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Subventions de l’Etat aux partis politiques : Des propositions pour un nouveau partage

Publié le vendredi 4 mai 2007 à 08h32min

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Henri Zougmoré, à la veille des législatives du 6 mai au Burkina, propose une autre clé de répartition des subventions de l’Etat allouées aux partis et formations politiques.

"Depuis le 14 avril 2007, les 47 partis et formations politiques en lice pour les élections législatives du 6 mai 2007 sont en campagne. Conformément à la loi, tous ces partis et formations politiques ont bénéficié d’une "contribution de l’Etat au financement des coûts de cette campagne".

A ce titre, une cagnotte de 400 millions de francs CFA a été répartie entre eux au prorata du nombre de candidats présentés par chacun. La plus "petite aide", d’un montant de 213 220 F CFA, est allée à un parti qui n’a présenté que 2 candidats, tandis que la plus grande, 23 667 377 de F CFA est revenue à 3 partis qui ont fait le plein avec chacun 222 candidats sur 222. On notera que sur l’ensemble, 22 partis et formations politiques ont récolté chacun 5 millions ou plus.

Dans la foulée, et toujours conformément à la loi, 100 autres millions de francs, représentant la subvention de l’Etat allouée aux partis et formations politiques pour leurs activités hors campagne électorale au titre de l’année 2007, ont été répartis comme suit :

- 50 millions entre ceux ayant obtenu au moins 5% des suffrages exprimés aux dernières législatives, cela au prorata du nombre de suffrages de chacun. Les heureux élus (les méritants) sont au nombre de trois ;

- 50 millions de francs répartis de façon égalitaire entre ceux reconnus et à jour eu égard à leurs statuts et ayant pris part au moins à un scrutin. Il sont 72 et encaissent chacun 694 444 F CFA.

La démocratie n’a pas de prix. Au total, c’est une subvention de 500 millions de F CFA qui a été allouée aux partis et formations politiques qui, reconnaissons-le, jouent un rôle très important dans notre processus démocratique. Ils constituent avec la société civile et la presse le socle d’un système comme le nôtre. Sans les subventions de l’Etat, les difficultés qu’ils rencontrent seraient sans doute plus accrues. Seulement, et à l’allure où vont les choses, si on ne fait rien dès maintenant l’anarchie sera inévitable dans quelques années.

Plus de 110 partis et formations politiques au Faso

La loi N°032-2001/AN du 29 novembre 2001 portant charte des partis et formations politiques au Burkina Faso stipule en son article 19 que : les partis et formations politiques doivent fonctionner conformément à leurs dispositions statutaires, notamment leurs statuts et règlement intérieur. Combien fonctionnent ainsi ? Combien de bénéficiaires de la subvention de l’Etat sont "à jour eu égard à leurs statuts", en réalité ?

Notre pays, avec environ 14 millions d’habitants, compte plus de 110 partis et formations politiques. Et la liste ne fait que s’allonger.

A titre comparatif :

- l’Union européenne, avec 25 pays, compte 183 partis ;

- le Nigeria, 120 millions d’habitants, en compte 30 ;

- l’Inde, 1 milliard d’habitants, compte 20 partis ;

- le Canada, 30 millions d’habitants, compte 11 partis ;

- les Etats-Unis d’Amérique, 260 millions d’habitants, comptent 2 grands partis et 4 "petits" ;

- etc.

(Source Canal 3)

Du business politique

Certains comportements laissent penser que les financements tous azimuts encouragent la prolifération des partis. Au Burkina, il suffit de créer son parti, de participer au moins à un scrutin (même avec un seul candidat) pour bénéficier d’une subvention hors campagne. En période électorale, il faut s’arranger pour présenter le maximum de candidats (dont beaucoup ignorent qu’ils le sont) et c’est le pactole. La technique commence à faire école.

Que dire de l’utilisation des fonds reçus ou de la justification des dépenses ? A Ouagadougou, quand vous achetez un article dans une quincaillerie et que vous réclamez un reçu, il y a de fortes chances que le vendeur vous pose la question suivante : "Je mets combien ?" Comprenez par là "Je majore le prix d’achat de combien ?" C’est dire que sous nos tropiques on peut faire confectionner 100 tee-shirts et se faire délivrer un reçu pour 1 000.

La politique ne doit pas être un business et notre scène politique regorge de responsables et militants de parti qui en sont convaincus. Il y a lieu de mettre de l’ordre pendant qu’il est encore temps. Cela est possible, il faut le vouloir. N’attendons pas les dérives pour commencer à chercher des solutions.

Quelques propositions

Pour ma part, et en attendant les résultats des élections du 6 mai, je voudrais faire des propositions dans le but de susciter le débat qui conduira tous les responsables politiques de notre pays à une prise de conscience. Ouvrons les yeux et acceptons de nous regarder dans le miroir.

"Les partis et formations politiques se créent librement..." (article 13 de la Constitution) Très bien ! Mais je pense qu’avant de pouvoir bénéficier de la subvention de l’Etat pour sa campagne ou pour ses activités hors campagne, tout parti nouvellement créé devrait d’abord justifier sa création en prouvant sa représentativité.

Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, où il suffit d’être reconnu depuis 70 jours à la date du scrutin pour obtenir le financement de sa campagne de prendre part à un scrutin pour voir ses activités hors campagne financées.

La représentativité réelle (au vu des résultats obtenus aux dernières municipales ou législatives) devrait être requise pour qu’un "ancien" parti continue de bénéficier d’une subvention. La répartition des financements de campagne au prorata des candidats présentés pourrait se faire seulement après les résultats et entre des partis révélés représentatifs ayant obtenu par exemple au moins 5% des suffrages exprimés.

En plus de la question des subventions de l’Etat allouée aux partis et formations politiques, certaines règles du jeu démocratique (le code électoral, la transhumance politique, la question de chef de file de l’opposition, l’implication active des responsables coutumiers dans la politique, etc.) méritent une redéfinition.

C’est pourquoi je propose la convocation d’un forum des partis et formations politiques. Cela fait déjà 15 ans que le Burkina a renoué avec le processus démocratique. Cela, à mon humble avis, permettrait de mieux repartir. Ce n’est pas uniquement pendant les crises que ce genre de concertations devraient avoir lieu.

Bonne chance à tous. Que les meilleurs (programmes) gagnent !"

Henri Zougmoré,
Secteur 26, Ouagadougou.

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