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ADF/RDA Houet : « Une profonde restructuration s’impose »

Publié le mercredi 16 mai 2007 à 07h33min

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Célestin Koussoubé

Il a peine débarqué dans l’Alliance pour la démocratie et la fédération/Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA) que l’ex-maire de la ville de Bobo-Dioulasso y connaît déjà des jours fastes. Elu conseiller municipal de son secteur en avril 2006, Célestin Koussoubé vient encore une fois de prouver avec ces législatives du 06 mai dernier qu’il reste une personnalité politique avec laquelle il faudra désormais compter dans le Houet.

N’en déplaise à ses détracteurs, le démissionnaire du parti majoritaire ne cesse de gravir les échelons dans le landerneau politique national avec son élection au poste de député de la future Assemblée nationale. Une ascension qui confirme le caractère de battant de cet homme réputé pour son franc-parler et dont certains prédisaient la mort politique après son départ du CDP. Sa victoire après les législatives le conforte davantage dans son rôle de chef de file du parti de l’Eléphant dans le Houet ; un parti qu’il semble décidé à redynamiser. C’est du moins ce qu’il nous a confié dans cet entretien.

Après la proclamation des résultats provisoires par la CENI, quel commentaire faites-vous aujourd’hui de ces élections législatives du 06 mai dernier ?

• D’une manière générale, je peux dire qu’elles se sont bien déroulées. La CENI a fait ce qu’elle avait à faire pour un meilleur déroulement du scrutin, notamment par la mise à la disposition des différentes commissions du matériel électoral sur toute l’étendue du territoire national. Je me réjouis surtout aujourd’hui du fait qu’aucun incident majeur susceptible de compromettre le bon déroulement de ces élections n’ait été signalé.

Et c’est tant mieux pour notre jeune démocratie, car cela prouve aussi la maturité politique des Burkinabè. Néanmoins il faut déplorer les multiples cas de fraudes qui ont été orchestrés par des leaders politiques. Cela s’est surtout traduit dans le Houet par l’utilisation abusive d’actes de naissance confectionnés pour la circonstance.

J’espère que dans les années à venir, on prendra les dispositions qui s’imposent pour nous éviter ce genre de situation. Cela est très important pour moi parce qu’à l’allure où vont les choses, on finira par créer une tension sociale qu’on n’arrivera plus à maîtriser. Les populations ne sont pas dupes, et si on continue de laisser des gens frauder impunément à chaque échéance électorale, elles finiront par crier leur ras-le-bol ; et cela peut nous entraîner dans de fâcheuses situations.

L’ADF/RDA conforte avec ces législatives son rang de deuxième force politique du Burkina. Cela suscite-t-il aujourd’hui de nouvelles ambitions pour le parti ?

• Je pense en toute sincérité que si les choses se déroulaient correctement, notre parti serait aujourd’hui à égalité avec le CDP et pourquoi pas la première force politique du pays. Je le dis parce qu’il faut voir les choses en face. C’est un parti qui, avec des moyens très modestes, continue de bénéficier de l’adhésion des masses.

Ailleurs on est souvent obligé de procéder à des achats de conscience pour se faire élire. J’ai vu par exemple au Kénédougou lors de la campagne une trentaine de véhicules 4x4 avec à leur bord, des directeurs généraux, des chefs de service et des secrétaires généraux de ministères, etc.

Tout cela contribue à influencer l’électorat, qui est en majorité constitué d’analphabètes. Pendant ce temps, notre jeune candidat se débattait avec les maigres moyens dont il disposait. Malgré tout cela, il a occupé la 3e place. C’est dire que si on avait les mêmes moyens que de l’autre côté, les données auraient totalement changé. Qu’à cela ne tienne, je peux vous dire que nous sortons réconfortés de ces élections, même si les résultats ne reflète pas la réalité du terrain.

Avec un siège au Houet, doit-on aujourd’hui parler de la renaissance de l’ADF/RDA dans la province ?

• Le constat général est que le parti a aujourd’hui le vent en poupe dans le Houet. Tous les moyens ont été utilisés contre nous, et nous étions la cible à abattre par tous nos adversaires politiques. Malgré cela, nous avons pu faire un résultat. Je profite d’ailleurs de vos colonnes pour dire un grand merci à tous nos militants, qui ont su résister à toutes sortes de provocations et qui ont aussi refusé de céder aux moyens (matériels et financiers) mis en branle par certains. Cela nous réconforte énormément et nous amène en tout cas à croire qu’on est ADF/RDA par conviction politique. Toujours est-il que nous assistons aujourd’hui à un renouveau de cette formation politique dans le Houet. Nous allons continuer à travailler pour renforcer les bases de ce parti, qui a connu sa période de gloire dans un passé très récent, mais qui, avec les péripéties de l’histoire, s’est fragilisé.

Ces législatives ont quand même mis à nu les dissensions au sein de la section provinciale du parti avec cette contre-campagne menée par des militants qui s’opposaient à votre candidature. Cela ne constitue-t-il pas un handicap sérieux pour l’avenir de l’ADF/RDA dans le Houet ?

• Bien sûr que oui ! Et cette contre-campagne a été orchestrée par des pionniers du parti. D’autres, par contre, ont accepté de nous accompagner, et je les remercie pour leur clairvoyance et leur esprit de sagesse. Je continuerai à solliciter leur soutien. Mais ce qu’il faut reconnaître aujourd’hui est qu’une profonde restructuration s’impose désormais au sein de cette section provinciale. Parce qu’il y a des anciens qui sont complètement aux antipodes des réalités politiques d’aujourd’hui, qui veulent toujours avoir une mainmise sur le parti et le gérer comme un bien personnel ; ce qui n’est pas normal.

Il faut maintenant songer à ouvrir la porte à de nouvelles compétences si nous voulons que ce parti devienne ce que nous voulons qu’il soit. Il y a encore des septuagénaires qui veulent occuper des postes de secrétaire général ou de délégué alors qu’ils n’ont pas la capacité physique de mener des actions sur le terrain. C’est en cela que je dis qu’il faut restructurer le parti, et nous le ferons sans état d’âme. Nous allons permettre à une nouvelle génération, plus dynamique, de s’installer et de poursuivre l’œuvre de ces anciens, que nous saluons.

Sera-ce donc une retraite forcée pour cette ancienne génération ?

• Je ne le pense pas parce que nous avons besoin et nous aurons toujours besoin de ces anciens. Ils doivent seulement comprendre que c’est à eux aujourd’hui de nous faire profiter de leurs expériences et de nous orienter à travers leurs précieux conseils. Dans les autres partis, il y a de nouvelles têtes qui apparaissent à chaque fois, mais pas à l’ADF/RDA. Ce qui n’est pas normal. Les anciens du parti doivent apprendre à quitter les choses à temps pour laisser la place aux jeunes, qui sont mieux imprégnés des réalités d’aujourd’hui et qui sont aptes à mener des actions de terrain.

Pour de nombreux observateurs, vous avez contribué à donner une nouvelle dimension au parti dans le Houet. Les plus exaltés parlent même de vous comme d’un messie.

• Oh ! non. Je reste un militant au même titre que les autres. Seulement, je ne me gêne pas de dire tout haut ce que certains pensent tout bas, l’essentiel étant que cela contribue à renforcer les acquis du parti. Je ne suis pas toujours compris, et cela m’a souvent créé des inimitiés. Mais à la longue on finit par se rendre compte de la véracité de mes points de vue. Même au CDP, je ne me gênais pas de dire certaines vérités qui ne plaisaient pas à tout le monde. Moi je pense qu’il faut être toujours franc et dire clairement les choses ; et je n’ai jamais eu peur de dire ce que je pense. Cela fait partie de mon éducation et c’est d’ailleurs pourquoi beaucoup de gens aujourd’hui ont de l’estime pour moi et m’encouragent.

Avec votre élection, peut-on dire que vous avez atteint votre objectif ?

• Non, j’aurais souhaité que le RDA remporte la majorité des sièges. C’est seulement à cette condition que notre objectif aurait été atteint. Mais nous ne désarmons pas et nous continuerons la lutte pour des victoires plus éclatantes lors des prochaines consultations électorales. En tant qu’élu de la province, je m’emploierai à faire en sorte que l’ADF/RDA grandisse davantage dans le Houet.

Peut-on dire aujourd’hui que vous avez pu réaliser avec l’ADF/RDA ce que vous n’auriez pas pu faire ou même imaginer avec le CDP ?

• Au sein du CDP, je me suis toujours investi pour le succès du parti. De nombreux camarades sont encore là pour en témoigner. On ne vient pas du néant pour être maire d’arrondissement et ensuite maire de la commune. Je me suis toujours battu pour des résultats ; et c’est avec la même détermination et la même ambition que je continue de travailler au sein de l’ADF/RDA. Partout où je me trouve, j’essaie de tout mettre en œuvre pour obtenir des résultats.

Quel doit être, selon vous, le profil d’un bon député ?

• Le député doit être à l’écoute de la population qui l’a placé là où il est et ensuite nouer des relations au profit de sa province. L’action gouvernementale en tant que telle ne suffit pas, et chaque province à ses réalités, que le député se doit de connaître afin de mener des actions dans l’intérêt de la population.

Et pour conclure

• Je dirais encore une fois merci aux militants qui m’ont fait confiance et qui m’ont accordé leurs voix. Je reste à leur écoute et je les invite à ne pas baisser les bras parce que c’est maintenant que le vrai travail commence. Pendant la campagne, j’ai remarqué que les structures du parti dans certains départements ne sont pas fonctionnelles pour des raisons que vous savez déjà. Nous allons travailler à tout redynamiser afin de permettre à nos militants d’avoir un cadre d’expression afin de se rendre utiles à leur communauté de base.

Jonas A. Kaboré

L’Observateur

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