y a de quoi dire que nous sommes dans la bonne direction. Celle d’une démocratie tolérante, participative, ancrée dans nos réalités. Il faut faire remarquer également que quatre législatures d’affilée c’est un record absolu battu par la IVe République.

Cette stabilité politique, dans une paix sociale relativement bonne sont des atouts de développement économique que recherchent tous les pays au monde notamment ceux qui, comme le Burkina, ont grand besoin des investisseurs étrangers. Alors souhaitons que cette quatrième législature soit aussi riche en bénéfices politiques pour le pays que les trois précédentes.

Par Idrissa BIRBA


Damien Glez

Damien GLEZ, directeur de publication délégué de JJ : “Petit à petit, l’oiseau démocratique fait son nid....”

Cette troisième législature semble avoir été celle de la maturité pour l’Assemblée nationale. Tout le monde était à peu près rôdé, les anciens introduisant les nouveaux dans les rouages compliqués de la vie parlementaire. Les principales sensibilités politiques ont eu voix au chapitre, même si l’équilibre des forces ne permettait pas à tout le monde d’agir au-delà du témoignage. Difficile d’imaginer une motion de censure au Faso ! Au regard des dossiers traités, on aimerait toujours que plus de choses changent et plus rapidement....

Quelle appréciation faites-vous de la contribution de la presse à cette législature ?

Ce qui se passe dans les couloirs de l’Assemblée ou dans l’hémicycle paraît souvent très hermétique au grand public. On ne comprend pas a priori de quoi traitent ces longues sessions et, surtout, on en maîtrise pas le fonctionnement qui semble très technique. Seul le passage du Premier ministre pour son discours sur l’Etat de la Nation attire spontanément la lumière et l’intérêt des lecteurs. Et encore, jusqu’à un certain point. Pour ne pas courir en permanence derrière l’actualité de l’exécutif en négligeant le législatif, notre publication a initié dans une rubrique intitulée « le coin du parlement ».

D’une manière générale, quelle est la place de la presse notamment d’un journal satirique comme JJ dans l’édification de notre démocratie ?

La presse, dans son ensemble, essaie de revendiquer et d’assumer le statut de 4e pouvoir. Il s’agit en fait de se situer entre information pure et commentaire, ce qui conduit, dans un processus démocratique encore jeune à se situer concrètement entre éducation citoyenne et surveillance.

Nous devons accompagner l’édification de la démocratie, en étant le plus indépendant possible de ceux qui en ont la charge ponctuellement. Nous devons en particulier être les vigiles qui vérifient que le pouvoir ne quitte pas formellement la route. Ce travail est effectué par chaque journal avec sa ligne éditoriale propre, sa sensibilité éventuelle et son style.

La presse satirique se caractérise par une présentation décalée de l’actualité : des caricatures plutôt que des photos, des sujets « poil à gratter » plutôt que des couvertures classiques, un peu de « malcause » bien comprise plutôt que des propos lénifiants. L’humour peut être une manière efficace, sans en avoir l’air, de faire avancer la cause de la démocratie.

Pour terminer, quelle lecture faites-vous de la tenue des 4es élections législatives de la IVe République ?

Certains éléments empêchent encore notre démocratie de s’appliquer de manière idéale, comme le contrôle effectif des financements des activités de campagne,le nomadisme politique qui conduit à des ambiguïtés idéologiques.

Il faut évidemment que cette démocratie,adolescente dans sa forme actuelle, progresse pas-à-pas, au rythme de l’évolution de la culture démocratique de la masse électorale. Certaines choses vont dans le bon sens, mais il faut reconnaître que le parfum de fraude a été plus présent cette année que lors des précédents scrutins. Ce sentiment laisse dans l’opinion un goût amer, même si l’ampleur formelle des fraudes pourrait apparaître aux yeux de certains comme peu déterminante dans le résultat final.

Mais tout cela est forcément observé sous le prisme des résultats et l’on constate une régression de la représentation de l‘opposition radicale dans l’hémicycle. Rassurons-nous un peu en nous disant que ce phénomène de vague majoritaire de forte amplitude n’est pas caractéristique de nos pays. Petit à petit, l’oiseau démocratique fait son nid....

Par Drissa TRAORE

L’Opinion

P.-S.

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