LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Nous sommes lents à croire ce qui fait mаl à сrοirе. ” Ovide

Sommet du G8 : Tant qu’il y aura la pauvreté

Publié le jeudi 7 juin 2007 à 08h19min

PARTAGER :                          

Le sommet des 8 nations les plus riches du monde s’est ouvert le 6 juin en Allemagne sous le thème "Croissance et responsabilité". Le G8 abordera la question de la mondialisation et du développement de l’Afrique. Intéressant, tout ça ! Mais l’expérience a montré que ces rencontres servaient d’abord et surtout les intérêts des puissants de ce monde.

La mondialisation dont il est question n’a pas encore les vertus qu’on a annoncées à cor et à cri. Les pays du tiers-monde la vivent comme un nouvel impérialisme économique sous le couvert des multinationales occidentales qui accaparent les secteurs stratégiques de la production et des services jugés juteux. L’ouverture des marchés en cours s’annonce comme une catastrophe si rien n’est fait. Nos pays sont en train de devenir des réceptacles de produits étrangers au continent.

Exporter vers l’Occident est devenu, dans le même temps, un parcours du combattant pour les produits locaux. La libéralisation du commerce, jusqu’à preuve du contraire, ne profite pas encore aux producteurs africains, à quelques filières d’exportation près. Dans ce contexte, peut-on par le commerce lutter contre la pauvreté et booster la croissance ?

Les plus lucides parmi les décideurs occidentaux l’ont avoué eux-mêmes, il faudra faire plus pour l’Afrique si on veut atteindre les Objectifs du millénaire. L’aide au développement dont l’augmentation a été annoncée l’année dernière n’est pas effective. Pire, elle baisse. Sur une augmentation de 50 milliards d’ici à 2010, le flux de l’aide publique en 2006 était déjà en régression de 38,8 milliards à 38,1 milliards de dollars. C’est dire que derrière les beaux discours et les thèmes pompeux se cachent des intentions pas toujours honnêtes parce que pas réalistes.

A moins que cette rencontre des grands ne soit une occasion de se donner bonne conscience vis-à-vis d’un continent qui, par ses matières premières, alimente d’une certaine façon les économies du Nord et qui, en retour, est très mal payé à cause de règles de commerce inéquitables qui ne servent que les intérêts des "acheteurs". Ces distorsions entretenues par le Nord appauvrissent de plus en plus les pays du Sud. L’exemple des pertes de revenus au niveau du coton ces trois dernières années est très éloquent. Finalement, le G8 et tous ceux qui gravitent autour ne sont-ils pas riches de la pauvreté du Sud ?

On pourrait le croire. C’est en cela que le sommet alternatif de Bamako est une initiative à encourager dans la mesure où c’est un creuset de propositions pour sortir d’un système qui ne profite qu’aux plus forts et aux pays riches. L’annulation totale et sans condition de la dette, l’arrêt des privatisations dans les secteurs stratégiques et, surtout, l’instauration d’un commerce international juste et équitable sont des propositions concrètes pour un nouveau départ.

Sortir du système actuel est possible. L’expérience des "caisses populaires" n’a-t-elle pas fait tache d’huile dans tous les pays du Sud, pendant que les banques étaient en surliquidité et qu’on répétait à tout emprunteur que les banques ne prêtaient qu’aux riches ? Le Sud a besoin de réinventer ses relations avec le Nord. Mais avant, il faut que les dirigeants africains se départent de leurs attitudes de complices des intérêts occidentaux sur leur sol et se mettent réellement au service de leurs populations. C’est un combat de longue haleine, mais c’est un combat qui en vaut la peine. Et les alliances sont indispensables autour, par exemple, de l’idée d’une banque du Sud, véritablement au service de la lutte contre la pauvreté. Hugo Chavez a donné le ton d’une alternative au système néolibéral actuel.

Le Sud doit regarder vers le Sud et développer une nouvelle solidarité, horizontale cette fois et qui mette des millions de petits producteurs et travailleurs au centre des préoccupations. Avec plus de 70% d’agriculteurs qui ont du mal à vivre de leur métier, le nombre de candidats à l’immigration clandestine ne peut que croître. L’Occident a beau se barricader, rien n’y fera. Seul un monde juste et équitable pourra réduire cette saignée qui ne fait honneur ni aux pays d’origine des immigrés, ni à l’Europe, principale destination des clandestins.

Pour gagner ce combat, gouvernants et sociétés civiles du Sud sont interpellés sur leur capacité à résister ensemble aux pressions extérieures qui ne vont pas manquer. Il s’agit de se prendre en charge et d’éviter ce type de dépendance qui rime avec exploitation de la misère d’autrui. Déjà, la société civile africaine s’active avec l’appui, certes, des ONG du Nord. Elle montre la voie au Mali, en Afrique du Sud et même au Niger qu’elle peut faire plier l’échine à des gouvernants sur certains dossiers. Son influence a besoin de grandir à condition qu’elle aussi s’affranchisse des pouvoirs politiques et de toute manipulation.

Dans ces pays, la société civile à voix au chapitre en raison du contexte démocratique favorable. Et la lutte contre la pauvreté ne saurait aboutir que dans un contexte démocratique viable. C’est dire que le succès de la lutte contre la pauvreté est très tributaire de la qualité de la démocratie. En tout état de cause, tant qu’il y aura la pauvreté, les habitants de la planète se regarderont en chiens de faïence avec tout ce que cela suppose de suspicion, de conflits, d’immigration, de répressions, etc.

Le Pays

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique