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Partis politiques du Burkina : Courage, fuyons nos responsabilités !

Publié le vendredi 18 mai 2007 à 07h54min

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Les élections législatives, municipales et la présidentielle sont passées. A l’issue de chacune de ces consultations, l’opposition a, c’est le moins qu’on puisse dire, toujours récolté ce qu’elle a semé : lâcheté, compromissions, refus d’aller jusqu’au bout d’une logique qui veut qu’on s’assume comme opposition, etc.

Ce propos du Fou n’a pas pour but de faire le procès de l’opposition. Mais quand on réfléchit sur la difficile affirmation de certains partis de l’opposition dite radicale, lorsqu’on sait que cette opposition rencontre mille et une entraves pour émerger, on ne peut que conclure, après mûre réflexion, qu’elle est victime non seulement de son propre jeu, un jeu clair-obscur, mais aussi d’une politique laxiste de l’Administration, qui n’est pas loin de la démission. Il existe aujourd’hui au Burkina Faso environ 114 partis politiques. Peut-il exister 114 projets ou programmes de société pour le Burkina Faso ?

Dans notre pays, il est cent fois plus facile (administrativement parlant) de créer un parti politique que de créer une entreprise commerciale ou industrielle. Si l’on ne parvient pas à enjamber, en usant de la corruption, le monceau de paperasserie entassé sur le chemin, on glisse là-dessus et on s’affale. Alors, on se décourage et l’on va dans un autre pays si l’on en a la possibilité. Ce qui est dommage, l’entreprise commerciale ou industrielle étant appelée à résorber un tant soit peu le chômage par la création d’emplois.

En revanche, en un tour de main, on peut avoir le récépissé de reconnaissance de l’existence d’un parti, surtout si l’on n’oublie pas de mentionner que c’est un parti créé pour soutenir le programme du président Compaoré. Tant et si bien que le récépissé est la seule preuve matérielle que certains présidents de parti peuvent exhiber, et qu’ils brandissent à chaque échéance électorale pour bénéficier du financement public de l’Etat. Après la période électorale, on n’en entendra plus parler jusqu’à la prochaine échéance. Pour des hommes politiques, ou se prétendant tels, créer un parti politique, c’est s’assurer un fonds de commerce avec une garantie tous risques. Les empoignades entre des chefs de parti et leurs militants qu’on a constatées çà et là montrent bien que l’idéal politique a peu de place dans les calculs de ces présidents de parti.

La Loi fondamentale du Burkina Faso reconnaît à tout citoyen le droit de créer une association ou un parti politique afin de participer à l’animation de la vie politique nationale. Mais 114 partis politiques dont les bureaux politiques de nombre d’entre eux sont constitués des membres d’une même famille, c’est un peu trop pour un pays de 13 millions d’habitants. Il y a même de l’anarchie ; et il est temps d’y mettre de l’ordre. Ce n’est pas la première fois que notre journal aborde le sujet.

Du reste, notre journal a été le premier à mettre le doigt sur la nécessité du bulletin unique, de la carte d’électeur avec photo afin de limiter les fraudes, des candidatures indépendantes. Toutes choses dont certains partis politiques ne voulaient pas ou ne veulent toujours pas entendre parler. Sous cet angle, "Le Pays" était même devenu la mauvaise conscience d’une certaine classe politique .

A-t-on intérêt à ce que l’ordre règne dans le milieu politique ? Qui gagne le plus dans ce jeu de fourbes où il est difficile de distinguer le bon grain de l’ivraie ? La réponse ne souffre pas de débats. En tout état de cause, des partis se créent ou renaissent tous les cinq ans, tel cet animal de la mythologie grecque, pour réclamer leur part du financement public. Ainsi, à tour de bras, on distribue l’argent du contribuable à des rigolots politiques.

Pour être juste, il ne faut pas jeter la balle au parti au pouvoir. L’opposition vraie et la société civile ont chacune leur part de responsabilité dans cet émiettement politique qui est hautement préjudiciable à un jeu démocratique sain. L’une et l’autre doivent dénoncer l’existence des greffons qui nuisent à l’expression démocratique. Nous osons croire qu’au cours de cette législature, des débats seront menés dans le but de savoir qui est de l’opposition et qui ne l’est pas. Par exemple, quel parti peut se positionner comme chef de file de l’opposition burkinabè aujourd’hui ? Peut-on mettre un frein à l’émiettement politique dont souffre le Burkina ?

Oui ! Il s’agit d’abord de relire le code électoral pour y inscrire la possibilité des candidatures indépendantes, dans la mesure où cette possibilité est écrite noir sur blanc dans la Constitution du 2 juin 1991. C’est par dépit, c’est parce que certains hommes et femmes se trouvaient à l’étroit dans les partis politiques qu’ils ont décidé de faire bande à part en créant des "partillons". Puis, ils ont eu peur, et ils ont vite fait de se réclamer de la mouvance présidentielle. C’est connu, certains partis politiques sont des broyeurs d’individualités.

Il s’agit ensuite de fixer des critères plus rigoureux pour créer et animer un parti politique, en exigeant par exemple un certain chiffre de signatures d’adhérents répartis sur l’ensemble du territoire national. On s’assurera enfin que le futur président d’un parti politique a assez de ressources pour faire vivre son parti et qu’il n’attend pas l’argent du contribuable pour démarrer ses activités politiques. L’argent du contribuable, la subvention, devrait plutôt venir comme un appoint et non un fonds de commerce.

Ainsi le paysage politique sera-t-il un tant soit peu assaini, débarrassé de plaisantins qui attendent l’argent public de l’Etat pour arrondir leur ordinaire. Il est temps que l’Etat arrête ce jeu de cache-cache avec les partis politiques dont certains sont opposants le jour et mouvanciers la nuit. Il est temps que ces derniers cessent de fuir leurs responsabilités pour clarifier avec l’Etat le jeu politique, pour bâtir ensemble une démocratie apaisée et digne.

"Le Fou"

Le Pays

P.-S.

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Vos commentaires

  • Le 18 mai 2007 à 15:36 En réponse à : > Partis politiques du Burkina : Courage, fuyons nos responsabilités !

    Bon article !
    Pour un bon fonctionnement de nos institutions et un renforcement de la démocratie, il faudra non seulement limiter les partis politiques, mais aussi :
    - permettre les candidatures indépendantes
    - interdire les candidatures parachutées (certains élus ne sont même pas connus des populations). On les parachute et on les fait voter à coup de "gombos" et de sacs de mil. Les candidats à tous les postes (conseillers municipaux, maires, députés) doivent être des gens qui vivent les réalités quotidiennes des populations et non des gens "venus de Ouaga" pour utiliser le terme des populations désignant les candidats parachutés par les états majors des partis.
    - obliger chaque député à faire son propre bilan aux populations à la fin de son mandat.

    La démocratie en sortirait grandie.

  • Le 22 mai 2007 à 02:20, par boneshaker En réponse à : > Partis politiques du Burkina : Courage, fuyons nos responsabilités !

    Tout ce que je retiens de cet article, c’est son titre.
    Pas pour sa justesse, non ! Parce que je le trouve tres humouristique.
    Pour en venir a l’article proprement dit, je le trouve revoltant.
    Quand on transpire dans les couloirs sombres du pouvoir ; quand
    on se fait huer par des "citoyens" venus pour ca parce que payes
    pour cela ; quand on se prive d’une bonne part de nos salaires pour
    parcourir le pays a la recherche des suffrages les moins evidents....
    Il est facheux de lire de telles critiques issues de Boites de Nuit, nees
    d’un lendemain de cauchemar, provenant d’une soif de plaisanterie de
    mauvais gout...
    Si la vie de l’Opposition de ce pays est aussi carree que l’esprit qui
    produit de tels verbes, il ne reste plus qu’a demander la fin de la pensee
    multiple ! C’est facile, il suffit de l’ecrire et retourner danser !

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