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Afrique/France : Ce qui ne va jamais changer

Publié le lundi 7 mai 2007 à 08h03min

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Les électeurs français ont fait leur choix. Mais les peuples d’Afrique francophone ne sont pas dupes : plus ça change, plus c’est pareil au pays du Général de Gaule pour lequel la France n’a pas d’amis, mais des intérêts. Il ne faut donc pas s’attendre à de réels bouleversements dans les rapports entre l’Hexagone et nos pays suite à cette présidentielle.

Mais la France peut-elle vraiment lâcher l’Afrique ? A quels changements s’attendre ?

En dépit des déclarations à l’emporte-pièces enregistrées durant la campagne électorale, nous devons nous attendre à encore moins de changements dans les rapports entre le nouveau chef de l’Etat français et les princes qui nous gouvernent.

Nous voyons difficilement comment le nouveau locataire résistera au lobbying des défenseurs des intérêts néo-coloniaux. Oserait-il vraiment ignorer le règne français sur les marchés tropicaux ? Surtout en ce qui concerne les matières premières et tant d’oléagineux de chez nous qui font le bonheur des industriels de l’Hexagone : bois, coton, café, arachide, cacao, pour ne citer que ces derniers ? Quid des chefs d’Etats africains reconnus comme véritables alliés de l’Elysée ? Le nouveau président français se risquerait-il à affronter les réseaux de l’ombre, tous ces cercles ésothériques qui font le lit des intérêts français ?

L’expérience nous a toujours montré que les dirigeants français, de droite ou de gauche, n’ont jamais su tourner dos aux intérêts de la "Douce France", encore moins ignorer les réseaux influents. Parce qu’ils savent pouvoir compter dans nos pays sur des élites sans aucune crédibilité, mais surtout sans dignité. Des acteurs politiques et économiques qui ont capitulé depuis longtemps devant les exigences du combat pour la réhabilitation des intérêts africains.

Ainsi, nos gouvernants et leurs proches pourront toujours continuer en toute impunité à sucer le sang de nos peuples. Ils pourront paisiblement gonfler leurs comptes bancaires en Occident, se faire traiter pour le moindre mal dans les cliniques les plus huppées, puis se dorer sur la Côte d’Azur ou prendre des vacances bien méritées dans des châteaux acquis on ne sait toujours comment. Cela, pendant que nos malades sont sans soins, nos enfants sans écoles, nos femmes et nos personnes âgées sans assistance adéquate, nos braves producteurs sans soutien conséquent, et nos travailleurs abandonnés à leur triste sort.

Il faut se rendre à l’évidence, l’Elysée ne cédera jamais sur certains points. D’abord, nos pays constituent de véritables chasses gardées pour l’ancienne métropole qui cherche à s’imposer dans une Europe en construction et qui éprouve des difficultés à se frayer un chemin dans la mondialisation.

Ensuite, la France voudra toujours tenir en laisse, au plan international, sa horde d’Africains qui le valorise et lui sert de monnaie d’échange lors des grandes rencontres internationales. Chirac comme Mitterrand, tous leurs prédécesseurs, ont bien chanté l’Afrique sur les places internationales...pour mieux vendre leur diplomatie, nous faire patienter le temps qu’il faut, et passer à autre chose. Pourquoi les choses devraient-elles vraiment changer aujourd’hui ?

Ils sont bien loin les sommets de Cancun, de La Baule, etc. Avec leurs professions de foi ! Elle est bien alléchante, la décision de prélever un pourcentage sur les tarifs des billets d’avion au profit, dit-on, de nos pays pauvres. Mais que ne nous a-t-on pas promis ? Que n’a-t-on pas vu ? Et surtout, quelle maîtrise avons-nous réellement de nos propres affaires ?

Au fait, ont-ils vraiment tort, ces dirigeants français qui savent si bien défendre les intérêts de l’Hexagone ? Tout au plus, pourrait-on leur reprocher de pactiser avec des dirigeants sans égard pour les peuples qu’ils sont censés représenter ?

A nous d’en finir avec ces quarante ans de fausse philanthropie. Prendre résolument exemple sur les pays asiatiques qui ont su rompre ces liens de dépendance avant de parvenir à s’affirmer au plan économique.

Dans ce monde où la solidarité ne vaut que par le contenu que lui prête la démagogie, il nous faudrait surtout travailler à leur faire prendre en considération la solidarité des peuples, celle à laquelle la société civile bien organisée nous habitue de jour en jour. La preuve est désormais faite sur le terrain : la coopération directe entre citoyens est bien plus concrète et prometteuse que celle à laquelle les discours des officiels nous ont habitués depuis bientôt cinquante ans ! Il nous faut agir de manière à renforcer cette coopération entre les peuples français et africains avec peu d’intrusion de la part des pouvoirs étatiques.

Nous devons également lutter pour plus de rapports justes au plan bilatéral et multilatéral. Autre impératif : mettre fin à toute forme de vassalisation. L’Afrique doit savoir ce qu’elle veut et l’affirmer, cesser de jouer aux grands enfants et aux pleurnichards. L’Occident n’en a fini ni avec ses propres problèmes ni avec ses contribuables. Plutôt que de continuer à toujours compter sur lui, il nous faut renforcer la coopération Sud-Sud, notamment en considérant la disponibilité de partenaires éventuels comme le président Chavez du Venezuela qui fait des clins d’oeil en direction du continent.

Finalement, à moins d’un miracle, les Africains doivent s’attendre au statut quo dans les relations avec Paris. Sans vouloir baigner dans un pessimisme effroyable, nous devons toutefois admettre que, tant que seront maintenus en l’état ces liens de dépendance vis-à-vis de l’Occident, la plupart de nos pays continueront à végéter, et à demeurer des néocolonies.

Il nous appartient de nous réveiller, car il sera bientôt trop tard. Nos villes se vident de plus en plus de nos jeunes qui ont perdu repère et confiance. Désormais, ils n’ont d’yeux que pour l’Occident qu’on leur vend à coups de feuilletons, de gadgets publicitaires et de magazines bien ciblés. Nos campagnes, nos villes et leurs banlieues sont envahies par des produits qui supplantent ceux de nos producteurs. Nos fonctions publiques sont en proie à la médiocratie, au laxisme et au clientélisme, si elles ne sont pas tout simplement désertées.

Nos secteurs privés ploient sous le poids de la concurrence déloyale et de l’inefficacité. En particulier, nos petites et moyennes entreprises manquent cruellement de capitaux, cependant que le monde de l’informel se cherche. Dans son ensemble, les peuples africains souffrent des carences d’une gouvernance qui n’a que trop brillé par son incurie, ses injustices et sa démission. Il est temps que cela prenne fin ! A nous d’être plus responsables. La solution se trouve en Afrique. Pas à l’Elysée.

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 7 mai 2007 à 11:10, par Buenga Wécré En réponse à : > Afrique/France : Ce qui ne va jamais changer

    Bonjour,

    je suis français. Je confirme les propos de l’article... Ce n’est pas la France qui fera quelque chose pour vous. Nous mangeons vos arachides, nous nous habillons avec votre coton, nos meubles sont fait avec votre bois...

    Peut-etre qu’avec Royal quelque chose aurait changé. Mais depuis qu’il a été élu, je pense à l’Afrique, à cette stupide loi sur l’immigration... et je me dis que vraiment, il y a des moments ou je suis pas fier d’etre français.

    J’aime bien l’esprit de révolte de l’article. Car il est certain que mon pays ne vous donnera rien. Ce que vous aurez, c’est ce pour quoi vous vous serez battu. C’est un combat entre mon pays et votre pays. Beaucoup en France sont de votre coté (dont moi) mais ne sont pas parmi les puissants, et beaucoup en Afrique sont du coté des français, et sont parmi les puissants.

    Ne faiblissez pas.

    Un guerrier français, il y a plus de 500 ans disait : "Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer"

    alors luttez mes amis, luttez.

    • Le 7 mai 2007 à 15:57, par sarkozette En réponse à : > Afrique/France : Ce qui ne va jamais changer

      Que du blabla gauchiste tout ça...rappelons que Laurent Gbagbo est (était ?) avec Ségolène à l’internationale socialiste...no comment.
      Sinon, je ne crois pas que la France voudra lâcher l’Afrique, bien qu’elle n’ait plus depuis un moment les moyens de ses ambitions, mais que c’est l’Afrique qui va lâcher la France, et elle aura raison ! Ceci étant, ce genre d’article même fondé me met toujours mal à l’aise, et je dirais aux Africains de l’Ouest : "balayez d’abord devant votre porte, car en matière de dirigeants ripous, l’Afrique n’a de leçons à recevoir de personne" ! Et c’est selon moi D’ABORD ce qui fait son malheur.

      • Le 7 mai 2007 à 21:28 En réponse à : > Afrique/France : Ce qui ne va jamais changer

        Mais pourquoi vous vous adressez aux africains de l’ouest alors que l’article parle de ’Afrique en général et de l’Afrique francophone en particulier ? A aucun moment, il n’est mentionné qu’une zone du continent est mieux ou mal gérée qu’une autre. Le journaliste n’a pas écrit que tel pays est plus corrompu que tel autre, même si entre les pays il y a bien une différence de niveau de corruption. A mon avis, vous vous reprochez quelque chose

        Jean

      • Le 7 mai 2007 à 23:41, par buenga wécré En réponse à : > Afrique/France : Ce qui ne va jamais changer

        j’ai l’impression qu’on parle de la meme chose. Je ne sais pas ce qu’aurait fait Ségolène, mais bien sûr qu’elle aurait pas fait dans la dentelle non plus. Un de ceux qui a fait mal à l’afrique, c’est mitterand, dont sego etait proche conseillere...

        Le blabla reste du blabla tant que les actes ne lui imposent pas le silence... Alors on attends, on ecoute, on espere, et parfois, on participe.

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